Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 mars 2015 et le 28 septembre 2015, la SAS C2R, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 janvier 2015 ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée pour un montant total de 69 051 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;
- la loi du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. La société Financière Quercy Guyenne, à la suite d'une opération d'apport fusion décidée le 31 janvier 2006 par l'assemblée générale de ses actionnaires, a absorbé la société C2R dont elle détenait 100 % des parts et dont elle a repris le nom en se constituant en société par actions simplifiée " SAS C2R ". Elle exploite une activité de fabrication de charpentes et de menuiserie. La société C2R, sa filiale, disposait d'une usine à Montaigu de Quercy (Tarn-et-Garonne).
2. La SAS C2R a déclaré pour les années 2007, 2008 et 2009 la valeur locative de l'établissement de Montaigu de Quercy en estimant pouvoir appliquer les dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts et en retenant ainsi les quatre-cinquièmes seulement de la valeur des immobilisations de la société absorbée. La SAS C2R a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a rehaussé les bases d'imposition à la taxe professionnelle au titre des années 2007, 2008 et 2009 au motif que l'opération de fusion relevait des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts : la valeur locative des éléments cédés ne pouvait pas être modifiée ainsi que le prévoyaient ces dispositions. La SAS C2R relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007, 2008 et 2009.
3. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " La taxe professionnelle a pour base : / 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : / a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période (...). ". Aux termes de l'article 1469 du même code, dont les dispositions sont applicables " aux biens cédés après le 1er janvier 2004 " en vertu de l'article 72 de la loi du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 : " La valeur locative est déterminée comme suit : / (...) 3° Pour les autres biens, lorsqu'ils appartiennent au redevable, lui sont concédés ou font l'objet d'un contrat de crédit-bail mobilier, la valeur locative est égale à 16 % du prix de revient ; / (...) 3° quater. Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : / a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; / b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise. (...) ". Aux termes de l'article 1518 B du même code : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération. (...) ".
4. Il résulte des termes mêmes des dispositions précitées du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts que les cessions de biens qu'elles mentionnent s'entendent des seuls transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire. Ces termes renvoyant à une opération définie et régie par le droit civil, ces dispositions ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations qui, sans constituer des " cessions " proprement dites, ont pour conséquence une mutation patrimoniale.
5. Cependant, la notion de cession au sens du droit civil recouvre tous les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire, effectués à titre gratuit ou à titre onéreux, y compris ceux qui, réalisés dans le cadre d'opérations de restructuration, portent sur l'universalité du patrimoine du cédant.
6. Et la circonstance que des biens ont été cédés par l'effet d'une fusion de sociétés ne peut avoir pour effet d'écarter l'application du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts au profit de celle de l'article 1518 B du même code, lorsque les biens en cause répondent aux conditions posées par le 3° quater de l'article 1469.
7. En effet, le 3° quater de l'article 1469, qui a été conçu par le législateur pour faire obstacle à la réduction abusive des bases de taxe professionnelle, a le caractère d'une loi spéciale par rapport au dispositif de portée générale de l'article 1518 B. Son application prévaut ainsi sur l'application de l'article 1518 B lorsque la cession d'immobilisations entre entreprises liées est dépourvue d'incidences concrètes sur les modalités d'exploitation de ces immobilisations, notamment lorsqu'elles sont demeurées en place dans le même établissement.
8. Or, il résulte de l'instruction que les immobilisations de l'usine de Montaigu de Quercy sont restées attachées au même établissement avant et après la fusion réalisée entre l'entreprise cessionnaire qui contrôle l'entreprise cédante. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration a fait prévaloir à tort les dispositions du 3° quater de l'article 1469 sur celles de l'article 1518 B du code général des impôts ne peut qu'être écarté.
9. La société requérante soutient, à titre subsidiaire, qu'à supposer que le 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts soit applicable en cas de fusion, il ne pourrait l'être qu'à compter du 1er janvier 2007. Toutefois, la précision apportée par l'article 33 de la loi du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 à l'article 1518 B que celui-ci s'applique " sans préjudice des dispositions du 3° quater de l'article 1469 " n'implique pas que, jusqu'à cette modification, l'article 1518 B du code général des impôts faisait obstacle à l'application du 3° quater de l'article 1469 de ce code. Par suite, le moyen tiré de l'application rétroactive illégale d'un dispositif qui n'existait pas antérieurement doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que la SAS C2R n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête, y compris celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de la SAS C2R est rejetée.
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N° 15BX00803