Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2018, M.A..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 février 2018 de la préfète de la Seine-Maritime et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de résident ou une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation dans un délai de huit jours sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant mauritanien né le 12 février 1986, entré en France le 16 septembre 2008, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision du 23 janvier 2009 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 2 novembre 2009 de la Cour nationale du droit d'asile. Il a ensuite demandé son admission au séjour en faisant valoir son état de santé. Il a bénéficié à compter du 3 décembre 2012 d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui lui a été renouvelé jusqu'au 25 mars 2017. Il relève appel du jugement du 27 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2018 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu à l'ensemble des moyens invoqués par M.A..., qui a présenté simultanément des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 6 février 2018 et de la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté à l'encontre de celui-ci au soutien desquelles il a présenté des moyens identiques, dont ceux tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du même code, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer. En conséquence, le moyen tiré de son irrégularité doit être écarté.
Sur le refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
4. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.
5. Il résulte tout d'abord des dispositions précitées que l'avis émis le 19 juin 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui, contrairement à ce qui est soutenu a été produit par l'autorité administrative devant les premiers juges, n'avait pas à comporter la mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical relatif à l'état de santé de M.A.... Il ressort ensuite des pièces du dossier, en particulier d'un certificat administratif, signé pour le directeur de l'OFII par la directrice territoriale adjointe de Rouen, que celui-ci précise le nom du médecin instructeur ayant rédigé le rapport du 20 mars 2017 au vu duquel le collège de médecins a émis son avis, lequel n'a pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFII. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
6. En deuxième lieu, M. A...réitère ses moyens tirés du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, il n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ces moyens. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges de les écarter.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ".
8. L'avis émis le 19 juin 2017 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration précise que l'état de santé de M. A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. M. A...soutient qu'il a besoin d'un suivi approprié pour la bronchite chronique dont il souffre et produit des ordonnances de prescriptions médicales, un certificat médical en date du 26 février 2018 qui se borne à préciser que la prise en charge de la pathologie dont souffre M.A..., à savoir de l'asthme aggravé par un tabagisme important arrêté depuis son arrivée, " ne semble pas possible dans son pays d'origine " et un autre en date du 8 mars 2018 précisant que l'intéressé souffre d'une pathologie de longue durée. Cependant, ces seuls éléments ne sont pas de nature à infirmer l'appréciation du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à l'existence effective d'un traitement approprié dans son pays d'origine. En outre, la circonstance que les médicaments prescrits à l'intéressé ne figurent pas sur la liste des médicaments essentiels en Mauritanie publiée par l'Organisation mondiale de la santé n'est pas à elle seule de nature à établir, alors que cette liste ne comprend pas l'ensemble des traitements susceptibles d'être accessibles dans ce pays, que leurs principes actifs n'y seraient pas disponibles. D'ailleurs, trois anti-asthmatiques y figurent. Enfin, il ne ressort d'aucun des documents médicaux que l'intéressé verse au dossier, que ces principes actifs ne pourraient être remplacés par d'autres de la même classe qui y sont disponibles. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Enfin, M. A...soutient qu'il réside en France depuis 2008 et qu'il justifie d'une très bonne insertion professionnelle dès lors qu'il travaille depuis 2014, toutefois, il n'établit pas la durée de sa présence continue en France depuis 2008. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a quitté son pays d'origine à l'âge de vingt-deux ans. Son épouse et ses trois enfants vivent au Sénégal dont deux y sont nés postérieurement à son entrée sur le territoire français. Par ailleurs, il n'établit pas avoir noué des liens sociaux d'une particulière intensité en France. Enfin, si M. A...se prévaut de son insertion professionnelle en France, il ne justifie avoir exercé que des missions d'intérim entre 2014 et 2017. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et de ce qu'il dispose d'attaches familiales fortes au Sénégal, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ne porte pas, à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte excessive et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
10. Pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 5 et 8, le moyen tiré du vice de procédure en ce que ce collège n'aurait pas été saisi sur la compatibilité de son état de santé avec une mesure d'éloignement doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui a été dit au point 6, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
13. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 8, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
14. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 9, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A....
Sur la décision fixant le pays de destination :
15. Il résulte de ce qui précède que les décisions de refus de titre de séjour et obligeant M. A... à quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté.
16. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
17. Si M. A...soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine à raison des persécutions exercées à l'encontre de sa famille, cependant, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations de nature à établir qu'il encourrait des risques personnels et actuels en cas de retour en Mauritanie. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée le 23 janvier 2009 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 2 novembre 2009. Enfin, il ressort des pièces du dossier que celui-ci se rend fréquemment au Sénégal. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas, en prenant la décision en litige, méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
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N°18DA02413