Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2016, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2016 du préfet de l'Eure ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative ou, subsidiairement, de ces dernières dispositions.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour n'est pas suffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- cette mesure est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- cette mesure méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas suffisamment motivée ;
- cette décision est illégale par exception d'illégalité de l'obligation à quitter le territoire français ;
- le préfet n'a pas examiné les risques auxquels l'exposerait un retour dans son pays.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2016, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A... B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 8 mai 1985, est entré en France, selon ses déclarations, le 18 septembre 2011 ; qu'il a vainement sollicité le bénéfice de l'asile ; qu'il a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour bénéficier en France d'une prise en charge médicale ; qu'il relève appel du jugement du 28 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté du préfet de l'Eure du 25 janvier 2016, refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et définissant le pays de renvoi ;
Sur le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué comporte un énoncé suffisant des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de l'Eure s'est fondé pour refuser de délivrer à M. B... un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision manque en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que, pour refuser de délivrer au requérant le titre sollicité, le préfet de l'Eure s'est fondé sur un avis du médecin de l'agence régionale de santé du 16 décembre 2015, selon lequel, d'une part, le défaut de prise en charge médicale de l'intéressé ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, un traitement approprié existe dans son pays ; que M. B... ne contredit pas les conclusions de cet avis en se bornant à produire des attestations selon lesquelles il bénéficie d'un suivi médical régulier depuis septembre 2013 au centre médico-psychologique et de prescriptions médicamenteuses, à se prévaloir de la nature traumatique de ses troubles sans assortir cette allégation d'éléments permettant d'établir que ceux-ci trouveraient leur origine dans les persécutions et sévices qu'il affirme avoir subis en République démocratique du Congo, et à invoquer en termes généraux l'insuffisance de l'offre de soins dans ce pays ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le préfet de l'Eure aurait procédé à une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant, en troisième lieu, que le requérant fait valoir qu'il s'est constitué en France des liens amicaux et sociaux ; qu'il ne ressort, toutefois, pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches en République démocratique du Congo, où, selon ses propres déclarations devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, vivent des membres de sa famille, et où il a résidé jusqu'à l'âge de vingt-six ans ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour de M. B... sur le territoire français, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi ; qu'elle n'a, par suite, pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que, compte tenu des circonstances de fait rappelées aux deux points précédents, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'admission au séjour de M. B... ne se justifiait pas par des motifs exceptionnels et ne relevait pas de considérations humanitaires ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant qu'en application des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que cet arrêté comporte, ainsi qu'il a été dit au point 2, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. B... ; que cet arrêté mentionne également l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les indications qui y figurent permettent d'identifier sans ambiguïté que le préfet s'est fondé sur les dispositions du 3° de cet article pour obliger M. B... à quitter le territoire français ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette mesure doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait elle-même illégale ;
8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. B... n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 221-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
10. Considérant que les motivations en fait de la décision fixant le pays de destination et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne se confondent pas nécessairement ; qu'en revanche, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'arrêté attaqué précise la nationalité de M. B..., mentionne les décisions de rejet de sa demande d'asile et énonce que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée manque en fait ;
11. Considérant, en second lieu, que M. B... n'assortit d'aucun élément probant ses allégations selon lesquelles il se trouverait personnellement exposé dans son pays à des risques pour sa vie et sa sécurité ; qu'au demeurant, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande d'asile ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'annulation, et par voie de conséquence, celles à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me D....
Copie sera adressée au préfet de l'Eure.
Délibéré après l'audience publique du 13 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Dominique Bureau, première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 30 décembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : D. BUREAU Le président-assesseur,
Signé : M. C...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°16DA01388