Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 décembre 2018 et le 4 janvier 2019, M. B..., représenté par la SELARL Christophe Guevenoux-Glorian, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2018 en tant qu'il ne fait pas droit à la totalité de ses demandes ;
2°) de condamner la commune de Formerie à lui verser la somme de 20 359 euros en réparation du préjudice patrimonial et la somme de 185 218,75 euros au titre du préjudice extrapatrimonial que lui a causé l'accident de travail dont il a été victime ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Formerie la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Formerie.
Considérant ce qui suit :
1.M. A... B... est depuis 1995 adjoint technique territorial de la commune de Formerie et a été promu à la première classe de ce grade. Il a été victime, sur son lieu de travail, le 17 mars 2008, d'un accident imputable au service. Il a été placé en arrêt maladie jusqu'à son admission d'office à la retraite, par limite d'âge le 23 janvier 2015. Il a demandé à la commune de Formerie une indemnisation pour les préjudices résultant de son accident de travail. Il a ensuite saisi le tribunal administratif d'Amiens, compte tenu du refus opposé par le maire de Formerie à sa demande préalable, de conclusions indemnitaires et relève appel du jugement du 12 octobre 2018 en ce qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses demandes.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
2. Les dispositions relatives à l'allocation temporaire d'invalidité et à la rente viagère d'invalidité déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire, victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle, peut prétendre, au titre des pertes de revenus et de l'incidence professionnelle, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques, de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. M. B... demande, sur ce fondement au titre uniquement de la responsabilité sans faute, une indemnisation des préjudices résultant de l'accident de travail du 17 mars 2008.
3. Il n'est pas contesté, en premier lieu, que M. B... a été rémunéré à taux plein du 17 mars 2008 au 23 janvier 2015, date de son admission d'office à la retraite par atteinte de la limite d'âge. Il perçoit également une allocation temporaire d'invalidité au taux de 35 % depuis cette date. Il n'a donc subi aucune perte de gains professionnels. La demande de M. B... à ce titre ne peut qu'être rejetée.
4. M. B... demande, en deuxième lieu, une aide au titre de l'assistance d'une tierce personne. Toutefois, il ne justifie aucunement ni en appel, ni en première instance, avoir eu recours à une telle aide. Sa demande de ce chef doit également être rejetée.
5. M. B... demande, en troisième lieu, au titre des préjudices extrapatrimoniaux, la réévaluation du déficit fonctionnel temporaire qu'il a subi. Il résulte de l'instruction que M. B... a été hospitalisé du 17 mars 2008 au 14 avril 2008, puis a été admis en centre de convalescence jusqu'au 11 juillet 2008. Le médecin expert désigné par le tribunal administratif d'Amiens évalue le déficit fonctionnel temporaire, à son retour à domicile, en classe II jusqu'à la date de consolidation, le 27 juin 2010. Il indique que, si M. B... déclare avoir bénéficié de l'aide de ses voisins, il était autonome pour l'habillement et la toilette, dès son retour à son domicile, et totalement autonome dès le début de l'année 2010. L'expert note également l'absence de soins actifs dès le 1er avril 2009. Compte tenu de tous ces éléments, le tribunal administratif d'Amiens n'a pas fait une appréciation erronée des faits de l'espèce en fixant l'indemnisation pour ce chef de préjudice à la somme de 2 400 euros.
6. En quatrième lieu, pour fixer l'indemnisation des souffrances endurées à la somme de 8 000 euros, le tribunal administratif a pris en compte les conclusions de l'expert qu'il avait nommé et qui évaluait les souffrances à 4 sur 7. S'il critique le montant retenu, l'appelant n'apporte aucun élément pour remettre en cause cette évaluation. Sa demande complémentaire à ce titre doit en conséquence être rejetée.
7. En cinquième lieu, l'expertise du 13 septembre 2017 ordonnée par le tribunal administratif d'Amiens, fixe la date de consolidation au 27 juin 2010 et le taux du déficit fonctionnel permanent partiel à 24 %. Si une précédente expertise diligentée par la caisse nationale de retraite des collectivités locales dans le cadre de la détermination de l'allocation temporaire d'invalidité, avait proposé un taux de 70%, l'expert désigné par le tribunal critique sérieusement cette évaluation, en se fondant sur l'ensemble des pièces du dossier médical, et notamment sur deux expertises, la première, en date du 1er avril 2009, notant une stabilisation de l'état de santé et proposant un taux de 20% , la seconde, en date du 28 juin 2010, fixant la date de consolidation à la date de l'expertise et retenant un taux de 24%. M. B... ne remet nullement en cause les conclusions de l'expert désigné par le tribunal. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges, en se fondant sur cette expertise, ont fixé l'indemnisation de ce chef de préjudice à la somme de 32 000 euros.
8. Si la commune de Formerie demande, par la voie de l'appel incident, que la totalité des demandes indemnitaires de M. B... soient rejetées ou, à tout le moins, que les indemnités allouées par le tribunal administratif d'Amiens soient revues à la baisse, elle ne conteste pas que sa responsabilité soit engagée. Or, la commune n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'évaluation retenue par les premiers juges. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'appel incident de la commune de Formerie doit être rejeté.
9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la commune et tirée de l'absence de moyens d'appel, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif d'Amiens a condamné la commune de Formerie à lui verser la somme de 42 400 euros.
En ce qui concerne les dépens :
10. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ".
11. La présente instance n'ayant entraîné aucun dépens, la demande de la commune de Formerie à ce titre, en cause d'appel, ne peut qu'être rejetée. Si elle entend, en outre, contester la mise à la charge des frais d'expertise par le premier juge, il ressort de de ce qui a été dit qu'elle demeure la partie perdante en première instance au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les circonstances particulières de l'affaire ne justifiant pas que ces frais soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. C'est donc à bon droit et au vu d'une juste appréciation, que les premiers juges ont mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros, à la charge de la commune de Formerie.
En ce qui concerne les frais liés au litige :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
13. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de M. B... et de la commune de Formerie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de l'instance d'appel doivent être rejetées. Si M. B... doit être considéré comme contestant aussi le montant alloué sur le fondement de ces dispositions en première instance, il n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les premiers juges, au vu des circonstances de l'espèce, aient commis une erreur d'appréciation en lui allouant, à ce titre, la somme de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : L'appel incident de la commune de Formerie est rejeté.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Formerie présentées au titre des dispositions des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Formerie.
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N°18DA02439