Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 décembre 2015 et 7 mars 2016, la SAS Camping cars Pierre, représentée par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 29 septembre 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des pénalités pour manquement délibéré inhérent aux droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er septembre 2007 au 31 août 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- dans sa réponse aux observations du contribuable, l'administration fiscale a procédé à un changement de motivation dans l'application des pénalités pour manquement délibéré ;
- les pénalités litigieuses auraient dû être visées par un agent ayant le grade d'inspecteur principal.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'administration n'a pas procédé à un changement de motivation ;
- le contribuable n'avait pas à bénéficier d'un délai de trente jours supplémentaires pour présenter ses observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la SAS Camping cars Pierre, l'administration fiscale lui a notifié par une proposition de rectification en date du 27 août 2009 et confirmé, par une réponse aux observations du contribuable en date du 29 octobre 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er septembre 2007 au 31 août 2008 ; que ces rappels ont été mis en recouvrement le 8 février 2010 pour un montant total de 252 440 euros dont 69 735 euros de pénalités pour manquement délibéré ; que par courrier en date du 2 mars 2010, la SAS Camping cars Pierre a contesté cette majoration qui a fait l'objet d'une décision de rejet le 17 mai 2010 ; que, par un jugement en date du 8 mars 2012 et devenu définitif, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande tendant à la décharge des pénalités ; qu'après une seconde réclamation en date du 30 novembre 2012, rejetée par décision en date du 11 avril 2013, la SAS Camping cars Pierre a contesté à nouveau les pénalités afférentes aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société relève appel du jugement du 29 septembre 2015 du tribunal administratif de Rouen rejetant sa demande de décharge des pénalités ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que si la société soutient que les sanctions fiscales requièrent l'intervention de l'inspecteur principal pour valider leur application, tant la proposition de rectification du 27 août 2009 que la réponse aux observations du contribuable du 29 octobre 2009 comportent le visa de l'inspecteur principal des finances publiques ; que par suite, le moyen manque en fait ;
Sur les pénalités :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré " ; qu'en vertu de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'administration a l'obligation, au moins trente jours avant la mise en recouvrement des pénalités visées par le second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, d'adresser au contribuable un document comportant la motivation des pénalités qu'elle envisage de lui appliquer, et indiquant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour présenter ses observations ; que l'administration est tenue de renouveler cette formalité si, pour quelque motif que ce soit, elle modifie, avant leur mise en recouvrement, la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités qu'elle se propose d'appliquer au contribuable ;
5. Considérant qu'il résulte de l'examen de la proposition de rectification en date du 27 août 2009 que les pénalités appliquées sont motivées, d'une part, par l'existence d'un solde créditeur anormal en matière de taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'importance aurait dû alerter le dirigeant de la société et, d'autre part, par une défaillance du contrôle interne de la société pour révéler les anomalies constatées lors de la vérification de comptabilité ; qu'il résulte des termes mêmes de la réponse aux observations du contribuable du 29 octobre 2009, que l'administration se borne à répondre aux observations de la société en faisant valoir que si le comptable est à l'origine des irrégularités, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause la responsabilité du dirigeant de la société ; que l'administration maintient les mêmes motifs que dans sa proposition de rectification en reprenant l'absence de contrôle interne et le caractère anormal des soldes créditeurs de taxe sur la valeur ajoutée déductible ; qu'ainsi le service n'a pas modifié les motifs mêmes des pénalités mises à la charge de la société requérante ; qu'ainsi, la SAS Camping cars Pierre n'avait pas à bénéficier d'un délai de trente jours supplémentaires pour présenter ses observations ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Camping cars Pierre est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par action simplifiée Camping cars Pierre et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 13 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme D...B..., première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 30 décembre 2016.
Le premier conseiller le plus ancien,
Signé : D. B...Le président-assesseur,
Signé : M. E...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA01924