Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mai 2021, M. C... A..., représenté par Me Coutaz, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100011 du 6 avril 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 29 décembre 2020 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans les 30 jours de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit en lui opposant qu'il est éligible au regroupement familial ;
l'arrêté méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et viole l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'il vit en France depuis 10 ans, qu'il s'est marié le 5 décembre 2016 avec une compatriote titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, avec laquelle il s'était déjà marié en Algérie le 9 février 2009, qu'ils ont eu trois enfants nés en France le 23 janvier 2011 et le 2 août 2018, qu'il doit s'occuper de toute sa famille en raison du handicap de son épouse et qu'il a créé son entreprise le 1er juillet 2020 ;
l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gayrard, président assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 29 décembre 2020, le préfet de l'Isère a refusé de délivrer un certificat de résidence à M. B... C... A..., né le 20 août 1985 en Algérie, et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Par jugement du 6 avril 2021, dont M. C... A... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des termes de l'arrêté querellé que le préfet de l'Isère a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et n'a pas insuffisamment motivé sa décision.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
4. D'une part, dès lors qu'il n'est pas contesté que M. C... A..., marié à une compatriote titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, entre dans une catégorie de ressortissants algériens ouvrant droit au regroupement familial, le requérant ne peut se prévaloir des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Il ne ressort pas des termes de l'arrêté litigieux que le préfet de l'Isère se serait cru en situation de compétence liée pour refuser pour ce seul motif la délivrance du titre de séjour sollicité.
5. D'autre part, si M. C... A... fait valoir qu'il est entré en France en 2010, il n'apporte aucun justificatif suffisamment probant pour établir le caractère habituel de son séjour sur le territoire national depuis cette date, alors qu'il indique lui-même avoir vécu en Espagne sous couvert d'un permis de résidence de dix ans et qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé s'est vu opposer le 6 mars 2015 un refus de délivrance de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français qu'il a exécutée pour une courte durée. S'il s'est marié le 5 décembre 2016 avec une compatriote, titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, avec laquelle il s'était déjà marié en Algérie le 9 février 2009 et dont il avait divorcé le 9 mars 2011, la durée de vie maritale en France est relativement récente par rapport à la date de la décision querellée. S'il soutient qu'il doit assister son épouse atteinte d'un handicap, il n'établit pas que sa présence lui serait indispensable. S'il fait valoir qu'il a eu avec son épouse, une fille née en France le 23 janvier 2011, puis des jumelles nées le 2 août 2018, il est constant que l'ensemble des membres de cette famille ont la même nationalité. Par suite, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se recompose en Algérie, ni à ce que l'aînée de ses filles puisse y poursuivre sa scolarité. L'intéressé n'est pas dénué d'attaches familiales en Algérie, pays où vivent ses parents et des frères et sœurs et dans lequel il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Dans ces conditions, M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'il poursuit. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. En dernier lieu, comme indiqué au point précédent, dès lors que tous les membres de sa famille ont la même nationalité, rien ne s'oppose à ce que ses enfants puissent poursuivre leur vie familiale, et pour l'aînée, sa scolarité, en Algérie, dès lors, le moyen tiré d'une violation de l'intérêt supérieur de ses enfants au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant peut être écarté.
7. Il s'ensuit que M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Il découle de tout ce qui précède que les conclusions de M. C... A... à fin d'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2020 du préfet de l'Isère doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées à titre d'injonction ou au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
* M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2022.
Le rapporteur,
J-P. GayrardLe président,
F. Pourny
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY01443 2