Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 mai 2019, M. D... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1801136 du tribunal administratif de la Guadeloupe du 26 mars 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 30 octobre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer le titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, des dispositions du 7° dudit article ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est établi que son état de santé n'est pas consolidé et qu'il requiert des investigations complémentaires qui ne peuvent être effectuées dans son pays d'origine ; le préfet a ainsi méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté en litige a aussi porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale garanti par les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'a pas été tenu compte de la durée de sa présence en France, du fait qu'il s'occupe d'une ressortissante française handicapée et des deux enfants de cette dernière ni enfin de ses perspectives d'insertion professionnelle ;
- en édictant une obligation de quitter le territoire français, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2019, le préfet de la région Guadeloupe conclut au rejet de la requête.
Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
Par ordonnance du 12 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 12 septembre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F... C...,
- et les observations de Me E..., représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant haïtien né en 1965, est entré irrégulièrement sur le territoire français en novembre 2013 afin d'y déposer une demande d'asile qui a été finalement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 mars 2016. Le 25 janvier 2018, M. B... a sollicité un titre de séjour pour raison de santé mais par une décision du 30 octobre 2018, prise après l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le préfet de la Guadeloupe a rejeté cette demande, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement rendu le 26 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande d'annulation de la décision préfectorale du 30 octobre 2018.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre d'hypertension artérielle, d'un diabète de type 2 et de problèmes urologiques faisant l'objet d'un suivi au centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre. Dans son avis du 3 avril 2018, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas du certificat médical rédigé le 19 novembre 2018, que l'état de santé de M. B... nécessiterait des investigations et un suivi cliniques auxquelles ce dernier ne pourrait effectivement bénéficier dans son pays d'origine. M. B... ne produit par ailleurs aucun autre élément circonstancié permettant d'infirmer l'avis du collège des médecins. Dans ces conditions, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant le titre de séjour demandé par M. B....
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement en France au mois de novembre 2013 et qu'il y a séjourné en tant que demandeur d'asile jusqu'en 2016, année au cours de laquelle sa demande a été définitivement rejetée. Les éléments qu'il produit au dossier, à savoir un avis d'imposition, un contrat de bail daté de 2018, diverses attestations et une promesse d'embauche rédigée postérieurement à la décision attaquée ne permettent pas d'établir que M. B... aurait noué en France des liens privés et familiaux suffisamment anciens et intenses. De tels liens, en particulier, ne peuvent être déduits de la seule circonstance que M. B... apporterait un soutien à une ressortissante française atteinte d'un handicap et mère de deux enfants. Par ailleurs, M. B..., qui est célibataire et sans charge de famille, est entré en France à l'âge de 48 ans et avait ainsi passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où il n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales ou personnelles. Dans ces conditions, en prenant la décision en litige, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 30 octobre 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 19BX02086 présentée par M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. F... C..., président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2019.
Le rapporteur,
Frédéric C...Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Virginie Marty
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX02086 5