Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juin 2017, M. A...C..., représenté par la SELARL Eden avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la décision d'obligation de quitter le territoire :
1. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ".
2. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 27 mars 2006, M.C..., ressortissant d'origine biélorusse, s'est vu refuser le séjour au titre de l'asile. Cette décision a été confirmée par une ordonnance du 26 juin 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux. Par un arrêté du 24 septembre 2007, le préfet de la Charente-Maritime a refusé de délivrer à l'intéressé un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Cet arrêté a été confirmé par un jugement du 12 mars 2008 du tribunal administratif de Poitiers. Par un arrêté du 3 mars 2009, le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour et assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire, puis, le 7 août 2010, le préfet de la Seine-Maritime a pris à son encontre un arrêté portant reconduite à la frontière, qui a été confirmé par une ordonnance du 10 août 2010 du tribunal administratif de Rouen. Par un nouvel arrêté du 12 juin 2011, le préfet de la Somme a pris à l'encontre de M. C... un arrêté de reconduite à la frontière, confirmé par une ordonnance du 17 juin 2011 du tribunal administratif de Rouen. Le requérant a été détenu, par ailleurs, depuis le 18 janvier 2012 au sein de la maison d'arrêt de Rouen à raison des faits commis en 2011. Par un arrêt de la cour d'assises de la Seine-Maritime du 26 février 2014, il a été condamné à une peine de huit ans d'emprisonnement pour des faits de vol à mains armées commis le 3 janvier 2011. Dès lors, en raison de cette incarcération, le requérant a été maintenu sur le territoire français. M. C...n'a pas sollicité de nouveau la délivrance d'un titre de séjour. La préfète de la Seine-Maritime pouvait, néanmoins, et dans les circonstances de l'espèce, continuer à se fonder notamment sur le refus de titre de séjour de 2009 pour, au regard de la situation irrégulière sur le territoire français de l'intéressé à la date de la fin de sa mise en détention intervenue peu de temps avant la décision en litige, prononcer à nouveau son éloignement. Par suite, la préfète n'a pas commis d'erreur de droit en fondant l'obligation de quitter le territoire français en litige sur les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
3. Il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté, ni d'aucune pièce du dossier, que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. C...avant de prendre la décision contestée.
4. M.C..., né le 3 juin 1985, déclare être entré en France en 2003. Il est célibataire et sans enfant à charge. Si le requérant soutient être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-sept ans, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. Il ne démontre pas avoir noué en France des liens d'une particulière intensité. Il ressort des pièces du dossier qu'il est connu pour des faits de délinquance et a fait l'objet d'une grave condamnation pénale ainsi qu'il a été dit au point 2. Il s'est maintenu en France en partie en raison de sa détention. S'il a obtenu, durant ces années de détention, une certification de formation générale le 19 juin 2013, un diplôme national du brevet le 5 juillet 2015 ainsi qu'un titre professionnel de magasinier le 20 novembre 2015 et s'il a également travaillé au sein des services généraux du centre pénitentiaire et des ateliers, il ne justifie toutefois pas d'une perspective d'insertion professionnelle qui devrait nécessairement se poursuivre en France. Il ressort également des pièces du dossier que M. C...n'a pas, en 2006 et 2012, déféré à plusieurs mesures d'éloignement. Dès lors, compte tenu des conditions de séjour en France et en dépit de sa durée, dont doivent d'ailleurs être retranchées les périodes d'incarcération, la décision de la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes raisons, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.C....
5. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision d'obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité.
Sur la décision de refus de délai de départ volontaire :
6. Ainsi qu'il a été indiqué au point 5, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'encontre de la décision de refus de délai de départ volontaire, doit être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de délai de départ volontaire est entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. Ainsi qu'il a été indiqué au point 5, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.
9. M. C...n'assortit d'aucune précision, ni d'aucune justification, ses allégations selon lesquelles il serait exposé dans son pays d'origine à des risques personnels, directs et actuels, notamment de traitements inhumains et dégradants contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au demeurant, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande d'asile. Dans ces conditions, la décision fixant le pays de destination n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Pour les mêmes raisons que celles énoncées aux points 4 et 9, le moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C...doit être écarté.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
11. Ainsi qu'il a été indiqué au point 5, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'encontre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, doit être écarté.
12. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;
13. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales entre 2004 et 2014. Il n'a pas déféré à cinq décisions préfectorales définitives l'obligeant à quitter le territoire français. Il y a lieu de retrancher de la durée de présence en France de quatorze ans, les nombreuses années passées en détention. Il ne justifie pas, par ailleurs, de liens stables en France. Par suite et compte tenu de l'ensemble des ces éléments, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas, en prononçant une mesure d'interdiction du territoire d'une durée de trois ans, méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
14. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 4, la décision interdisant le retour de M. C...pendant trois ans ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me D...B....
Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 17 mai 2018 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 31 mai 2018.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : X. FABRELe premier vice-président de la cour,
Président-rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°17DA01273 2