Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 6 juillet 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 23 février 2018 ;
3°) de faire injonction au préfet du Gard, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les pathologies dont il est atteint requièrent des traitements qui ne sont pas disponibles en Géorgie et en tous cas pas en dehors de la capitale de ce pays ;
- il justifie de motifs exceptionnels et de considérations humanitaires justifiant une mesure de régularisation ;
- la mesure d'éloignement est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- cette mesure a été prise en violation de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- cette décision a été prise en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 07 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant géorgien né en 1973 et entré en France, selon ses déclarations, le 5 décembre 2015, a sollicité un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 23 février 2018, le préfet du Gard lui en a refusé la délivrance et lui a assigné l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, en désignant le pays à destination duquel, passé ce délai, il pourrait être renvoyé d'office. M. B...relève appel du jugement, en date du 7 juin 2018, par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...) par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ".
3. Aux termes, en premier lieu, de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".
4. Pour refuser à M. B...la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, le préfet du Gard a estimé, s'appropriant en cela les conclusions de l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que si les pathologies dont l'intéressé est atteint requièrent une prise en charge médicale à défaut de laquelle il serait exposé à des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier effectivement en Géorgie des traitements appropriés. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., désormais guéri de l'hépatite C et de la tuberculose pulmonaire et oculaire dont il était atteint, néanmoins à l'origine de séquelles invalidantes, souffre toujours d'ostéonécrose tibiale bilatérale, de genu varum bilatéral, d'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et d'addiction aux substances opiacées. Le requérant ne conteste pas, d'une part, que sa tuberculose ne nécessite plus désormais qu'une surveillance annuelle et, d'autre part, que ses pathologies des membres inférieures peuvent être soignées en Géorgie. S'il fait valoir que la spécialité Prezista, nécessaire au traitement du VIH, et le suboxone, médicament de substitution aux opiacés, ne sont pas distribués en Géorgie, il ne démontre pas que les substances actives de ces produits ou d'autres substances ayant un effet thérapeutique équivalent y feraient tout autant défaut, alors que les pièces versées aux débats font apparaitre que, dès 2011, près des trois quarts des personnes infectées par le VIH bénéficiaient en Géorgie d'une thérapie antirétrovirale et que les ressources sanitaires de ce pays permettent la mise en place de traitements de substitution aux opiacés. En outre, les documents produits en première instance par le préfet établissent que la prise en charge et le traitement des malades du VIH est universelle et gratuite en Georgie et que les personnes souffrant d'addiction aux drogues peuvent recevoir, gratuitement lorsqu'elles sont en outre atteinte du VIH, un traitement de substitution. Enfin, M. B...ne peut utilement faire valoir que les traitements qui lui sont nécessaires ne seraient disponibles ou effectivement accessibles qu'à Tbilissi, capitale de la Géorgie. Le moyen tiré de l'inexacte application de l'article L. 313-11 11° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne saurait ainsi être accueilli.
5. En second lieu, M. B...ne peut utilement se prévaloir des termes de la circulaire ministérielle du 17 juin 2011 qui, se bornant à inviter les préfets à prendre en considération, dans l'examen d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade " tout élément de fait touchant soit la situation dans le pays d'origine, soit la situation en France, de nature à justifier une admission au séjour humanitaire à titre exceptionnel ", est dépourvue de portée réglementaire et ne définit aucune ligne directrice invocable devant le juge. Au surplus, et en admettant même que le requérant ait entendu invoquer en réalité les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni la circonstance, à la supposer établie, qu'il serait esseulé en Géorgie ni son état de santé, qui peut être pris en charge dans ce pays ainsi qu'il a été dit, sans que le risque d'une rupture temporaire des soins ne soit étayée par les pièces du dossier, ne peuvent suffire à caractériser des considérations humanitaires ou un motif exceptionnel de régularisation au sens de ces dispositions.
6. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut, compte tenu de ce qui précède, qu'être écarté.
7. En quatrième lieu, le moyen, invoqué contre cette mesure d'éloignement, tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au soutien duquel M. B...reprend l'argumentation développée à l'encontre du refus de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-1 1° du même code, doit être écarté pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 4.
8. En cinquième lieu, le refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français n'encourant pas la censure en vertu de ce qui précède, le moyen par lequel il est excipé de leur illégalité, dirigé contre la décision fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écarté.
9. Enfin, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, invoqué dans les mêmes termes qu'en première instance, doit être écarté par adoption des motifs à bon droit retenus par le tribunal.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B...est manifestement dépourvue de fondement et doit être rejetée selon la modalité prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, y compris ses conclusions en injonction et celles formulées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C...B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Fait à Marseille, le 12 novembre 2018.
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N° 18MA03174