Par une requête et des mémoires, enregistrés le 1er août 2014, le 27 janvier 2015 et le 14 avril 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en tant qu'il a limité à 11 000 euros la somme que le centre hospitalier de Lens a été condamné à lui verser en remboursement des frais et débours exposés ;
2°) de porter le montant de ce remboursement à la somme de 25 548,15 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2013 avec capitalisation de ces intérêts ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Lens à lui verser une somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Lens une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- M. A...a été victime de deux infections nosocomiales consécutives, l'une au service de gastro-entérologie après son intervention chirurgicale du 1er août 2008 et une seconde au service de réanimation, qui ont engendré un allongement de son hospitalisation ;
- le surcoût au titre des débours exposés s'élève à un montant de 25 548,15 euros et non de 11 000 euros comme l'ont estimé à tort les premiers juges ;
- elle justifie par le relevé détaillé de ses débours et par des attestations d'imputabilité du médecin conseil de la caisse de la réalité de sa créance et du lien de causalité avec ces infections.
Par un mémoire, enregistré le 17 mars 2015, le centre hospitalier de Lens, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il n'existe aucun déficit fonctionnel temporaire en lien avec l'infection nosocomiale contractée par M.A... ;
- la prise en charge de l'intéressé en réanimation pour la période du 8 août 2008 au 18 août 2008 n'est pas la conséquence de l'infection nosocomiale contractée par celui-ci ;
- aucune des pièces produites en appel par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois n'est de nature à justifier la créance de celle-ci tant dans son principe que dans son montant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Milard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois :
1. Considérant qu'à la suite de l'intervention chirurgicale qu'il a subie au service de gastro-entérologie du centre hospitalier de Lens le 1er août 2008, M.A..., qui présentait des problèmes respiratoires, a été transféré le 7 août 2008 au service anesthésie-réanimation ; qu'au cours de son séjour dans ce service, les médecins ont diagnostiqué une pneumopathie sévère à " pseudomonas aeruginosa ", entérocoque résistant à la Vancomicine, qui a nécessité son placement, le 18 août 2008, en unité d'isolement spécifique pour les porteurs de ce germe et son maintien dans cette unité jusqu'au 22 août 2008 ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise établi à la suite du jugement avant dire-droit du tribunal administratif de Lille du 17 juillet 2013, qu'un prélèvement effectué le 9 août 2008 a révélé que M. A...était porteur du germe infectieux alors qu'un précédent prélèvement réalisé le 7 août 2008 lors du début du séjour de l'intéressé au service de réanimation du centre hospitalier de Lens, n'avait décelé aucune anomalie ; que les hommes de l'art, après avoir précisé que cette infection devait être regardée comme une infection nosocomiale, ont établi un lien entre la contamination dont a été victime le patient et les soins reçus lors de l'hospitalisation en réanimation du patient ; que s'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. A...a été victime d'une seule infection nosocomiale par entérocoque résistant à la Vancomicine, cette infection, dont l'établissement hospitalier n'établit pas qu'elle aurait une cause étrangère, présente un lien direct et certain avec les soins reçus lors de l'hospitalisation en service de réanimation de l'intéressé pendant la période du 7 août 2008 au 17 août 2008 et est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Lens ; que, par suite, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont limité à la période du 18 au 22 août 2008, la période au titre de laquelle l'organisme social pouvait prétendre au remboursement des frais et débours exposés pour le compte de son assuré social ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois justifie, par le relevé de prestations et les attestations produites au dossier, tant de l'imputabilité de ces dépenses à l'infection nosocomiale dont a été victime M. A...que de leur montant qui doit être fixé à 25 548,15 euros pour la période du 7 au 22 août 2008 ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
3. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois a droit aux intérêts de la somme de 25 548,15 euros à compter de la date d'enregistrement, le 17 janvier 2013, de sa demande au tribunal administratif ;
4. Considérant que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 17 janvier 2013 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 17 janvier 2014, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier de Lens à ne lui allouer que la somme de 11 000 euros ; qu'il convient de porter cette somme à 25 548,15 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation ainsi qu'il a été dit aux deux points précédents ;
Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois tendant au versement de l'indemnité forfaitaire de gestion :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 21 décembre 2015 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 047 et à 104 à compter du 1er janvier 2016 " ;
7. Considérant qu'il y a lieu de porter le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions précitées à laquelle la CPAM de l'Artois a droit et qui lui a été allouée en première instance à la somme de 1 047 euros ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Lens le versement à la caisse primaire de l'Artois d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 11 000 euros que le centre hospitalier de Lens a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois par le jugement du 4 juin 2014 du tribunal administratif de Lille est portée à la somme de 25 548,15 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2013. Les intérêts échus à la date du 17 janvier 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale à laquelle la CPAM de l'Artois a droit est porté de 1 028 euros à 1 047 euros.
Article 3 : Le jugement du 4 juin 2014 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le centre hospitalier de Lens versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, au centre hospitalier de Lens et à M. B...A....
Délibéré après l'audience publique du 26 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- Mme Muriel Milard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 9 février 2016.
Le rapporteur,
Signé : M. MILARDLe président de chambre,
Signé : M. D...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°14DA01365