Résumé de la décision
Dans une requête enregistrée le 1er juillet 2019, le préfet de la Seine-Maritime conteste un jugement du tribunal administratif de Rouen rendu le 11 juin 2019, qui avait annulé son arrêté du 26 avril 2019 ordonnant le transfert de Mme D..., une ressortissante rwandaise demandant l'asile, aux autorités néerlandaises. La cour administrative a statué que le préfet avait exercé correctement son pouvoir discrétionnaire en matière de dérogation en vertu du règlement (UE) n° 604/2013, et a annulé le jugement du tribunal administratif, rejetant la demande de Mme D... sur le fondement des circonstances de sa situation personnelle.
Arguments pertinents
1. Discrétion du préfet : Le tribunal souligne que la décision du préfet de ne pas recourir à la clause dérogatoire de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 relève de son appréciation discrétionnaire. Cette disposition permet à chaque État membre de décider de l'examen de la demande d'asile, même si ce n'est pas une obligation légale. Ainsi, le refus du préfet d'accepter la demande de dérogation ne constitue pas une erreur manifeste.
- Citation : "La faculté laissée à chaque État membre... est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile."
2. Lien familial et critères d'évaluation : Bien que Mme D... invoque la présence de sa sœur titulaire de la protection internationale et d'une tante de nationalité française, le tribunal rappelle que, selon l'article 2, g) du règlement, les frères et sœurs ne sont pas considérés comme membres de la famille à cet effet. Cette limitation légale justifie l'absence de prise en compte de ces parents dans la décision du préfet.
- Citation : " les frères et sœurs ne sont pas au nombre des membres de la famille pris en compte pour l'application des dispositions régissant le transfert..."
3. Respect de la vie privée : En ce qui concerne la prétendue atteinte au respect de la vie privée et familiale de Mme D..., le tribunal estime que son intégration en France est récente et qu'elle a déjà vécu séparée de sa sœur, ce qui remet en cause les éléments de sa demande en tant qu’atteinte disproportionnée à ses droits.
- Citation : "la présence en France de l'intéressée est très récente... Par suite, la décision contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée."
Interprétations et citations légales
1. Règlement (UE) n° 604/2013 - Article 17 : Cet article offre une certaine souplesse aux États membres pour examiner les demandes d'asile même en dehors des critères définis par le règlement, assurant que des circonstances particulières peuvent influencer la décision. La cour a interprété que cela renforce le pouvoir discrétionnaire du préfet.
- Citation : "Chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée..."
2. Règlement (UE) n° 604/2013 - Article 9 : Ce texte précise que seuls certains membres de la famille peuvent influencer la responsabilité de l'État dans l'examen des demandes d'asile. Les frères et sœurs n'y figurent pas, une restriction que le tribunal a appliquée directement dans l'évaluation du cas de Mme D....
- Citation : "Si un membre de la famille du demandeur... a été admis à résider en tant que bénéficiaire..."
3. Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme - Article 8 : Ce texte protège le droit au respect de la vie privée et familiale. La cour a interprété que cette protection doit être mise en balance avec les autres intérêts publics, soulignant que l'isolement potentiel de Mme D... n'était pas jugé disproportionné au vu de sa situation personnelle.
- Citation : "la décision contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée."
En conclusion, la décision de la cour administrative a confirmé le pouvoir d'appréciation discrétionnaire du préfet en matière de demandes d'asile et a rejeté les arguments de Mme D... basés sur des liens familiaux qui ne sont pas pris en considération par la législation européenne.