Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 19 août 2015 et un mémoire en réplique enregistré le 4 novembre 2016, MmeB..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1408994 du tribunal administratif de Lyon du 3 mars 2015 ;
2°) d'annuler les décisions en date du 4 juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer dans un délai de huit jours une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la procédure est irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- la décision méconnaît l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 28 octobre 2016 présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 2 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91 647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Deliancourt,
- et les observations de MeC..., pour MmeB....
1. Considérant que Mme D...E..., épouseB..., ressortissante marocaine née le 28 décembre 1981, a présenté une demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture du Rhône le 7 février 2014 ; que, par arrêté en date du 4 juillet 2014, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que Mme B...a contesté ces décisions devant le tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande par le jugement attaqué lu le 3 mars 2015 dont elle relève appel ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, que les décisions attaquées comportent l'énonciation des considérations de fait et de droit qui en sont le soutien et sont suffisamment motivées au regard des dispositions de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
3. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des décisions attaquées qui indiquent la date et les conditions d'entrée de la requérante sur le territoire, mentionnent et relatent les conditions de sa vie privée et familiale de l'intéressée dans son pays d'origine, que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de Mme B...;
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., qui déclare être entrée en France le 9 novembre 2013 sous couvert d'un visa espagnol, soit huit mois seulement avant l'intervention de la décision attaquée, s'est mariée le 30 novembre 2011 au Maroc avec M. A... B..., ressortissant turc en situation régulière sur le territoire français où résident également ses trois enfants majeurs de nationalité française, et après que la demande de regroupement familial déposée par son époux eut été rejetée par décision du 22 avril 2013 en raison de l'insuffisance de ses ressources ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressée en France, et alors même que son enfant Yasemin y est né le 16 février 2014, MmeB..., qui n'établit pas être dépourvue de toute attache personnelle voire familiale au Maroc où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans, n'est pas fondée à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé méconnaît les dispositions de l'article L.313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne peuvent être interprétées comme faisant obligation aux Etats de respecter le choix par les ressortissants étrangers du lieu d'établissement de leur résidence familiale ; que, pour les mêmes raisons, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B...;
5. Considérant que Mme B...soutient que la décision contestée méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant Yasemin en raison de ce que son époux, de nationalité turque, est chef d'entreprise et père de trois enfants français qui résident en France, de sorte qu'il ne pourrait s'installer au Maroc où il ne bénéficie pas de droit au séjour ; que, toutefois, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent en aucun cas être interprétées comme faisant obligation à un Etat de respecter le choix fait par des ressortissants étrangers de lieu d'établissement de leur résidence ; que les trois enfants français de M. B...étant majeurs, la circonstance que les deux époux sont d'une nationalité différente ne fait pas obstacle à ce qu'ils poursuivent leur vie privée et familiale avec leur enfant mineur dans un pays autre que la France ; qu'ainsi, la décision litigieuse, qui n'a pas pour nécessaire effet de séparer cet enfant de l'un de ses parents, ne peut être réputée porter atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant au sens de l'article 3-1 de la convention de New York ;
6. Considérant qu'il résulte des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque le demandeur ne remplit pas les conditions de fond auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour, l'autorité administrative n'est pas tenue de consulter la commission du titre de séjour avant d'opposer un refus ; qu'il suit de là que Mme B...qui, ainsi qu'il vient d'être dit, ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour de plein droit, n'est pas fondée à soutenir que le préfet devait, à peine d'irrégularité de la procédure, soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fins d'injonction comme celles tendant à ce que soient mis à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Peuvrel, premier conseiller,
- M. Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique le 6 décembre 2016.
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N° 15LY02868