Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 18MA01578 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 9 avril 2018, M. B... C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) de suspendre, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 2 décembre 2015 ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler jusqu'à ce qu'il soit statué par la Cour de céans sur le recours au fond, et ce dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la condition d'urgence doit être réputée satisfaite ; l'exécution de l'arrêté porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à sa situation ; la décision le place, ainsi que sa famille, dans une situation de précarité ; il est susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai à l'occasion d'un contrôle d'identité ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; l'arrêté est insuffisamment motivé ; le préfet ne s'est pas livré à un examen particulier de la demande ; il a conclu un pacte civil de solidarité avec Mme D... mais ils ne sont pas mariés ; la décision est entachée d'erreur de fait car il est muni d'un visa ; sa compagne ne peut bénéficier à son égard d'un regroupement familial dès lors qu'ils ne sont pas mariés ; la décision est entachée d'erreur de droit et est contraire à l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en tant que ses deux enfants, Zerya et Sarya C...vont rester en France sans leur père ; la décision est contraire à l'intérêt supérieur de ses deux filles ; la décision est contraire aux articles L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il justifie de l'ancienneté et du caractère habituel de sa résidence en France depuis le 10 novembre 2009 ; il a fixé en France ses attaches personnelles et familiales ; il justifie de quatre ans de communauté de vie avec Mme D..., ils sont domiciliés à la même adresse et ont conclu un pacte civil de solidarité en 2013 ; sa compagne est gérante de la SARL Façades Sud 13 et les deux partenaires ont chacun 50 % des parts ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa vie personnelle et sur l'intérêt supérieur de ses filles au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2018.
Vu :
- la requête n° 18MA01336 enregistrée au greffe de la Cour le 23 mars 2018 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Poujade, président de la 1ère chambre, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... C..., ressortissant turc né à Bulanik (Turquie) le 28 juillet 1988, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a invité à quitter le territoire français et d'enjoindre à cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour. Par un jugement n° 1605976 du 6 décembre 2017, dont il a relevé appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par la présente requête, il demande au juge des référés de la Cour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté préfectoral du 2 décembre 2015.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En outre, aux termes de l'article L. 522-3 du même code : " Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ".
3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé. Cette situation d'urgence sera, en principe, constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour comme dans le cas du retrait de celui-ci. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier, à très bref délai, d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse.
4. En l'espèce, à l'appui de sa demande formée au titre de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, M. C... soutient que la condition d'urgence est remplie dès lors que le refus de titre de séjour le place, ainsi que sa famille, dans une situation de précarité. Toutefois, si M. C... est en couple avec Mme A...D..., également ressortissante turque, que le couple a conclu un pacte civil de solidarité (PACS) le 22 janvier 2013 et a eu deux enfants, Zerya C...née le 6 février 2013 et Sarya C...née le 23 août 2015, M. C... ne justifie pas que l'unité de la cellule familiale ne pourrait pas être maintenue en dehors du territoire français alors que ses deux enfants ont vocation à la suivre en cas de départ. En outre, s'il fait état de ce que sa compagne a obtenu quatre titres de séjour temporaires successifs, il ne produit, toutefois, en ce qui la concerne, qu'un titre de séjour " vie privée et familiale " d'un an valable jusqu'au 27 septembre 2016. Enfin, en dehors de la production des statuts d'une SARL " Façades Sud 13 ", postérieurs à la décision attaquée, et de quelques bulletins de salaire, également postérieurs à la décision attaquée, M. C... ne justifie d'aucune insertion professionnelle particulière. Il ne justifie pas non plus, en l'absence d'autres éléments, de la réalité de son insertion dans la société française par la seule production de factures EDF, de contrats d'assurances habitation, de contrats de souscription bancaire, de divers courriers relatifs à l'assurance maladie, de détails de versement de l'assurance maladie, d'ordonnances médicales, de courriers de pôle emploi, d'avis d'imposition, d'avis d'échéance de loyers ou d'attestations de paiement de la caisse des allocations familiales. Il ne fait pas état, dès lors, de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier, à très bref délai, d'une mesure provisoire de suspension de la décision de refus de titre de séjour.
5. Par ailleurs, le préfet des Bouches-du-Rhône a, dans son arrêté du 2 décembre 2015, invité M. C... à quitter le territoire dans un délai de trente jours, en précisant qu'en cas de maintien sur le territoire français au-delà de ce délai, l'intéressé s'exposerait à l'édiction d'une mesure d'éloignement. Cette " invitation à quitter le territoire français ", qui ne peut être regardée comme une décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français au sens de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne saurait caractériser, de par ses effets, l'existence d'une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
6. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition tenant à l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision, la demande de M. C... tendant à ce que soit ordonnée, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté litigieux doit être rejetée, de même que ses conclusions en injonction et celles tendant à ce que le versement d'une somme de 2 000 euros soit mis à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... C..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.
Fait à Marseille, le 25 avril 2018.
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N° 18MA01578