Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2020, M. B..., représenté par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté du 16 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 20 avril 1977, serait entré en dernier lieu en France le 27 avril 2018, muni d'un titre de séjour italien de longue durée. Il a sollicité le 6 mai 2020 un titre de séjour en tant que salarié sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain. Par un arrêté du 16 septembre 2020, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 20 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile, qui porte sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. Par ailleurs, les dispositions de l'article L. 313-14 sont applicables aux ressortissants marocains en tant qu'elles prévoient l'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale du demandeur.
3. M. B... fait valoir qu'il vit en France depuis plus de dix ans et qu'il a conclu un contrat à durée indéterminée le 2 novembre 2018 comme cuisinier dans la restauration, métier qui figure parmi ceux en tension d'après une étude récente de Pôle Emploi et du Centre de recherche pour l'étude et l'observation de conditions de vie. Son contrat a été porté par avenant à une durée de trente-cinq heures à compter du 1er octobre 2019. Il avance avoir eu, en 2012, des parts sociales dans une société et être également associé minoritaire depuis 2015 dans une autre société. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la circonstance qu'il détenait des parts sociales dans deux sociétés, qu'il aurait résidé en France de manière habituelle depuis 2010 alors d'ailleurs qu'il se prévaut être titulaire d'un titre de séjour italien de longue durée. D'autre part, son contrat de travail ainsi que ses bulletins de paie mentionnent uniquement un emploi d'employé polyvalent dans une entreprise de restauration rapide et non de cuisinier. En outre, si M. B... est marié, son épouse de nationalité marocaine est en situation irrégulière. Le couple n'a pas d'enfant. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser M. B... et de lui délivrer un titre de de séjour salarié, ni en refusant de lui délivrer un titre de séjour au titre de la " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
6. En application des dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français qui assortit une décision de refus de titre de séjour, n'a pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte de celle de cette décision. La décision de refus de titre de séjour qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est, en l'espèce, suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
7. Pour les mêmes motifs exposés au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de M. B... doivent être écartés.
8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 7 que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire est entachée d'illégalité.
Sur la décision d'octroi d'un délai de départ volontaire :
9. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".
10. Il résulte des dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que, lorsque l'autorité administrative prévoit qu'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement dispose du délai de départ volontaire de trente jours, qui est le délai normalement applicable, elle n'a pas à motiver spécifiquement sa décision. Par ailleurs, le requérant ne saurait utilement invoquer un défaut de motivation pour soutenir que le préfet se serait estimé, à tort, lié par le délai d'un mois prévu par ce texte.
11. M. B... ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation du délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter volontairement le territoire. Dès lors, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en fixant le délai de départ volontaire à trente jours.
12. M. B... se prévaut de la fermeture des frontières entre l'Union européenne et le Maroc en raison du contexte sanitaire. Toutefois, cette circonstance, qui concerne les conditions d'exécution de la mesure d'éloignement, demeure sans incidence sur la légalité de la décision contestée.
Sur la décision fixant le pays de destination :
13. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire.
14. La décision contestée, qui vise les dispositions dont il est fait application, mentionne la nationalité du requérant, rappelle que M. B... dispose d'un droit au séjour en Italie et indique que M. B... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas d'éloignement. La décision, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée. Par suite, le moyen doit être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... D... pour M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.
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N°20DA01984
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