Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mai 2016, MmeD..., représentée par Me C...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2016 du tribunal administratif d'Amiens ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 25 janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour, dans l'attente du réexamen de sa situation.
Elle soutient que :
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation notamment vis-à-vis de la situation de l'un de ses fils ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
- elle souhaite mener une vie privée et familiale normale.
Par des mémoires, enregistrés les 3 juin et 2 septembre 2016, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens présentés par Mme D...ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signé le 26 janvier 1990 à New-York ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeD..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 5 août 1970, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation dirigée contre l'arrêté du 25 janvier 2016 du préfet de l'Aisne lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination duquel elle pourrait être reconduite d'office ;
2. Considérant la décision faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire français comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite et alors même que la convention internationale des droits de l'enfant n'est pas visée et que les motifs de la décision ne détaillent pas l'ensemble des circonstances de fait caractérisant la situation personnelle de l'intéressée, cette décision est suffisamment motivée au regard de l'exigence posée par le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Aisne, qui a pris en compte la circonstance que Mme D...était mère de quatre enfants, aurait omis de procéder à un examen complet de la situation particulière de l'intéressée ;
4. Considérant qu'aux termes des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux enfants de Mme D... entrés en France avec elle, alors âgés 8 et 4 ans, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité, débutée en France, en République démocratique du Congo ; qu'il n'en va pas autrement du dernier enfant de la requérante, née en France le 5 avril 2013 ; que si Mme D... se prévaut de la situation particulière de son fils ainé, né le 8 octobre 2002 et qui vit en France depuis 2007, année ou elle l'a confié à M.E..., indûment présenté au autorités françaises comme le père de l'enfant, il ressort des pièces du dossier que ce dernier vit depuis 2014 avec sa mère et sa fratrie dans un hébergement d'urgence ; que ni sa durée de séjour en France, ni le fait qu'il y soit scolarisé ne sont de nature à faire obstacle à ce qu'il rejoigne sa mère et ses frères et soeurs en République démocratique du Congo ; que, dans les circonstances de l'espèce, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme D...ne peut être regardée comme méconnaissant l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par le 1 de l'article 3 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
6. Considérant que Mme D...est célibataire et mère de quatre enfants ; qu'elle n'établit pas être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de quarante deux ans ; que rien ne fait sérieusement obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en République démocratique du Congo ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 décembre 2016.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : J.-J. GAUTHE Le président
de la formation de jugement,
Signé : O. NIZET
Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°16DA00954
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