Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2020, le préfet de Saône-et-Loire, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1903480 et 2000879 du 24 juin 2020 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) rejeter les requêtes de M. A... C....
Il soutient que :
- le mariage de M. C... avec une ressortissante française et la naissance de leur fille sont postérieurs à la décision du 2 avril 2020 ; en tout état de cause, M. C... l'a informé tardivement de la naissance de son enfant, de sorte qu'il n'a pas été mis en mesure d'instruire sa demande de titre de séjour avant le 27 juillet 2019 ;
- ses décisions sont justifiées par la menace pour l'ordre public que constitue la présence de M. C... sur le territoire français, notamment, en raison de son placement en garde à vue pour vol et de son maintien irrégulier sur le territoire français pendant plus d'une année.
Par un mémoire enregistré le 18 novembre 2020, M. C..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation du préfet de Saône-et-Loire au paiement de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gayrard, président assesseur.
- et les observations de Me Hmaïda, avocat de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant algérien né le 25 mai 1990, est entré régulièrement en France en février 2018. Par un arrêté du 2 avril 2019, pris à la suite de son placement en garde à vue pour vol, le préfet de Saône-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le 15 avril 2019, M. C... a épousé une ressortissante française et de cette union est né, le 3 juin 2019, un enfant de nationalité française. Par un courrier du 21 mai 2019, réceptionné le 27 mai 2019, M. C... a demandé au préfet de Saône et Loire d'abroger l'arrêté du 2 avril 2019 pris à son encontre. Par une décision implicite intervenue le 27 juillet 2019, le préfet de Saône-et-Loire a rejeté cette demande. M. C... a également présenté le 13 mai 2019 une demande de certificat de résidence et s'est acquitté le 14 octobre 2019 du droit de visa de régularisation. En l'absence de réponse dans le délai de quatre mois, le préfet a implicitement rejeté sa demande le 14 février 2020. Le préfet de Saône-et-Loire relève appel du jugement du 24 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 27 juillet 2019 refusant d'abroger l'arrêté du 2 avril 2019 ainsi que la décision du 14 février 2020 refusant à M. C... la délivrance d'un certificat de résidence, et lui a enjoint d'accorder à M. C... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Sur la légalité de la décision de refus d'abrogation :
2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
3. A l'appui de sa demande d'abrogation de l'arrêté du 2 avril 2019 par lequel le préfet de Saône et Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, M. C... avait justifié auprès de l'autorité préfectorale de son mariage avec une ressortissante française, de leur communauté de vie et de la naissance, le 3 juin 2019, d'un enfant de nationalité française. Comme l'ont justement relevé les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait pris en considération l'intérêt supérieur de l'enfant dans sa décision, alors même que la cellule familiale n'a pas vocation à être transférée en Algérie compte tenu de la nationalité française de son épouse. Il en résulte que le moyen tiré de l'absence de méconnaissance des stipulations précitées, n'est pas fondé et doit être écarté. Le préfet de Saône-et-Loire ne peut utilement faire valoir le bref délai d'instruction de la demande d'abrogation en litige. Par suite, le préfet n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision implicite de rejet qu'il a opposée à la demande d'abrogation de M. C... visant son arrêté du 2 avril 2019.
Sur la légalité du refus implicite de délivrer un certificat de résidence :
4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ". Si l'accord franco-algérien ne subordonne pas la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien à la condition que l'intéressé ne constitue pas une menace pour l'ordre public, il ne prive toutefois pas l'administration française du pouvoir qui lui appartient, en application de la réglementation générale relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France, de refuser l'admission au séjour en se fondant sur des motifs tendant à l'ordre public.
5. Il résulte de ce qui a été au 1er point, qu'à la date de la décision du 14 février 2020, M. C... était marié depuis le 15 avril 2019 à une ressortissante française et que de cette union est née le 3 juin 2019 une enfant de nationalité française. Il n'est pas contesté que M. C..., qui justifie vivre sous le même toit que son épouse et son enfant, exerce l'autorité parentale sur cet enfant et contribue depuis sa naissance à l'entretien et à l'éducation de cet enfant. La circonstance que M. C... ait été condamné par le juge pénal à une amende délictuelle de 500 euros avec sursis pour des faits de vol ou qu'il se soit maintenu irrégulièrement sur le territoire, en violation des dispositions L. 624-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne permet pas de considérer que la présence de ce dernier sur le territoire français constituerait une menace pour l'ordre public. Dès lors, le moyen tiré de ce que le refus de certificat de résidence serait fondé sur des motifs fondé sur la menace à l'ordre public doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Saône-et-Loire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 14 février 2020 refusant à M. C... la délivrance d'un certificat de résidence, et lui a enjoint d'accorder à M. C... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du préfet de Saône-et-Loire la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de Saône-et-Loire est rejetée.
Article 2 : Le préfet de Saône-et-Loire versera à M. C... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 4 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.
N° 20LY02109 2