Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire de production de pièces complémentaires, enregistrés les 5 août et 27 novembre 2015, M. D...C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 21 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, modifié ;
- la convention d'établissement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, signée à Paris le 25 mai 2000 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Aymard de Malafosse,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., de nationalité sénégalaise, né le 31 mai 1974, est entré en France le 17 novembre 2007 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa " famille de français ". Il a obtenu deux cartes de séjour, dont la dernière était valable jusqu'au 18 novembre 2009, en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Après avoir divorcé en janvier 2010, il a demandé un titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 1er juillet 2010, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été confirmée par un jugement du 12 janvier 2011 du tribunal administratif de Bordeaux. A la suite d'un second mariage, il a sollicité en avril 2011 un titre de séjour en qualité de conjoint de Français. Par un arrêté du 5 décembre 2011, il a fait l'objet d'un refus de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français avec interdiction de retour sur le territoire pendant deux ans. M. C...a déposé le 21 février 2014 une demande d'admission au séjour sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 9 décembre 2014, le préfet de la Gironde a prononcé à son encontre une décision portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine et interdiction de retour sur le territoire pendant une durée de deux ans. M. C...relève appel du jugement du 21 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
2. Au soutien du moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux, M. C... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. En se bornant à relever dans son arrêté que M. C...avait sollicité son admission au séjour au titre notamment de la circulaire du 28 novembre 2012, le préfet n'a commis, en tout état de cause, aucune erreur de droit.
4. La convention d'établissement franco-sénégalaise du 25 mai 2000 susvisée n'ayant pas vocation à régir les conditions dans lesquelles les ressortissants sénégalais peuvent se voir délivrer un titre de séjour, le fait que l'arrêté contesté ne fasse pas référence à cette convention est dépourvu de toute incidence sur sa légalité.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a écrit à la préfecture le 29 octobre 2014 pour signaler que son employeur potentiel ne donnerait pas suite à sa promesse d'embauche. Par suite, en précisant dans l'arrêté que le requérant avait " déclaré n'avoir aucune promesse d'embauche ", le préfet n'a pas commis d'erreur de fait.
6. En l'absence de tout document relatif à une éventuelle embauche de M.C..., le préfet n'avait pas en tout état de cause à saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi.
7. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Contrairement à ce que soutient M.C..., ces stipulations, qui renvoient à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code.
8. Aux termes de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7... ". Si M. C...fait valoir qu'il détient une promesse d'embauche et qu'il est présent sur le territoire français depuis sept ans, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne faisait pas état de motifs exceptionnels justifiant la régularisation de sa situation en application des dispositions précitées.
9. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. M. C...soutient que le centre de ses intérêts se trouve désormais en France où il séjourne depuis l'année 2007, est bien intégré et a de la famille en la personne de son frère et de sa compagne qui est enceinte. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est entré sur le territoire français à l'âge de trente-trois ans et n'établit pas une présence continue et habituelle en France depuis sept ans. Il n'a versé aucun justificatif au dossier pour les années 2007 et 2012. Les documents produits pour les autres années ne permettent, au regard de leur nombre, de leur nature et de leur teneur, de ne retenir qu'une présence ponctuelle de l'intéressé sur le sol national et ne peuvent démontrer la réalité du caractère habituel de la résidence. Il est sans charge de famille en France. Si son frère réside sur le territoire français, M. C...n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où vivent à tout le moins son enfant et sa propre mère. Il ne justifie pas d'une insertion particulière dans la société française. Enfin, il est constant que le requérant s'est soustrait à l'exécution de précédentes mesures d'éloignement prononcées à son encontre les 1er juillet 2010 et 5 décembre 2011. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Gironde n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, ce refus n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant dont serait entachée la décision contestée.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
12. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".
13. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué qu'après avoir visé le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a relevé que si M. C...ne constituait pas une menace pour l'ordre public, il avait fait l'objet de deux mesures d'éloignement, n'établissait pas être entré régulièrement sur le territoire français, n'était pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal et ne justifiait pas de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France. Le préfet a ainsi indiqué les considérations de droit et de fait qui constituaient le fondement de sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans doit être écarté.
14. Le moyen tiré de ce que la décision litigieuse porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 10 du présent arrêt. Eu égard à ces mêmes circonstances, le préfet n'a pas commis une erreur dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige du préfet de la Gironde.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions présentées au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
17. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. C...sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
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N° 15BX02678