Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 août 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, ou, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, de l'assigner à résidence ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que :
- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques et l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 qui est opposable ;
- en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ supérieur à trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour et de l'illégalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,
- et les observations de Me B..., représentant M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant kosovar né le 14 mars 1974, est, selon ses déclarations, irrégulièrement entré en France en novembre 2014 afin d'y solliciter l'asile. Il a fait l'objet d'un arrêté de remise aux autorités hongroises le 31 mars 2015, avant que sa demande ne soit finalement examinée par la France. Après le rejet de sa demande d'asile par l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 9 décembre 2016, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 17 mars 2017, il a sollicité le 2 janvier 2018 un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 20 janvier 2020, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 20 juillet 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, le refus de titre de séjour, qui précise les considérations de fait et de droit le fondant, est suffisamment motivé.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet, qui était saisi d'une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code et a tiré les conséquences du rejet de la demande d'asile de M. A... au regard du droit au séjour de l'intéressé en France, a procédé à un examen particulier de sa situation.
4. En troisième lieu, M. A... ne saurait utilement se prévaloir des termes, dépourvus de caractère impératif, de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. A la date de la décision en litige, M. A... vivait en France depuis cinq ans et était marié depuis presque trois ans avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident et demeurant en France depuis 1999. M. A... fait valoir qu'ils n'ont pu avoir d'enfant, que son épouse travaille, qu'il dispose lui-même d'une promesse d'embauche et qu'il est bien intégré en France. M. A..., qui entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial prévu à l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne démontre pas qu'il ne pourrait bénéficier de cette procédure. Il n'établit pas davantage l'absence d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie. Ainsi, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance du 7 ° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
7. Le refus de titre de séjour en litige n'ayant pas pour objet de mettre en oeuvre le droit de l'Union au sens de l'article 51 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, M. A... ne saurait utilement se prévaloir à son encontre des stipulations de l'article 7 de cette charte. Ce refus n'ayant pas davantage eu pour objet ou pour effet de faire obstacle au droit du requérant de se marier et de fonder une famille, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques garantissant ce droit ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt, le préfet du Rhône n'a pas, en opposant à M. A... un refus de titre séjour portant la mention vie privée et familiale, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
10. M. A... n'ayant pas démontré l'illégalité de la décision portant refus de séjour, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés.
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
12. M. A... reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision refusant de lui accorder un délai de départ supérieur à trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Il y a lieu, par adoption des motifs du tribunal, d'écarter ces moyens.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour et de celle l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2021.
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N° 20LY02158