Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin 2015 et 3 mars 2016, M. A...B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2015 ;
2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa demande de mutation sur un poste vacant au service territorial éducatif de milieu ouvert de Montpellier et affectant Mme C...sur ce poste, ensemble la décision du 20 juin 2013 rejetant son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la circulaire mobilité des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse au titre de l'année 2013 du 5 mars 2013 a défini des lignes directrices dont il peut utilement se prévaloir, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ; au regard du barème de points fixé par la circulaire, sa candidature aurait dû primer sur celle de MmeC... ;
- sa situation était éligible à la priorité de mutation reconnue par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 aux conjoints séparés pour des raisons professionnelles dans la mesure où comme son épouse il avait demandé à bénéficier d'une mutation dans l'Hérault au titre de l'année 2012 mais elle seule a été affectée dans ce département à compter du 1er janvier 2013 à l'issue des opérations de mutations de décembre 2012 ; cette priorité a été méconnue ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il était tout aussi qualifié et compétent que Mme C...et que l'intérêt du service n'imposait pas qu'elle soit affectée sur le poste en cause.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- comme l'a jugé à juste titre le tribunal, le requérant ne peut utilement se prévaloir du barème de mutation utilisé par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ;
- les autres moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 4 mars 2016, l'instruction a été close au 1er avril 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que M.B..., éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, a demandé, par voie de mutation pour rapprochement de conjoint, son affectation à Montpellier sur deux postes vacants du service territorial de milieu ouvert (STEMO) et du service territorial éducatif d'insertion de Montpellier ; que ce second poste n'a pas été proposé à la mutation ; qu'après consultation de la commission administrative partiaire compétente les 28 et 29 mai 2013, le garde des sceaux, ministre de la justice, a diffusé, par note de service du 5 juin 2013, les mutations validées par la commission administrative paritaire ; que, par une décision du 20 juin 2013, notifiée par lettre du 26 juin 2013, la ministre a rejeté le recours gracieux formé par M. B...pour contester le rejet de sa demande de mutation sur le poste du STEMO et l'affectation de Mme C...sur ce poste ; que, par un jugement du 3 mars 2015 dont M. B...relève appel, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 visée ci-dessus : " L'autorité compétente procède aux mouvements de fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires (...) Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles ( ...) " ; que si ces dispositions, qui présentent un caractère statutaire, donnent priorité aux fonctionnaires séparés de leur conjoint ou de leur partenaire pour des raisons professionnelles, pour l'examen des demandes de mutation, la priorité qu'elles prévoient n'est pas absolue et doit être compatible avec le bon fonctionnement du service ;
3. Considérant qu'il ressort des écritures de première instance et d'appel du ministre que pour rejeter la demande de mutation de M. B...au STEMO de Montpellier, l'administration s'est fondée sur le motif tiré de ce que l'intéressé ne pouvait être regardé comme séparé de son épouse pour des raisons professionnelles indépendantes de la volonté de celle-ci ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. B...appartient également au corps des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse et exerçait ses fonctions à Nevers dans le même établissement de placement éducatif que son conjoint ; que si M. et Mme B...ont ensemble fait acte de candidature aux deux mouvements de mutations internes des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse organisés au titre de l'année 2012, seule Mme B...a obtenu sa mutation dans le cadre du mouvement de décembre 2012 dans le département de l'Hérault, à compter du 1er janvier 2013 ; que la situation familiale de M. B...présentait ainsi un caractère particulier qui l'autorisait à se prévaloir de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; qu'en écartant lors de la comparaison des situations respectives de M. B...et de Mme C...la prise en considération de l'ordre de priorité instauré par l'article 60 dont le requérant invoquait le bénéfice, le ministre de la justice a commis une erreur de droit ; que, toutefois, cette illégalité n'entraîne pas l'annulation de la nomination de MmeC..., mais seulement l'annulation du rejet de la demande de mutation de M.B... ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 5 juin 2013 rejetant sa demande de mutation sur le poste de STEMO de Montpellier, ensemble la décision du 20 juin 2013 rejetant son recours gracieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1301770 du tribunal administratif de Dijon du 3 mars 2015 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la demande de M. B...tendant à l'annulation de la décision du 5 juin 2013 rejetant sa demande de mutation, ensemble la décision du 20 juin 2013 rejetant son recours gracieux sur ce point.
Article 2 : La note de service du 5 juin 2013 du garde de sceaux, ministre de la justice, en tant qu'elle rejette la demande de mutation de M.B..., ensemble la décision du 20 juin 2013 de la même autorité rejetant le recours gracieux de M. B...sur ce point, sont annulées.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 23 février 2017, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président assesseur,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique le 16 mars 2017.
4
N° 15LY01923