Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2018, M. et Mme A..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier,
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Binand, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte sous seing privé conclu le 2 août 2012, M. B. et l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Normalarme, dont il était le gérant, ont cédé à Mme A... leurs parts détenues dans la société par actions simplifiée (SAS) Toltec Secure, représentant la totalité du capital de cette société, au prix d'un euro. A la suite de la vérification de comptabilité dont l'EURL Normalarme a fait l'objet, l'administration a estimé que le prix ainsi payé à cette société avait été délibérément minoré, sans contrepartie, par rapport à la valeur vénale des 388 parts cédées qu'elle a évaluée sur la base d'un montant unitaire de 145 euros, et que, par suite, l'écart entre la valeur retenue par l'administration et celle fixée lors du rachat des titres par la cessionnaire devait être regardé comme une libéralité accordée à Mme A... par l'EURL Normalarme. Elle a, en conséquence, notifié à M. et Mme A..., sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, une rectification des bases de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux dus par les intéressés au titre de l'année 2012. En dépit des observations des contribuables, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en résultant ont été maintenues et mises en recouvrement le 30 juin 2015, à hauteur d'un montant total de 37 085 euros en droits et pénalités. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 31 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition.
2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". En cas d'acquisition à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c. de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour le cédant, d'octroyer, et, pour le cessionnaire, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession.
3. D'une part, l'administration a relevé que le prix de cession par la société Normalarme des parts de la société Toltec Secure présentait un écart significatif avec la valeur vénale de ces titres, qu'elle a fixée à 145 euros, à partir de la valeur mathématique calculée sur la base de l'actif net corrigé de la société Toltec Secure, sans comporter de contrepartie pour la société Normalarme. Pour ce faire, l'administration a notamment relevé que si la société Toltec Secure avait été assignée par une société tierce, le 19 mars 2012, à comparaître devant le tribunal de grande instance de Paris, pour répondre à hauteur d'un montant de 400 000 euros de faits de contrefaçon de dessins et modèles et de concurrence déloyale, le risque de condamnation de cette société n'était qu'éventuel et n'avait fait l'objet d'aucune provision pour dépréciation dans la comptabilité de la société Normalarme. M. et Mme A... n'ont pas apporté devant les premiers juges, et ne le font pas davantage en cause d'appel, d'éléments de nature à établir que, comme ils le soutiennent, à la date de la cession des titres, le risque de condamnation auquel la société Toltec Secure était exposée et l'ampleur des conséquences de tout ordre qu'aurait emportée une telle condamnation pour cette société, qui n'était recherchée que solidairement avec trois autres débiteurs, présentaient une probabilité suffisant à écarter la valorisation de ces titres à laquelle l'administration a procédé ou à constituer une contrepartie à la minoration du prix de cession ainsi pratiqué. Par ailleurs, la circonstance, dont les appelants se prévalent, tirée de ce qu'aucune provision pour dépréciation ne pouvait être comptabilisée par la société Normalarme au titre de l'exercice clos en 2011, dès lors que le risque n'est apparu qu'en mars 2012 à la réception de l'assignation judiciaire, n'était pas de nature à faire obstacle à ce que l'inscription d'une telle provision fût effectuée entre la connaissance de ce risque par les cédants et la cession des titres intervenue au mois de juillet 2012. Par suite, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur réelle des titres cédés.
4. D'autre part, en faisant valoir l'intérêt personnel du gérant de la société Normalarme à faciliter la cession de la totalité des titres de la société Toltec Secure, y compris ceux qu'il détenait en son nom propre, la forte implication de M. A... dans la direction et la gestion de la société Toltec Secure, qui n'est pas sérieusement contestée, ainsi que la communauté d'intérêts entre ce dernier et son épouse, l'administration établit suffisamment l'intention pour la société Normalarme, d'octroyer, et pour Mme A..., de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession des parts de la société Toltec Secure réalisée pour un prix symbolique, et sans contrepartie. Dès lors, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges, qui, contrairement à ce qu'ils soutiennent, n'ont pas tiré de ces éléments une présomption de libéralité, ont estimé que l'administration rapportait la preuve, dont la charge lui incombe, d'une intention libérale chez le cédant et le cessionnaire.
5. Il résulte des deux points précédents que l'administration établit que l'avantage octroyé à M. et Mme A... par la société Normalarme présente le caractère d'un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices, au sens des dispositions précitées du c. de l'article 111 du code général des impôts, qui, appréhendée par Mme A..., a été, à bon droit, imposé entre les mains de celle-ci.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur ont été assignées au titre de l'année 2012. Il s'ensuit que leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et Mme C... A... et au ministre délégué chargé des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°18DA02655