Par un jugement n° 1702641 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 avril 2018 et deux mémoires enregistrés le 15 février 2019 qui n'ont pas été communiqués, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 décembre 2017 ;
2°) d'annuler ce refus d'enregistrement du 29 août 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or d'enregistrer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer un récépissé l'autorisant à séjourner en France, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'en vertu des dispositions des articles R. 311-1 et R. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet était tenu d'instruire sa demande de titre de séjour, dès lors que le dossier de demande était complet et que la demande, fondée sur des circonstances différentes de son précédent refus, ne présentait pas de caractère dilatoire.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 décembre 2018, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la décision ne faisant pas grief, la demande de première instance était irrecevable ;
- sa décision du 29 août 2017 n'est entachée d'aucune erreur de droit ;
- il aurait pris la même décision en se fondant sur le caractère dilatoire de la nouvelle demande de titre de séjour.
Le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à M. B... par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller ;
- et les observations de Me C... pour M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité géorgienne, est entré en France le 14 mars 2005. Il a bénéficié entre juillet 2006 et juin 2015 de titres de séjour. Par décision du 16 mars 2017, devenue définitive, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de renouveler son titre de séjour. Le 29 juin 2017, M. B... a déposé une nouvelle demande de titre de séjour. Par courrier du 29 août 2017, il a été informé du refus des services préfectoraux de l'enregistrer. M. B... relève appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour (...) est tenu de se présenter (...) à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient (...) ". Aux termes de l'article R. 311-2 du même code : " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. (...) ". Aux termes de l'article R. 311-4 du même code : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise (...) ". Enfin, selon l'article R. 311-13 de ce code : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français. ". Il résulte de ces dispositions qu'en dehors du cas d'une demande à caractère abusif ou dilatoire, et de demandes de titre de séjour présentées après qu'une mesure d'éloignement a été prise à l'encontre d'un étranger, l'autorité administrative chargée d'instruire une demande de titre de séjour ne peut refuser de l'enregistrer et d'en délivrer récépissé, que si le dossier présenté à l'appui de cette demande est incomplet.
3. Il ressort des pièces du dossier que la préfète de la Côte-d'Or a refusé d'enregistrer la demande de titre de séjour présentée par M. B... au motif qu'il lui appartenait d'exécuter le refus de titre de séjour pris à son encontre le 16 mars 2007. Si l'intéressé était tenu, en vertu des dispositions de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point précédent, de quitter le territoire français suite au refus opposé à une précédente demande de titre de séjour, cette circonstance n'est pas de nature, par elle-même, à justifier le refus d'enregistrer la demande en litige.
4. Toutefois l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision.
5. Le préfet de la Côte-d'Or soutient que la demande de titre de séjour de M. B..., enregistrée peu après le rejet par le tribunal administratif de Dijon de sa demande tendant à l'annulation d'un refus de séjour du 16 mars 2017, avait un caractère dilatoire. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la demande déposée le 29 juin 2017 visait à la délivrance d'un titre de séjour en raison de l'état de santé de M. B..., au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que le refus précédent avait été pris sur le fondement des dispositions du 7° du même article. Par ailleurs, M. B... avait bénéficié entre 2006 et 2014 de titres de séjour délivrés en raison de son état de santé et, s'il s'était désisté, le 8 juin 2016, de sa dernière demande de renouvellement de titre de séjour sur ce fondement, le médecin de l'agence régionale de santé avait préalablement donné un avis favorable à sa demande, de sorte que celle-ci ne pouvait être regardée comme dénuée de pertinence. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de M. B... avait pour but principal de faire obstacle à une mesure d'éloignement ni, par suite, qu'elle avait un caractère dilatoire. Ainsi, le nouveau motif opposé par le préfet de la Côte-d'Or en cours d'instance ne peut être substitué au motif initialement retenu pour fonder le refus d'enregistrer la demande du requérant.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation du refus d'enregistrer sa demande de titre de séjour, qui, contrairement à ce que soutient le préfet de la Côte-d'Or, constitue dans cette mesure une décision faisant grief.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte :
8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
9. Eu égard au motif d'annulation retenu et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du requérant y ferait obstacle, l'annulation du refus en litige implique nécessairement que la demande de titre de séjour présentée par M. B... soit enregistrée et qu'un récépissé l'autorisant à séjourner sur le territoire français lui soit délivré. Il y a lieu, à cet effet, d'impartir au préfet de la Côte-d'Or un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
10. En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 décembre 2017 et la décision du 29 août 2017 par laquelle la préfète de la Côte-d'Or a refusé d'enregistrer la demande de titre de séjour présentée par M. B... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Côte-d'Or d'enregistrer la demande de titre de séjour de M. B... et de lui délivrer un récépissé autorisant son séjour sur le territoire français, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 22 février 2019 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mars 2019.
2
N° 18LY01484
md