Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 avril 2019, M. A... B..., représenté par Me E... demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 14 mars 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2018 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre audit préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
4°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé en fait au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- en ne faisant pas droit à sa demande, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, dès lors que son épouse est malade, qu'elle a sollicité un titre " étranger malade " et que la mesure d'éloignement porterait une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ; ces mesures violent donc l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 2 qui proclame le droit à la protection de la santé ;
- le refus de séjour viole également la convention internationale des droits de l'enfant, en raison de la présence de leur fille mineure, qui a droit à la présence de ses deux parents.
Par une ordonnance en date du 16 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juillet 2019.
Par un courrier en date du 5 novembre 2019, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en ce que le tribunal administratif a statué sur un refus de titre de séjour qui n'existe pas et de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation que dirige M. B... contre un refus de titre qui ne lui a pas été opposé.
Par une décision en date du 1er août 2019, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention entre la République française et la République algérienne démocratique et populaire signée à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant algérien, né en 1985, est entré irrégulièrement en France le 6 novembre 2017 selon ses déclarations, en compagnie de son épouse, également ressortissante algérienne, et de leur fille mineure. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français, sans jamais, contrairement à ce que mentionne le jugement attaqué, avoir sollicité un titre de séjour, seule son épouse ayant sollicité un droit au séjour en raison de son état de santé. Après examen de la demande de son épouse, le préfet des Deux-Sèvres a opposé à celle-ci, le 18 octobre 2018, un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement. Le même jour, il a pris, à l'encontre de M. B... un arrêté portant éloignement dans le délai de 30 jours et fixant le pays de renvoi. M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté pris à son encontre le 18 octobre 2018 portant obligation de quitter le territoire français.
Sur la demande tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Par une décision en date du 1er août 2019, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B.... Par suite, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont sans objet.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Par l'arrêté contesté du 18 octobre 2018, le préfet des Deux-Sèvres a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi. Par suite, le tribunal administratif de Poitiers a entaché son jugement d'irrégularité en ce qu'il a statué sur un refus de séjour qui n'a pas été opposé au requérant.
4. Il y a lieu pour la cour d'évoquer dans cette mesure et de statuer sur les autres conclusions présentées par M. B... dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 ci-dessus que les conclusions dirigées par M. B... contre un refus de séjour que lui aurait opposé le préfet des Deux-Sèvres, appuyées sur des moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, sont irrecevables.
6. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. C'est ainsi qu'il vise, notamment, les articles L. 511-1 et L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquels a été prise la mesure d'éloignement en litige, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au titre des considérations de fait, il rappelle les conditions d'entrée et de séjour irréguliers de M. B... en France, en compagnie de son épouse et de leur fille mineure, rappelle également qu'il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et indique que la mesure d'éloignement et celle portant fixation du pays de destination ne contreviennent pas aux dispositions des articles 3 et 8 de la convention européenne précitée. Par suite, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination est suffisamment motivé au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
7. En troisième lieu, M. B... est entré irrégulièrement en France moins d'un an avant l'édiction de l'arrêté litigieux et s'y est maintenu irrégulièrement, sans jamais solliciter la délivrance d'un titre de séjour. Par ailleurs, par un arrêt du même jour, la cour de céans confirme la légalité du refus de titre de séjour opposé par le même préfet à son épouse, refus assorti d'une mesure d'éloignement à destination du pays dont ils sont tous deux ressortissants et où le couple pourra donc reconstituer sa cellule familiale. Enfin, M. B... ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie où il a passé l'essentiel de sa vie. Dans ces conditions, la mesure d'éloignement n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes raisons, en édictant cette mesure, le préfet des Deux-Sèvres n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B....
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... sur ce fondement.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M. B....
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1802744 du 14 mars 2019 est annulé en tant qu'il a statué sur une décision de refus de séjour.
Article 3 : Le surplus de requête de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Poitiers et de ses conclusions d'appel est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet des Deux-Sèvres.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme D... C..., présidente-assesseure,
Mme F..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2019.
Le rapporteur,
F...Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX01593