Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 octobre 2015, M.A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 1er octobre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 26 mars 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Catherine Girault,
- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant haïtien né en 1987, est entré pour la dernière fois en France le 20 septembre 2013 sous couvert d'un visa de long séjour émis par les autorités consulaires françaises à Port-au-Prince. Il a bénéficié d'un titre de séjour délivré par le préfet de la Guadeloupe en qualité de commerçant pour une activité de prestataire de services, réparation et maintenance de bateaux qui expirait le 24 septembre 2014. Il a sollicité le 3 juillet 2014 le renouvellement de ce titre auprès du préfet de la Haute-Garonne. Le préfet de la Haute-Garonne, par un arrêté du 26 mars 2015, a refusé de renouveler ce titre, a fait obligation à M. A...de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement du 1er octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. A...évoque " l'irrégularité en la forme du jugement attaqué " et se plaint que le tribunal n'ait pas " pris en considération le défaut de motivation manifeste " de la décision du préfet, il ressort des écritures de première instance que le seul moyen de légalité externe invoqué tenait à la compétence du signataire de la décision attaquée. Ainsi, le requérant ne saurait soulever le défaut de réponse à un moyen qui n'était pas invoqué et n'était pas d'ordre public, et le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité sur ce point.
Sur la légalité de la décision :
3. En premier lieu, l'arrêté en litige vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles le préfet s'est fondé et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet a mentionné la teneur de l'avis de l'administrateur général des finances publiques de la région Midi-Pyrénées, qui a constaté que M. A...n'avait produit aucun document relatif à son expérience professionnelle ou de document comptable permettant d'appréhender la réalité de l'activité de son entreprise et a émis un avis très réservé sur la viabilité économique de ce projet. Le préfet indique que le demandeur n'a pas fait état de circonstances humanitaires exceptionnelles, qu'il n'établit pas être exposé à des risques de traitements personnels, réels et actuels contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Haïti, et que l'obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors qu'il est entré récemment en France et qu'il n'établit pas l'impossibilité de poursuivre sa vie ailleurs qu'en France, notamment aux Etats-Unis où résident ses parents et pour lesquels il dispose d'un visa en cours de validité. Par suite, le moyen, invoqué nouvellement en appel, tiré d'une insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / (...) 2° A l'étranger qui vient exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale, à condition notamment qu'il justifie d'une activité économiquement viable et compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques et qu'il respecte les obligations imposées aux nationaux pour l'exercice de la profession envisagée. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent 2° ". L'article R. 313-16-1 du même code, pris pour l'application de ces dispositions, prévoit que l'étranger " qui envisage de créer une activité ou une entreprise doit présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique du projet. L'étranger qui envisage de participer à une activité ou une entreprise existante doit présenter les justificatifs permettant de s'assurer de son effectivité et d'apprécier la capacité de cette activité ou de cette société à lui procurer des ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein. Dans tous les cas, l'étranger doit justifier qu'il respecte la réglementation en vigueur dans le domaine d'activité en cause. Un arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé des finances fixe la liste des pièces justificatives que l'étranger doit produire. ".
4. M. A...a obtenu le 25 septembre 2013 un titre de séjour en qualité de commerçant pour créer en Guadeloupe une activité de prestation de services, réparation et maintenance de bateaux et a sollicité le renouvellement de ce titre auprès du préfet de la Haute-Garonne, après avoir décidé le transfert de son activité à Blagnac. Pour contester le refus de délivrance du titre de séjour sollicité, M. A...soutient que ce projet est économiquement viable. Toutefois, il se borne à produire des bilans et des comptes de résultats prévisionnels sur trois ans qui ne reposent sur aucune activité réelle, et n'allègue ni n'établit avoir fait une étude de marché pour les prestations de maintenance de bateaux qu'il envisage dans la région toulousaine. Il n'explique pas davantage les raisons qui l'ont conduit à transférer son projet en métropole, et ne donne aucune information sur l'activité réellement exercée en Guadeloupe pendant la période où il était autorisé à y résider. Dans ces conditions, il ne justifie pas la viabilité économique de son projet, ainsi que l'exigent les dispositions précitées de l'article R. 313-16-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de son projet professionnel ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est célibataire et sans enfant et n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Haïti, pays qu'il a quitté pour la dernière fois en 2012. Il n'établit pas disposer de ressources financières suffisantes pour subvenir à ses besoins et ne démontre pas l'intensité des liens personnels qu'il a pu créer en France, notamment avec une ressortissante française qui vit en Guadeloupe. Compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, la décision de refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, ces décisions n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de M.A....
7. Enfin, M. A...n'a pas présenté sa demande sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne justifie au demeurant d'aucun motif exceptionnel de nature à permettre son admission au séjour sur ce fondement.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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No 15BX03519