2°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de procéder à un réexamen de sa situation ;
3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 1500674 du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 23 septembre 2015, M. A...B..., représenté par Me Grenier, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 9 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761_1 du code de justice administrative et 37 de la loi relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- dans la mesure où il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a entaché son refus d'irrégularité en ne saisissant pas la commission du titre de séjour ;
- il justifie de circonstances humanitaires exceptionnelles, au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du même code ;
- le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et des dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en ce qu'elle est fondée sur un refus de titre de séjour illégal ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- le préfet a fixé à trente jours le délai de départ volontaire sans envisager un délai plus long au regard de sa situation particulière ;
- sa situation justifiait l'octroi d'un délai plus long.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2016, le préfet de l'Yonne, représenté par la SELARL Claisse et associés, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 26 août 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi signé à Rabat le 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
- et les observations de Me C...(D...et associés), avocat, pour le préfet de l'Yonne ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1963, serait, selon ses déclarations, entré en France en octobre 2010 ; que sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code a été rejetée par le préfet de l'Yonne par arrêté du 9 février 2015 ; que, par ce même arrêté, le préfet a obligé M. B... à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé un pays de renvoi ; que M. B...relève appel du jugement du 23 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le père de M.B..., né en 1942 et résidant en France depuis 1968, est atteint d'un handicap physique dû à un accident du travail dont il a été victime en 1982, aggravé par une hernie discale et un diabète de type II ; qu'il présente une invalidité évaluée à 80 % en raison d'une impotence fonctionnelle motrice des membres inférieurs rendant ses déplacements lents et difficiles ; qu'il bénéficie de la présence d'une infirmière et d'une aide ménagère à raison d'une heure par jour pour chacune ; que le bénéfice de l'allocation personnalisée d'autonomie lui a été refusé le 9 mars 2012 au motif qu'il relevait du groupe iso-ressource 5, correspondant à une autonomie quasi complète ; que, si M. B... produit plusieurs certificats médicaux indiquant que son père a besoin d'une présence permanente pour les actes de la vie quotidienne, il est constant qu'il a vécu sans l'aide de son fils jusqu'en 2010, sans qu'il ressorte des pièces du dossier que son état se serait aggravé depuis, et alors que son épouse, décédée le 14 mars 2014 au Maroc, elle-même en situation de dépendance, n'était pas en mesure de lui apporter une assistance ; que, dans ces conditions, et alors que l'épouse du requérant, ses deux enfants et sa fratrie résident au Maroc, où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-sept ans, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour aurait été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ainsi que, en l'absence d'autre élément, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Yonne aurait entaché ce refus d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M.B... ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;
5. Considérant que si le requérant soutient que sa situation caractérise un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions, il se prévaut des mêmes éléments que ceux dont il est fait état ci-dessus concernant sa situation personnelle et familiale, et en particulier de l'état de santé de son père ; que ces moyens doivent, par suite, être écartés pour les motifs déjà exposés au point 3 ci-dessus ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque le demandeur ne remplit pas les conditions de fond auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour, l'autorité administrative n'est pas tenue de consulter la commission du titre de séjour avant d'opposer un refus ; que M.B..., qui ne remplit pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est, ainsi, pas fondé à soutenir que le préfet de l'Yonne devait, à peine d'irrégularité de la procédure, soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant en premier lieu, que M.B..., n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;
8. Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de ce que cette obligation aurait été décidée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écarté pour les mêmes motifs que précédemment exposés au point 3 ;
En ce qui concerne le délai de départ volontaire :
9. Considérant que le délai de trente jours est le délai maximum de droit commun permettant à un ressortissant étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement d'organiser son départ ; que, si l'autorité administrative peut, par une décision qu'elle n'a pas à motiver spécifiquement, décider d'accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Yonne aurait commis une illégalité en fixant à trente jours le délai de départ volontaire ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 9 février 2015, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce la somme que M. B...demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 7 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 février 2017.
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N° 15LY03141
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