Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 avril 2017 et le 24 décembre 2018, M. D..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Rouen du 28 févier 2017 en tant qu'il a limité à 51 500 euros la somme que l'IME d'Ecouis a été condamné à lui verser en indemnisation de son préjudice ;
2°) de condamner l'IME d'Ecouis à lui verser la somme totale de 191 352,26 euros au titre des traitements non-perçus et de la perte de ses droits à la retraite, avec capitalisation des intérêts au 19 juin 2014 et à chaque année ultérieure ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de l'IME d'Ecouis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,
- et les observations de Me B...C..., représentant M.D....
Une note en délibéré, enregistrée le 18 janvier 2019, a été présentée pour M. D...par Me C....
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., éducateur spécialisé titulaire depuis le mois de juin 1983 au sein de l'IME d'Ecouis, a, à sa demande, été placé en disponibilité pour convenances personnelles du 1er octobre 2000 au 31 août 2001. Il relève appel du jugement du 28 février 2017 du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a limité à 51 500 euros la somme que l'IME d'Ecouis a été condamné à lui verser en indemnisation de son préjudice résultant de l'illégalité du refus de réintégration qui lui a été opposé.
Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :
2. La personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué.
3. M. D...demande la condamnation de l'IME d'Ecouis à lui verser une somme totale de 191 352,26 euros en indemnisation de ses préjudices subis, soit un quantum supérieur à celui de 128 289,78 euros, objet de ses conclusions indemnitaires présentées en première instance. S'il résulte des principes rappelés au point 2 qu'il est recevable à invoquer le chef de préjudice lié à la perte de salaires qui, contrairement à ce que soutient l'IME, se rattache au même fait générateur que le préjudice lié à la minoration de sa pension de retraite, c'est dans la limit du montant total demandé devant les premiers juges, en l'absence, en l'espèce, de tout élément de nature à regarder le dommage comme s'étant aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement de première instance. Par suite, ses conclusions indemnitaires, en tant qu'elles portent sur deux chefs de préjudice distincts résultant des pertes salariales et de la minoration de pension de retraite, sont recevables dans la limite de 128 289,78 euros.
Sur la responsabilité de l'IME d'Ecouis :
4. Aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite (...) ". Aux termes de l'article 37 du décret du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers et à certaines modalités de mise à disposition : " (...) la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n'a pas excédé trois ans. Le fonctionnaire qui refuse l'emploi proposé est maintenu en disponibilité. / Le fonctionnaire qui ne peut être réintégré faute de poste vacant est maintenu en disponibilité jusqu'à sa réintégration et au plus tard jusqu'à ce que trois postes lui aient été proposés (...) ".
5. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.
6. M. D...fait valoir que l'IME d'Ecouis n'a pu justifier que l'emploi qu'il occupait antérieurement était régulièrement pourvu au moment de sa réintégration dès lors que la procédure de recrutement de son remplaçant était elle-même irrégulière, en l'absence de publication de la vacance du poste en application des dispositions de l'article 36 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions relatives à la fonction publique hospitalière. Il se borne ainsi, comme en première instance, à contester la légalité externe de la décision de nomination de son remplaçant. Si l'IME ne produit aucun élément permettant de justifier la publication de la vacance du poste précédemment occupé par M. D...et a, ainsi, entaché d'illégalité la décision de nomination du remplaçant de l'intéressé sur ce poste, il résulte cependant de l'instruction que la même décision aurait pu être légalement prise si la procédure avait été respectée. L'illégalité externe commise par l'IME est ainsi sans lien de causalité direct et certain avec le préjudice subi par M. D...et n'est par suite pas de nature à engager la responsabilité de l'institut à son égard.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a limité à 51 500 euros la somme que l'IME d'Ecouis a été condamné à lui verser en indemnisation de son préjudice. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. D...le versement à l'IME d'Ecouis d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'IME d'Ecouis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à l'institut médico-éducatif d'Ecouis.
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