Procédure devant la cour :
I. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 20MA04491 les 4 décembre 2020, 30 avril 2021, 3 novembre 2021 et 1er décembre 2021, la SARL Sud Finance Patrimoine, représentée par Me Peltier-Feat, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) à titre principal, de prononcer la décharge des impositions mises en recouvrement ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise judiciaire aux fins de vérifier que les valeurs vénales déclarées ont été correctement établies entre les parties ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société cédante n'ayant aucun intérêt à minorer le prix de la cession, l'acquéreur étant le récupérateur total de la TVA, l'administration fiscale ne peut se prévaloir de la clause anti-fraude ;
- il incombe à l'administration d'apporter la preuve de l'insuffisance du prix de vente par rapport à la valeur vénale réelle du bien concerné par comparaison avec des cessions en nombre suffisant de biens intrinsèquement similaires sur le marché ;
- en l'espèce, concernant la cession du lot n°1 du domaine de l'Eilen à la SCI du Vallon, l'administration ne rapporte pas cette preuve en utilisant 3 termes de comparaison, et non 5 comme mentionné dans le jugement, qui ne tiennent pas compte des sujétions du bien ; en l'espèce, il n'existe pas de marché pour ce type de bien particulier vendu et le prix à retenir doit être celui du prix mentionné dans l'acte de vente ; l'expert a indiqué que la valeur du logement de fonction avec la réception est de 125 600 euros hors taxes alors qu'il a été vendu 165 000 euros toutes taxes comprises ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, pour déterminer la date de cession à la SCI Natal de la parcelle cadastrée E 1730 située sur la commune de Sainte-Maxime, il convenait de retenir la date de signature de l'acte de vente, soit le 11 septembre 2013 date à laquelle le prix de la vente a été payé conformément aux énonciations de l'acte et non celle de constatation de la réalisation de la condition qualifiée à tort de suspensive au lieu de résolutoire, soit le 28 octobre 2013 ; et, l'administration ne peut utilement invoquer l'arrêt du Conseil d'Etat du 4 juillet 1979 pour faire échec à la rétroactivité d'une condition suspensive dès lors que les faits de l'espèce concernent une plus-value des particuliers imposée au titre de l'ancien article 150 ter du code général des impôts ; par ailleurs, le bien en cause est situé en zone IINA(fg)C et non en zone IINAm(h)C ce qui implique un COS de 0,5 pour les activités économiques et commerciales et aucun pour les habitations ; l'administration ne démontre pas l'existence d'un acte anormal de gestion ;
- s'agissant de la taxe nationale sur les terrains devenus constructibles, pour la cession de la parcelle cadastrée E 1730 à la société Natal intervenue le 28 octobre 2013, il convient de dégrever un montant de 131 894 euros en droits dès lors que l'article 1605 nonies du code général des impôts permet de calculer la taxe nationale sur la base du prix réel stipulé dans l'acte ou de celui dissimulé et non de celui rehaussé ;
- s'agissant de la taxe nationale sur les terrains devenus constructibles, pour la cession de la parcelle cadastrée E 1773 à la société Kauffman et Broad, la première cession n'est pas intervenue le 16 janvier 2015 mais le 31 mai 2013, date à laquelle l'assemblée générale extraordinaire des associés de la SARL Sud Finance Patrimoine a approuvé l'opération de fusion et constaté la réalisation de la fusion et de la liquidation de la SARL Sud Finances.
Par des mémoires en défense enregistrés les 12 mai 2021, 9 novembre 2021 et le 10 décembre 2021, le ministre des finances et de la relance conclut à ce qu'il soit prononcé un non-lieu à hauteur de la somme de 149 832 euros et au rejet du surplus de la requête.
Il soutient que :
- un dégrèvement de la taxe sur la cession des terrains nus rendus constructibles de 131 894 euros majorée de l'intérêt de retard de 17 938 euros est prononcé ;
sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée
- s'agissant de la cession au profit de la SCI Le Vallon, l'administration ayant relevé que le prix de vente a été minoré et que le vendeur et les acheteurs étaient étroitement liés, pouvait en application des articles 27 de la 6ème directive et 266-2.b du code général des impôts, substituer la valeur vénale réelle des immeubles au prix déclaré pour l'assiette de la TVA ;
- s'agissant de la cession au profit de la SCI Natal, les parties étant en relation d'intérêt, l'administration établit la fraude au regard du prix convenu entre les parties, qui a été substantiellement minoré ;
- s'agissant des rehaussements résultant de la vente du lot n°1 du lotissement l'Elein à Cavalaire à la SCI du Vallon, le prix de la vente, 165 000 euros, a été minoré de manière substantielle et la valeur vénale à retenir est celle de 290 000 euros au vu des éléments de comparaison utilisés et de l'abattement appliqué afin de tenir compte de la mise à disposition du bien de la résidence para-hôtelière en tant que local d'accueil ; l'abattement de 40% pour bail commercial que sollicite la requérante n'est aucunement justifié ; les affirmations préalables précisées dans le rapport d'expertise du 22 avril 2021 ne sont pas motivées et les critiques dirigées contre les termes de comparaison utilisés par l'administration pas pertinentes ; de plus, la méthode utilisée par l'expert, qui distingue le bâti et le terrain ne saurait être retenue et le prix moyen du m² déterminé à partir des termes de comparaison n'est pas pertinent dès lors que 4 des 10 terrains situés sur un autre domaine ont fait l'objet de mutations postérieures à celle du lot n°1, que la valeur du bâti ne peut être fixée par référence à un prix au m² moyen en France en 2009 de même que les taux de rentabilité moyens déterminés à partir de données générales et que l'abattement de 40% pour occupation commerciale n'est pas justifié ; la circonstance selon laquelle la vente a été réalisée en l'état de futur achèvement, n'est pas de nature à remettre en cause la nature du bien cédé ni les termes de comparaison similaires retenus par l'administration parfaitement pertinents ;
- s'agissant des rehaussements résultant de la vente de la parcelle cadastrée E 1730 sur la commune de Sainte-Maxime à la SCI Natal, d'une part, la vente est devenue parfaite lors de la réalisation de la condition suspensive le 10 octobre 2013 et la date à retenir constituant le fait générateur de l'imposition est celle à laquelle la cession est intervenue, soit le 28 octobre 2013 ainsi que l'a jugé le tribunal ; d'autre part, la valeur vénale du bien, arrêtée à 500 000 euros est notoirement insuffisante au vu des 6 termes de comparaison utilisés par l'administration et la réfaction de 50% opérée afin de tenir compte de l'absence d'aménagement ; à la date de la constatation de la levée de la condition suspensive le 28 octobre 2013, la parcelle vendue était devenue constructible depuis la délibération du conseil municipal du 12 septembre 2013 portant modification du plan d'occupation des sols devenue exécutoire dès sa publication et transmission au représentant de l'Etat, le 9 octobre 2013 ; en outre, les éléments retenus par l'expert, affirmés sans jamais être justifiés, ne sont pas de nature à remettre en cause les termes de comparaison retenus par l'administration ;
sur les rehaussements à l'impôt sur les sociétés
- en vendant la parcelle E 1730 à un prix minoré, la SARL Sud Finance Patrimoine, qui ne démontre pas son intérêt de céder ce bien à un tel prix ou l'existence d'une contrepartie à cette cession, s'est volontairement appauvrie à des fins étrangères à son intérêt au profit de la SCI Natal et le rehaussement de la différence, 2 021 499 euros, est ainsi justifié, l'acte anormal de gestion étant caractérisé ;
sur la taxe sur les terrains devenus constructibles
- s'agissant de la parcelle E 1773, parcelle détachée de la parcelle acquise en 2007, l'acte du 16 janvier 2015 constituant la première cession intervenue après l'acquisition de son caractère constructible par l'intervention de la modification du plan d'occupation des sols de la commune de Sainte Maxime le 12 septembre 2013, la taxe de 182 348 euros prévue à l'article 1605 nonies du code général des impôts s'applique ;
sur la demande d'expertise :
- aucun élément du dossier, pas même le rapport d'expertise produit par l'appelante, ne justifie que soit ordonnée une mesure d'expertise.
Par ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 décembre 2021.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA00999, le 15 mars 2021, la SARL Sud Finance Patrimoine, représentée par Me Peltier-Feat, demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1801638 du 5 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon dont elle demande l'annulation au fond par sa requête n° 20MA04491 visée ci-dessus.
Elle soutient :
- les mêmes moyens que dans sa requête au fond n° 20MA04491 et, en outre, s'agissant de l'immeuble sis à Sainte-Maxime vendu à la SCI Natal, que l'administration ne rapporte pas la preuve de l'affichage en mairie de la décision du conseil municipal avant la date du 28 octobre 2013 et qu'ainsi, les parcelles vendues n'étaient pas constructibles d'autant que le préfet a contesté cette décision en formant un recours gracieux le 6 décembre 2013 ;
- que l'exécution de ce jugement aura des conséquences difficilement réparables.
Par des mémoires en défense enregistrés les 26 mai 2021 et 9 novembre 2021, le ministre des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Sud Finance Patrimoine a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Par une proposition de rectification en date du 5 août 2016, elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013 et 2014, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 et à des cotisations de taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles, instaurée par l'article 1605 nonies du code général des impôts, à raison de la cession de deux terrains nus au titre de l'année 2013. La SARL Sud Finance Patrimoine relève appel du jugement du 5 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon, après avoir prononcé, en son article 1, un non-lieu à statuer sur les conclusions de sa requête tendant à la décharge des majorations afférentes aux cotisations de la taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles à hauteur de 31 424 euros au titre de l'année 2013, a, en son article 2, rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La SARL Sud Finance Patrimoine doit être regardée, par les moyens qu'elle invoque, comme demandant, par ses requêtes enregistrées sous les numéros 20MA04491 et 21MA00999, l'annulation et le sursis à exécution du seul article 2 du jugement dont elle relève appel.
Sur la jonction :
2. Les deux requêtes visées ci-dessus par lesquelles la SARL Sud Finance Patrimoine demande à la cour, d'une part, d'annuler l'article 2 du jugement du 5 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, des cotisations de taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles, instaurée par l'article 1605 nonies du code général des impôts, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2013, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de cette même année, ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, le sursis à exécution de ce même article de ce jugement, sont dirigées contre une même décision et présentent à juger les mêmes questions. Il y a donc lieu de joindre ces deux requêtes pour y statuer par une même décision.
Sur la requête n° 20MA04491 :
Sur l'étendue du litige :
3. Par une décision du 26 avril 2021, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur départemental des finances publiques du Var a prononcé un dégrèvement de la taxe sur la cession des terrains nus rendus constructibles au titre de l'année 2013 pour un montant total de 149 832 euros, dont 131 894 euros en droits et 7 938 euros en pénalités. Par suite, les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur lesdites conclusions à concurrence du dégrèvement ainsi prononcé.
Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :
S'agissant de la vente à la SCI Natal de la parcelle section E 1730 située à Sainte-Maxime :
4. D'une part, en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal. S'agissant en revanche de la cession d'un élément d'actif immobilisé, lorsque l'administration soutient que la cession a été réalisée à un prix significativement inférieur à la valeur vénale qu'elle a retenue et que le contribuable n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette évaluation, elle doit être regardée comme apportant la preuve du caractère anormal de l'acte de cession si le contribuable ne justifie pas que l'appauvrissement qui en est résulté a été décidé dans l'intérêt de l'entreprise, soit que celle-ci se soit trouvée dans la nécessité de procéder à la cession à un tel prix, soit qu'elle en ait tiré une contrepartie.
5. D'autre part, la valeur vénale d'un bien cédé doit être estimée en se référant au prix résultant de la confrontation de l'offre et de la demande à la date à laquelle la cession est intervenue. Lorsque l'administration procède à l'évaluation de la valeur vénale réelle d'un immeuble, elle peut se référer à des transactions concernant des immeubles situés dans le même secteur géographique et retenir comme termes de comparaison des ventes portant sur des biens similaires, intervenues à une date antérieure ou proche de celle du fait générateur de l'impôt intervenant à la date de cession.
6. Enfin, en vertu de l'article 38 du code général des impôts, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient soit la livraison des biens, c'est-à-dire leur délivrance au sens du code civil, pour les ventes ou opérations assimilées, soit l'achèvement des prestations, pour les fournitures de services. A la différence de ce qui vaut pour des ventes dont la conclusion est assortie d'une clause résolutoire, la livraison ou délivrance d'un bien vendu sous une condition suspensive ne peut intervenir avant que cette dernière condition ait été réalisée.
7. Il résulte de l'instruction que, par actes notariés des 11 septembre et 28 octobre 2013, la SARL Sud Finance Patrimoine a vendu à la SCI Natal un terrain de 8 951 m² situé sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime portant la référence cadastrale E 1730, à prendre de la parcelle cadastrée section E 1572, pour un montant de 500 000 euros, soit 55,86 euros par m².
8. En premier lieu, la cession de la parcelle portant la référence cadastrale E 1730 doit être regardée comme intervenue à la date du 11 septembre 2013 dès lors que si l'acte notarié du 11 septembre 2013 mentionne que " le contrat est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du document d'arpentage constatant la division de la parcelle cadastrée E numéro 1572 au plus tard le 31 octobre 2013 " et qu'à la suite de l'arpentage réalisé le 10 octobre 2013, l'acte établi le 28 octobre 2013 constate que " les parties déclarent que par suite de la délivrance de ce document d'arpentage, la condition suspensive prévue dans l'acte du 11 septembre 2013 est réalisée et que celui-ci peut donc recevoir pleine et entière exécution ", il mentionne cependant par ailleurs et de manière non équivoque que l'acquéreur a payé le prix de 500 000 euros comptant par compensation ainsi qu'il résulte de l'attestation annexée audit acte, que l'acquéreur sera le propriétaire du bien vendu à compter du jour de la signature dudit acte, soit le 11 septembre 2013 et que l'entrée en jouissance aura lieu ce même jour par la prise de possession réelle. Dès lors, c'est à tort que l'administration fiscale, tiers par rapport aux parties contractantes, a estimé que, du point de vue fiscal, la cession en litige devait être considérée comme réalisée le 28 octobre 2013, date à laquelle a été constatée la réalisation de la condition suspensive prévue par l'acte notarié du 11 septembre 2013.
9. En second lieu, estimant que cette transaction pour un montant de 500 000 euros avait été consentie à un prix minoré, l'administration fiscale ayant évalué la valeur vénale de la parcelle à 2 917 713 euros, a soumis la vente du terrain à bâtir à la taxe sur la valeur ajoutée sur une base taxable de 2 439 559 euros [2 917 712/1,196] représentant un montant de la taxe de la valeur ajoutée due de 478 154 euros sur la base d'un taux de 19,60% et rehaussé le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés relatif à l'exercice clos en 2013 d'un montant de 2 021 499 euros. Cependant, à la date de la cession, soit le 11 septembre 2013, il est constant que ladite parcelle était, selon la proposition de rectification du 5 août 2016, incluse dans " la zone IINA du Moulin ... dans laquelle l'absence ou l'insuffisance d'équipements ne permet pas un aménagement immédiat " et où " Toute occupation ou utilisation du sol y est ... exclue, à l'exception de bâtiments et équipements d'infrastructures publics nécessités par le fonctionnement ultérieur de la zone ". Dans ces circonstances, la parcelle étant inconstructible à la date de la cession, l'administration, qui a déterminé la valeur vénale de la parcelle cédée par comparaison avec les prix de vente de biens correspondant à des terrains à bâtir en zone commerciale, ne démontre pas qu'en vendant la parcelle E 1730 au prix de 500 000 euros, l'appelante s'est volontairement appauvrie à des fins étrangères à son intérêt au profit la SCI Natal. Il s'ensuit que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, cette opération de cession n'est pas constitutive d'un acte anormal de gestion.
10. Il résulte de ce qui précède que la SARL Sud Finance Patrimoine est fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 à hauteur de 478 154 euros et des pénalités afférentes ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2013 en droits et pénalités correspondant au rehaussement de son résultat imposable relatif à l'exercice clos en 2013 opéré par l'administration pour un montant de 2 021 499 euros.
S'agissant de la vente à la SCI du Vallon du lot n°1 du lotissement de l'Elein situé à Cavalaire :
11. Par des actes en date des 22 et 28 janvier 2013, la SARL Sud Finance Patrimoine, alors dénommée société Sud France a vendu à la SCI du Vallon " une villa plus une unité d'accueil-réception " composée, selon lesdits actes, de deux chambres, de deux salles de bains, d'un hall, de toilettes, d'un salon, d'une cuisine, d'une salle à manger, d'une terrasse couverte, d'un garage et de la jouissance exclusive et privative d'un jardin avec piscine, correspondant au lot numéro 1 du domaine de l'Eilen, comportant 25 villas, situé à Cavalaire-sur-Mer, pour un montant de 165 000 euros toutes taxes comprises, soit 137 960 euros hors taxes. Il résulte de l'instruction qu'au cours d'une visite organisée sur place le 29 juin 2016, il a été constaté que la piscine avait été transformée en bassin de rétention d'eau et qu'un parking collectif était situé devant l'entrée de la villa.
12. Pour établir que la cession de ce bien a été réalisée à un prix significativement inférieur à sa valeur vénale, l'administration a procédé à l'évaluation de la valeur vénale de la villa cédée, après avoir au préalable relevé que le prix moyen des cinq villas les moins chères du domaine du lotissement de l'Elein vendues le plus récemment était de 612 272 euros toutes taxes comprises, soit 511 933 hors taxes, en prenant en compte la vente de trois biens comparables situés sur le territoire de la même commune mais comportant pour deux d'entre elles une ou deux chambres de plus et une piscine, cédés entre les années 2009 et 2013 pour des montants de 420 000, 490 000 et 405 000 euros. Ainsi, l'administration a retenu une valeur vénale de 350 666 euros toutes taxes comprises, soit 293 200 euros hors taxes, arrondie à 290 000 euros après avoir appliqué un correctif de 4 % pendant cinq années afin de tenir compte de la circonstance que, durant cette période, le bien a été grevé de sujétions tenant à sa mise à la disposition de la résidence para-hôtelière pour y servir d'accueil. Contrairement à ce que soutient l'appelante, l'expertise à laquelle elle a fait procéder, qui évalue le bien à la somme de 125 600 euros hors taxes, ne peut être regardée comme de nature à remettre en cause l'évaluation de l'administration, cet expert ayant fondé ses conclusions d'après une estimation de la valeur vénale du terrain libre augmenté du coût moyen en France d'une construction neuve en 2009.
13 La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas remis en cause l'estimation de la valeur vénale du bien retenue par l'administration lors de sa séance du 6 juillet 2017. Ainsi, l'administration, qui contrairement à ce qui est soutenu par l'appelante a tenu compte, et de manière suffisante, des sujétions particulières du bien en pratiquant l'abattement mentionné au point ci-dessus, doit, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une expertise judiciaire, être regardée comme établissant que le bien en cause, cédé au prix de 137 960 euros hors taxes, soit moins de 50% de sa valeur vénale, a été vendu à un prix significativement insuffisant.
14. Il résulte de l'instruction qu'au moment de la cession en litige, la SARL Sud Finance Patrimoine et la SCI du Vallon étaient domiciliées à la même adresse, 2 avenue de la Liberté à Sainte-Maxime, et avaient le même gérant, M. B... A..., ce dernier détenant la majorité des parts sociales des deux sociétés ce dont l'administration a pu déduire à juste titre que les parties étaient en relation d'intérêt. Par suite, en l'absence de preuve contraire apportée par le contribuable, la volonté d'évasion fiscale doit être présumée du seul fait de l'insuffisance significative du prix de vente par rapport au prix du marché.
15. Eu égard à ce qui vient d'être dit, c'est à bon droit que l'administration fiscale a, pour redresser l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 due à raison de cette opération, appliquer les dispositions combinées du 2 de l'article 266 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur et de l'article 17 du livre des procédures fiscales et substituer la valeur vénale ainsi déterminée au prix de vente stipulé, sans méconnaitre la loi fiscale ni la doctrine dont se prévaut la société requérante, cette dernière étant en tout état de cause postérieure à la période d'imposition en litige. L'administration fiscale a pu, dans ces mêmes circonstances, rehausser le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés relatif à l'exercice clos en 2013 à hauteur de la différence non perçue lors de la vente, soit 152 040 euros.
S'agissant de la taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles :
16. En premier lieu, s'agissant de la vente à la SCI Natal de la parcelle section E 1730 située à Sainte-Maxime, ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, le directeur départemental des finances publiques du Var a, par une décision du 26 avril 2021 postérieure à l'introduction de la requête, prononcé un dégrèvement de la taxe sur la cession des terrains nus rendus constructibles au titre de l'année 2013 pour un montant total de 149 832 euros, dont 131 894 euros en droits et 7 938 euros en pénalités. Par suite, les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet.
17. En second lieu, s'agissant de la vente à la SNC Kauffman et Broad Promotion 1 de la parcelle E 1773 située à Sainte-Maxime, il résulte de l'instruction que, par un acte du 16 janvier 2015, la SARL Sud Finance Patrimoine a cédé cette parcelle incluse dans la zone du Moulin provenant de la division de la parcelle cadastrée E 1728 selon document d'arpentage dressé le 15 octobre 2014 provenant elle-même d'une parcelle d'une plus grande superficie cadastrée E 1572 suivant procès-verbal du cadastre du 11 octobre 2013. La SARL Sud Finance Patrimoine ne conteste plus devant la Cour que cette parcelle E 1773 est devenue constructible à la suite d'une délibération du 12 septembre 2013 du conseil municipal de la commune de Sainte Maxime portant modification du plan d'occupation des sols, rendue exécutoire le 17 septembre suivant. Dès lors, l'appelante n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations de taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles, instaurée par l'article 1605 nonies du code général des impôts auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2013 à raison de la cession en janvier 2015 à titre onéreux de la parcelle E 1173 nue rendue constructible en septembre 2013.
18. Il résulte de tout de ce qui précède que la SARL Sud Finance Patrimoine est seulement fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 à hauteur de 478 154 euros et des pénalités afférentes ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2013 en droits et pénalités correspondant au rehaussement de son résultat imposable relatif à l'exercice clos en 2013 opéré par l'administration pour un montant de 2 021 499 euros. Il y a donc lieu de réformer le jugement contesté dans cette mesure et de rejeter le surplus des conclusions de la SARL Sud Finance Patrimoine sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise judiciaire aux fins de déterminer la valeur vénale du lot n°1 du lotissement de l'Elein situé à Cavalaire.
Sur la requête n° 21MA00999 :
19. Le présent arrêt ayant réglé l'affaire au fond, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 21MA00999 tendant au sursis à exécution du jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon.
Sur les frais des instances :
20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 2 000 euros à verser à la SARL Sud Finance Patrimoine au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21MA00999 de la SARL Sud Finance Patrimoine.
Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20MA04491 de la SARL Sud Finance Patrimoine à concurrence de la somme dégrevée de 149 832 euros au titre de la taxe sur la cession des terrains nus rendus constructibles au titre de l'année 2013.
Article 3 : La SARL Sud Finance Patrimoine est déchargée, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2013 à hauteur de 478 154 euros.
Article 4 : La SARL Sud Finance Patrimoine est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés correspondant au rehaussement opéré par l'administration, d'un montant de 2 021 499 euros, de son résultat imposable de l'exercice clos en 2013.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête n° 20MA04491 de la SARL Sud Finance Patrimoine est rejeté.
Article 7 : L'Etat versera à la SARL Sud Finance Patrimoine la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sud Finance Patrimoine et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Sanson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
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N° 20MA04491, N° 21MA0999
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