Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 octobre 2018 et le 5 février 2019, Mme B..., représentée par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2017 du préfet du Nord ;
3°) à titre principal, d'enjoindre à " l'administration " de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de l'admettre provisoirement au séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., de nationalité nigériane, née le 25 août 1982, entrée régulièrement en France le 4 août 2013 selon ses déclarations, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision du 30 juillet 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 3 juin 2015 de la Cour nationale du droit d'asile. Elle a ensuite demandé le 13 février 2017, son admission au séjour en faisant valoir son état de santé. Elle relève appel du jugement du 20 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 septembre 2017 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays dont elle a la nationalité, comme pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.
4. Il résulte tout d'abord des dispositions précitées que l'avis émis le 21 mars 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) n'avait pas à comporter la mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical relatif à l'état de santé de MmeB.... Il ressort ensuite des pièces du dossier, en particulier d'un bordereau de transmission du 7 mars 2018, signé pour le directeur de l'OFII par la directrice territoriale adjointe, qui disposait d'une délégation de signature et non d'une délégation de compétence pour ce faire, par un arrêté du 1er septembre 2017, que celui-ci précise le nom du médecin instructeur ayant rédigé le rapport du 9 mars 2017 au vu duquel le collège de médecins a émis son avis. Il ressort de l'avis émis le 21 mars 2017 que ce médecin n'a pas siégé au sein du collège des médecins l'OFII. Enfin, la circonstance que ce document mentionne un avis du 17 mars 2017 alors que celui-ci a été rendu le 21 mars 2017 est sans incidence sur le bien-fondé de celui-ci dès lors qu'il ne s'agit que d'une simple erreur de plume laquelle a été corrigée par une nouvelle attestation produite en appel par le préfet du Nord. Enfin, le respect du secret médical s'oppose à la communication à l'autorité administrative, à fin d'identification de ce médecin, de ce rapport, dont les dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoient la transmission qu'au seul collège des médecins de l'OFII. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la production de ce rapport médical, les moyens tirés du vice de procédure doivent être écartés.
5. Mme B...réitère son moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle. Cependant, elle n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ce moyen. Par suite, il y a lieu, par adoption du motif retenu à bon droit par les premiers juges de l'écarter.
6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016, applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".
7. Le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si Mme B...produit des ordonnances de prescription médicale et des certificats médicaux faisant état d'un stress post-traumatique en lien avec des évènements vécus dans son pays d'origine et de la nécessité de la poursuite de son suivi médical, ceux-ci ne comportent aucun élément de nature à établir que l'absence de traitement aurait pour elle des conséquences d'une extrême gravité et ainsi, d'infirmer l'appréciation du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si la requérante fait valoir qu'elle ne pourrait être soignée au Nigéria, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'elle ne remet pas en cause l'appréciation du collège de médecins sur les conséquences d'un arrêt du traitement médical. Par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, la décision en litige n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences au regard de l'état de santé de l'intéressée.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision doit être écarté.
9. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 7, le préfet du Nord n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 7, le préfet du Nord n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeB....
Sur la décision fixant le pays de destination :
11. Il résulte de ce qui précède que la décision obligeant Mme B...à quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision doit être écarté.
12. Mme B...soutient qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine où elle aurait subi des violences physiques et aurait assisté au meurtre de sa mère. Toutefois, elle ne produit aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels, directs et actuels qu'elle encourrait. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée le 30 juillet 2014 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 3 juin 2015. Par suite, le préfet du Nord, qui ne s'est pas senti lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'a pas, en prenant la décision en litige, méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Nord.
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N°18DA02136