Par une requête enregistrée le 19 mai 2015, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 2 avril 2015 ;
2°) de lui accorder la décharge des pénalités pour manquement délibéré contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la charge du bien-fondé de l'application des pénalités pour manquement délibéré incombe à l'administration fiscale ; en l'espèce l'administration fiscale n'apporte pas cette preuve du caractère intentionnel des omissions qui lui sont reprochées ;
- il n'a jamais été établit qu'elle avait la libre disposition de la maison de Crozon, alors qu'elle vit et travaille à plus de 1 000 kilomètres de cette résidence ;
- elle a toujours soutenu sans avoir été utilement contredite qu'à sa connaissance, ce logement était affecté aux besoins de la société Alma pour les déplacements de son gérant dans l'ouest de la France ;
- la circonstance que les devis des travaux avaient été établis à son nom et au nom de son concubin, mais signé par celui-ci seul, ne démontre pas qu'elle avait pu prendre personnellement connaissance de ces devis et travaux ; la preuve n'est pas apportée de son usage du logement, et de son implication personnelle dans la gestion de la SCI ou de la SARL ; aucune des pièces produites par l'administration ne comporte sa signature ou une mention de sa main ; elle n'avait pas la maîtrise des comptes sociaux ; rien ne démontre, ni même n'indique qu'elle savait que les dépenses avaient été financées par la SARL Alma et non par M. B... lui-même ;
- elle ne saurait être tenue pour responsable des agissements de la SARL Alma, de son gérant M. B...ni de ceux de la SCI Malar que celui-ci dirige alors que rien ne prouve qu'elle avait connaissance des faits qui lui sont reprochés, et que le caractère intentionnel du manquement correspondant est encore moins bien démontré ;
- elle ne saurait être sanctionnée par l'application de pénalités pour manquement délibéré motivée uniquement par les agissements de tiers, à savoir la SARL Alma et la SCI Malar ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête ;
Le ministre expose qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller,
- les conclusions de M. Besse, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme A... est associée à parité avec son concubin, M. B..., dans la SCI Malar qui est propriétaire d'une maison sise à Crozon (Finistère) dans laquelle ont été effectués des travaux pris en charge par la SARL Alma dont M. B... assure la gérance ; que l'administration fiscale a regardé la prise en charge de ces travaux comme un avantage occulte constitutif d'une distribution de revenus imposables sur le fondement des dispositions de l'article 111 c) du code général des impôts entre les mains des deux associés de la SCI Malar ; que Mme A... a sollicité la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en résultant, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités y afférentes ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge ; que, par la présente requête, Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. " ;
3. Considérant que les pénalités fiscales, qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent et n'ont pas pour objet la seule réparation pécuniaire d'un préjudice, constituent, même si le législateur a laissé le soin de les établir et de les prononcer à l'autorité administrative, des " accusations en matière pénale " au sens du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le principe de personnalité des peines découle du principe de la présomption d'innocence posé par les stipulations du paragraphe 2 de ce même article ; que lorsqu'elle assortit des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu d'une majoration tendant à réprimer le comportement d'un contribuable, l'administration est tenue de respecter le principe de personnalité des peines, lequel s'oppose à ce qu'une sanction fiscale soit directement appliquée à une personne qui n'a pas pris part aux agissements que cette pénalité réprime ; qu'il résulte de l'article L. 195 A précité du livre des procédures fiscales qu'en cas de contestation des pénalités, la preuve du manquement délibéré incombe à l'administration ;
4. Considérant que Mme A... soutient que l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe de son intention délibérée d'éluder l'impôt et qu'en vertu du principe de personnalité des peines, elle ne saurait être tenue pour responsable et, par suite, sanctionnée par l'application de la pénalité prévue à l'article 1729 du code général des impôts pour des manquements résultant des agissements de tiers, à savoir de la SARL Alma, ou de la SCI Malar ou du gérant de ces deux sociétés ; qu'elle se prévaut de ce qu'elle n'est qu'associée de la SCI Malar, seule propriétaire du bien objet des travaux litigieux, et non gérante de cette SCI, et qu'elle n'est ni associée, ni salariée, ni gérante de la SARL Alma qui a accordé l'avantage occulte ; que, toutefois, en faisant valoir que Mme A..., en sa qualité d'associée de la SCI Malar et bénéficiaire des travaux réalisés au sein d'une propriété dont elle avait la libre disposition au cours de la période litigieuse, ne pouvait ignorer que ceux-ci avaient été réglés en totalité non par la SCI propriétaire dont elle détient 50 % des parts, mais par la SARL Alma dirigée par son concubin, et qu'elle avait ainsi bénéficié d'un avantage occulte imposable entre ses mains, l'administration fiscale apporte la preuve qui lui incombe de l'intention délibérée de Mme A... d'éluder l'impôt justifiant l'application des pénalités pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge des pénalités pour manquement délibéré ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Terrade, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 avril 2017.
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N° 15LY01753