Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 août 2020, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 mai 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2019 du préfet de la Dordogne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
s'agissant de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
s'agissant du pays de renvoi :
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2021, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... A..., ressortissante guinéenne, est entrée en France le 1er août 2017 selon ses déclarations. Elle a bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé valable du 20 août 2018 au 19 août 2019. Par un arrêté du 30 octobre 2019, le préfet de la Dordogne a refusé de renouveler ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... relève appel du jugement du 27 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 3132 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que si, à la suite d'un premier avis favorable du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, Mme A... a obtenu un titre de séjour valable du 20 août 2018 au 19 août 2019, un nouvel avis a été émis le 18 octobre 2019 par lequel ledit collège a considéré que l'état de santé de Mme A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entrainer de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers la Guinée, son pays d'origine. Pour remettre en cause cette appréciation, Mme A..., qui souffre d'une thyréotoxicose et de troubles dépressifs associés à un état d'angoisse avec crises de panique, produit des certificats médicaux établis par un endocrinologue, un psychiatre et un médecin généraliste qui attestent de sa prise en charge en France. Toutefois, il ressort de ces certificats que la maladie thyroïdienne de l'intéressée s'est stabilisée et que son traitement ainsi que son suivi ont pris fin en novembre 2018. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que son état de santé aurait évolué depuis lors sur ce point. En outre, le certificat établi par un médecin psychiatre se borne à décrire la pathologie de l'intéressée. Si Mme A... se prévaut, en appel, de nouveaux certificats médicaux d'un médecin psychiatre des 6 juillet 2020 et 22 février 2021 qui indiquent que son état de santé s'est aggravé, ces éléments, au demeurant postérieurs à l'arrêté attaqué, ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'office en que qui concerne les conséquences d'un défaut de prise en charge médicale de ses pathologies, en se bornant à souligner que l'état de santé de l'intéressée nécessite un suivi en France. Par ailleurs, les certificats établis par son médecin généraliste se bornent également à décrire ses pathologies sans se prononcer sur les conséquences d'un défaut de prise en charge médicale. Par suite, et dès lors que son état de santé ne justifiait pas que le collège de médecins s'assure de la disponibilité d'un traitement adapté en Guinée, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France en 2017, soit deux ans avant l'édiction de l'arrêté attaqué. Si elle se prévaut de la présence de sa fille et de sa petite-fille en France, celles-ci y séjournaient de manière irrégulière à la date de l'arrêté contesté. La circonstance que, postérieurement à la date de l'arrêté contesté, sa petite-fille a obtenu le statut de réfugié et sa fille un titre de séjour d'une durée de dix ans est sans incidence sur la légalité de la décision en litige qui s'apprécie à la date de son édiction. En outre, Mme A... n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où résident ses cinq autres enfants et ses petits-enfants. Enfin, les seules circonstances que l'intéressée suit des cours de français et participe à des actions bénévoles ne suffisent pas à caractériser une particulière intégration en France. Par suite, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui a été opposé et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatives, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
7. En se bornant à soutenir qu'elle s'occupe de sa petite-fille qui a obtenu, postérieurement à la décision attaquée, le statut de réfugié en France, Mme A... n'apporte aucun élément permettant de considérer que l'intérêt supérieur de cette enfant serait menacé par la décision lui refusant un titre de séjour, alors que l'enfant ne sera pas séparé de sa mère, titulaire d'un titre de séjour. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
8. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points précédents, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour sur sa situation personnelle.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation à quitter le territoire français.
10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3, 5 et 7, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce, doivent être écartés.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
11. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 31 mai 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX02819 2