Résumé de la décision :
M. D..., un ressortissant nigérian, a interjeté appel contre un jugement qui rejetait sa demande d'annulation d'un arrêté préfectoral l'obligeant à quitter le territoire français. Le tribunal administratif a déterminé que l'obligation de quitter le territoire constituait une atteinte disproportionnée au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale, en raison de ses liens familiaux en France, notamment avec sa compagne titulaire d'un titre de séjour et leurs enfants. Par conséquent, la cour a annulé l'arrêté du 16 novembre 2017 ainsi que le jugement du 29 janvier 2018 et a enjoint la préfète de la Seine-Maritime de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de deux mois. Enfin, la cour a condamné l'État à verser une somme de 1 000 euros à l'avocat de M. D... au titre de l'aide juridictionnelle.
Arguments pertinents :
1. Respect de la vie familiale : Le tribunal a considéré que l'obligation d'éloigner M. D... entraînait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, protégée par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme. Il a souligné que M. D... était le père de trois enfants dont deux étaient nés en France, ce qui ancre ses attaches familiales sur le territoire.
> "Eu égard aux circonstances particulières de l'espèce et aux effets de la mesure d'éloignement, l'obligation de quitter le territoire français a porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise."
2. Annulation de l'arrêté : En conséquence, M. D... a été jugé fondé à contester la légalité de l'arrêté préfectoral, car ce dernier méconnaissait les stipulations de l’article 8 précité.
> "Par suite, ce dernier est fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales."
3. Nouvel examen requis : La cour a précisé que l'injonction pour un nouvel examen de la situation de M. D... devait être effectuée par le préfet dans un délai déterminé, ce qui respecte les obligations procédurales de l’administration.
> "Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de fixer au préfet compétent un délai de deux mois, à compter de la notification du présent arrêt pour procéder à ce réexamen."
Interprétations et citations légales :
1. Article 8 de la CEDH : Ce texte impose à tout État de respecter le droit à la vie privée et familiale. La cour a interprété que toute mesure d'ingérence doit être justifiée par un besoin impérieux, ce qui n’était pas le cas concernant la situation de M. D...
> "Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire…"
2. Code de justice administrative - Article L. 911-2 : La cour a fait référence à cet article pour établir le fondement d’une injonction à l'administration afin de réexaminer la situation de M. D..., ce qui illustre la compétence de la juridiction administrative dans les affaires liées aux droits des étrangers.
> "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction… prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé."
3. Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 512-4 : Cet article stipule que l'annulation d'une obligation de quitter le territoire entraîne automatiquement la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour à l'étranger concerné, ce qui protège ses droits pendant la phase d'examen administratif de sa situation.
> "Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas…"
Ces éléments montrent que la décision a été fondée sur un équilibre délicat entre les