Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 août 2016, M.C..., représenté par Me Pialou, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 18 juillet 2016 du président du tribunal administratif de la Guyane;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guyane du 25 mars 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et, dans l'attente, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail sous 8 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, dans les mêmes conditions ;
4°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est erronée en droit, car les arrêtés du 29 juin 2016 statuant à nouveau sur son cas ne lui ont pas été notifiés, et le délai de recours n'était pas expiré contre celui de retrait de l'arrêté du 25 mars 2016, le seul qui mentionnait les voies et délais de recours. Ces arrêtés n'étant donc pas définitifs, le président ne pouvait prononcer un non-lieu ;
-l'arrêté du 11 janvier 2016 produit par le préfet devant le tribunal à l'occasion d'un référé ne donnait pas délégation à l'adjointe au chef du bureau des étrangers pour ce type de décision ;
-la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il est entré en France par la voie du regroupement familial à l'âge de 9 ans, et non de 10 ans comme indiqué par le préfet ;
-il réside en France depuis 1989, soit 27 ans, son frère est titulaire d'une carte de résident en Guyane et sa soeur est naturalisée française. Il n'a plus de liens en Haïti, où sa mère est décédée pendant des vacances en 2003. S'il avait sombré dans l'alcool et été hospitalisé d'office sans son consentement, il a repris sa vie en main. La décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;
-l'obligation de quitter le territoire français, qui est dépourvue de base légale, méconnait l'article L. 511-4 (2°) du CESEDA, dès lors qu'il est entré en France avant l'âge de 13 ans, et est entachée d'une erreur manifeste quant aux conséquences sur sa situation personnelle, compte tenu de la fragilité de son état de santé et du soutien de sa famille ;
-les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination sont par voie de conséquence dépourvues de base légale ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2016, le préfet de la Guyane conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le requérant a eu connaissance des décisions du 29 juin 2016 dans le cours de la procédure devant le tribunal administratif et que Mme A...avait reçu délégation par un arrêté n° R03-20 16-03 -14-005 régulièrement publié au recueil des actes administratifs.
Les parties ont été informées le 31 octobre 2016 que la solution du litige était susceptible de reposer sur un moyen relevé d'office ;
Par ordonnance du 12 août 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 29 septembre 2016 à midi.
Une décision en date du 17 novembre 2016 a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. B...C....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Catherine Girault, président,
- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., de nationalité haïtienne, né en septembre 1979 à Port-au-Prince, est entré en France le 13 juin 1989 à l'âge de neuf ans sous couvert d'un visa " regroupement familial " pour y rejoindre sa mère, en compagnie de son frère et de sa soeur. Il a été scolarisé en Guyane jusqu'en 1998, puis a suivi diverses formations, et il a obtenu de 1997 à 2007 une carte de résident, qu'il n'a pas fait renouveler. En 2015, après deux hospitalisations sous contrainte en 2013 et 2015 à la demande de son frère, qui l'hébergeait, il a sollicité un titre de séjour. Le préfet de la Guyane a, par une décision du 25 mars 2016, rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel de l'ordonnance n° 1600329 du 18 juillet 2016 par laquelle le président du tribunal administratif de la Guyane a dit n'y avoir lieu à statuer sur sa demande d'annulation de ces décisions.
Sur l'aide juridictionnelle provisoire :
2. M. C...a sollicité l'aide juridictionnelle le 9 août 2016 et la caducité de sa demande a été constatée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 novembre 206. Par suite, ses conclusions tendant à être admis provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.
Sur la régularité de l'ordonnance :
3. Pour prononcer un non-lieu sur la demande de M.C..., le président du tribunal administratif de la Guyane a retenu " que, postérieurement à l'introduction de la requête, le préfet de la Guyane a, d'une part, retiré, par un arrêté du 29 juin 2016, l'arrêté contesté en date du 25 mars 2016 ; que, d'autre part, par un nouvel arrêté n°3198 en date du 29 juin 2016, le préfet de la Guyane a rejeté la demande de délivrance de titre de séjour présentée par M.C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays d'origine pour destination de cette mesure si elle devait être exécutée d'office ; que cette dernière décision est devenue définitive. " Cependant, à supposer même que les décisions du 29 juin aient été notifiées à M.C..., de surcroît avec les voies et délais de recours, au cours de l'instance devant le tribunal, elles ne pouvaient avoir acquis un caractère définitif à la date du 18 juillet 2016 à laquelle le président a pris cette ordonnance, alors que le délai de recours contentieux n'était pas expiré. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que le non-lieu ne pouvait alors être prononcé. Il y a donc lieu pour la cour d'annuler cette ordonnance et de statuer par voie d'évocation sur les conclusions de M.C....
4. Il n'est pas contesté que le préfet a pris le 29 juin 2016 deux décisions séparées retirant d'abord l'arrêté attaqué du 25 mars 2016, puis prononçant un nouveau refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Si cette seconde décision n'est pas devenue définitive, M. C...n'établit ni même n'allègue avoir contesté l'arrêté de retrait, qui est donc aujourd'hui devenu définitif. Dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté retiré du 29 juin 2016 sont devenues sans objet. Par suite, les conclusions à fin de délivrance d'un titre de séjour ou d'une autorisation provisoire de séjour ne peuvent qu'être rejetées.
5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. C...au titre des dispositions combinées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 18 juillet 2016 du président du tribunal administratif de la Guyane est annulée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle et à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2016.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
Le président-assesseur,
Jean-Claude PAUZIÈSLe président-rapporteur,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 16BX02718