Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 octobre 2015, présentée pour M.C..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 9 juin 2015 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 15 septembre 2014 du préfet de la Loire ;
3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-67 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
S'agissant des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire :
- elles méconnaissent les dispositions du 11° de l'article L.13-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation dès lors qu'il souffre de différentes pathologies et notamment d'une maladie gastrique héréditaire qui est incurable et nécessite des soins à vie ; un arrêt de suivi médical de cette seule pathologie pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; il a bénéficié précédemment de titres de séjour " étranger malade " au regard de ses différentes pathologies ; il n'existe pas de traitement adapté en Arménie ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il réside en France depuis 6 ans avec sa femme et ses deux filles dont l'une est scolarisée en CFA et a un contrat d'apprentissage depuis le 29 septembre 2014 et l'autre est en recherche d'emploi et que son épouse et ses deux filles lui apportent un soutien ;
S'agissant de la décision portant fixation du pays de destination :
- par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire implique l'illégalité de cette décision ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il a subi des violences en Arménie du fait de ses activités politiques l'ayant obligé à fuir son pays et il court des risques en cas de retour en Arménie.
M. C...a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du 7 septembre 2015.
Par ordonnance du 8 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 avril 2016.
Par mémoire, enregistré le 14 mars 2016, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête et indique s'en remettre à ses écritures de première instance.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 1er juin 2016 :
- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;
- et les observations de Me Prudhon, avocat de M.C....
1. Considérant que M. B...C..., né le 19 octobre 1965 à Etchmiadzin, de nationalité arménienne, est, selon ses déclarations, entré irrégulièrement en France, accompagné de son épouse et de ses deux filles, le 23 juin 2008 ; qu'ayant sollicité l'asile, sa demande a été rejetée par décision en date du 24 février 2009 du directeur de 1'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la cour nationale du droit d'asile le 4 septembre 2009 ; qu'il a obtenu depuis 2009 un titre de séjour "étranger malade", lequel a été renouvelé à plusieurs reprises par le préfet de la Loire ; qu'il a sollicité une nouvelle fois le renouvellement de ce titre ; que le préfet de la Loire, par décisions du 15 septembre 2014, a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'inexécution de cette obligation ; que par jugement du 9 juin 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation desdites décisions préfectorales du 15 septembre 2014 ; que M. C...interjette appel de ce jugement du 9 juin 2015 ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale "est délivrée de plein droit : A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) " ;
3. Considérant que M. C...fait valoir qu'il souffre de pathologies multiples, dont une atteinte gastrique héréditaire, lesquelles ne peuvent être soignées en Arménie ; qu'il indique avoir obtenu plusieurs fois un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'au regard de son état de santé ce titre de séjour aurait dû lui être renouvelé ; que, toutefois, comme indiqué par le préfet de la Loire, l'avis du 23 juin 2014 du médecin de l'agence régionale de santé mentionne que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne peut toutefois entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel il peut voyager sans risque ; que par les nouvelles pièces produites en appel et notamment le certificat médical du Docteur Dejob du 10 juillet 2015 et le certificat médical du Docteur Del Tedesco du 9 septembre 2015, lesquels se bornent à évoquer des suivis réguliers de sa pathologie gastrique et ne mentionnent pas une réactivation de l'hépatite C pour laquelle il a été soigné et est considéré comme guéri, M. C...ne contredit effectivement ni l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité à défaut de traitement, ni les éléments fournis par le préfet en première instance sur la possibilité qu'il a d'être suivi médicalement, d'être hospitalisé et d'avoir accès à des molécules adaptées à ses différentes pathologies ; que par suite, dans les circonstances de l'espèce et au regard de l'état de santé du requérant, le préfet de la Loire n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de renouveler le titre de séjour de M.C... ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1°Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant, que M. C...se borne à reprendre en appel son argumentation relative à la méconnaissance des dispositions des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside en France depuis 2008 avec sa femme et ses deux filles, aujourd'hui majeures, dont l'une est en contrat d'apprentissage et l'autre est en recherche d'emploi, et disposent de titres de séjours temporaires et qu'il a besoin de leur aide dans le suivi de ses pathologies ; que ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal administratif, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter ;
6. Considérant, en troisième lieu, que l'état de santé de M. C...s'étant amélioré par rapport à la situation qui lui avait précédemment permis d'obtenir un titre de séjour, que comme exposé plus haut, il peut avoir accès à un traitement adapté en Arménie et qu'il ne ressort pas des pièces au dossier que M. C...se soit particulièrement intégré en France ; que par suite, le préfet de la Loire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ;
8. Considérant que, M. C...s'étant vu refuser, le 31 mars 2015, le renouvellement d'un certificat de résidence, il se trouvait à cette date dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l' article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
9. Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu des éléments précédemment exposés notamment sur l'état de santé du requérant, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que M. C...ne peut exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
12. Considérant que M. C...soutient avoir fui l'Arménie compte tenu de son engagement politique et des violences et persécutions que lui et sa famille ont subies, et qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que toutefois, M. C...ne verse pas en appel de nouvelles pièces pour justifier la réalité de ses allégations et se borne à produire, comme en première instance, des attestations établies par sa mère et une amie, lesquelles pièces, telles que rédigées, ne peuvent permettre de considérer comme établies la réalité et l'actualité des risques allégués en cas de retour en Arménie, alors que 1'office français de protection des réfugiés et apatrides a considéré que ses déclarations initiales étaient confuses, schématiques et évasives, et n'étaient étayées d'aucun élément crédible et déterminant permettant de tenir pour établis les faits allégués et pour estimer fondées les craintes évoquées par le requérant ; que, dans de telles circonstances, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en désignant l'Arménie comme pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, le préfet de la Loire a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1 'homme et des libertés fondamentales ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. A...et Mme Cottier, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 23 juin 2016.
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N° 15LY03231