Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2017, le préfet des Hautes-Alpes demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du
3 juillet 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...B...devant le tribunal administratif de Marseille.
Il soutient que :
- l'intéressé a reçu les informations prévues par les dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- l'arrêté a été notifié dans une langue que l'étranger comprend ;
- le relevé d'empreintes de l'étranger a permis d'établir qu'il avait déposé une demande d'asile en Italie ;
- la procédure de reprise en charge a été respectée ;
- la décision de remise aux autorités italiennes est suffisamment motivée ;
- cette décision ne méconnaît pas l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- elle ne méconnaît pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle ne méconnaît pas les instructions du ministère de l'intérieur relatives au traitement des demandes des étrangers évacués de Calais.
Par des mémoires en défense enregistrés le 22 septembre 2017 et le 5 mars 2018, M. A... B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Alpes de l'admettre au séjour au titre de l'asile sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à Me C...au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du
10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de remise aux autorités italiennes est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- la décision administrative a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 29 § 1 du règlement UE 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- sa situation personnelle n'a pas fait l'objet d'un examen complet ;
- la décision administrative lui a été irrégulièrement notifiée ;
- elle méconnait les dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- elle est entachée d'une erreur de droit quant à la détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu les instructions ministérielles sur les demandeurs d'asile hébergés en centre d'accueil et d'orientation.
M. A...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 octobre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas a été entendu au cours de l'audience publique.
- les observations de M. A...B....
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Marseille :
1. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 18 de ce même règlement : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : a) prendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 21, 22 et 29, le demandeur qui a introduit une demande dans un autre État membre ; / b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre (...) 2. Dans les cas relevant du champ d'application du paragraphe 1, points a) et b), l'État membre responsable est tenu d'examiner la demande de protection internationale présentée par le demandeur ou de mener à son terme l'examen. (...)" ;
2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; / e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 " ; qu'aux termes de l'article 5 de ce règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;
4. Considérant que pour annuler l'arrêté du 1er juin 2017 ordonnant la remise de M. A... B...aux autorités italiennes le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé n'avait pas reçu les informations énumérées par les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et n'avait pas bénéficié de l'entretien imposé par les dispositions de l'article 5 dudit règlement ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces communiquées en cause d'appel par le préfet des Hautes-Alpes, et notamment de la production de la première page de chacun de ces documents, revêtue de la mention signée par M. A...B...selon laquelle celui-ci l'a reçu, que l'intéressé s'est vu remettre le jour du dépôt de sa demande d'asile, le 7 décembre 2016, la brochure d'information générale sur la demande d'asile et la brochure relative à la " procédure Dublin ", soit les brochures communes prévues par le 3 de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013, en langue arabe, de même que le guide d'accueil du demandeur d'asile ; que, par ailleurs, il ressort du compte rendu qui en a été dressé que M. A...B...a été reçu en entretien individuel le
7 décembre 2016 ; qu'il suit de ce là que le préfet des Hautes-Alpes est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif et la Cour par M. A... B...;
Sur les autres moyens soulevés par M. A...B...:
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 29 du règlement (UE)
n° 603/2013 du 26 juin 2013 : " Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'État membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend : / a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant ; / b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n° 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les États membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; / c) des destinataires des données ; / d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; / e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1 (...) " ;
8. Considérant qu'à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun ; que le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection ; que, dès lors, la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles le préfet transfère un demandeur d'asile aux autorités compétentes de l'Etat qui s'est reconnu responsable de l'examen de sa demande ; que le moyen tiré de la méconnaissance les dispositions de l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions portées sur le compte rendu d'entretien individuel par l'agent de préfecture en charge de celui-ci, que l'entretien s'est déroulé, ainsi que le permettent les dispositions précitées, avec l'assistance d'un interprète en langue arabe que le requérant a déclaré comprendre ; que, dans ces conditions,
M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que les conditions de notification de l'arrêté en litige à son destinataire sont, en tout état de cause, sans incidence sur sa légalité ; qu'il suit de là que M. A...B...ne peut pas utilement soutenir que l'interprète auquel l'administration a eu recours pour lui notifier la décision contestée n'est pas assermenté et n'appartient pas à un organisme agréé, et que ses coordonnées n'ont pas été portées à sa connaissance en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni que la demande de reprise en charge formulée auprès des autorités italiennes ne lui a pas été notifiée en même temps que l'arrêté contesté ;
11. Considérant, en troisième lieu, que l'article 2 de l'arrêté du préfet des Hautes-Alpes précise que le transfert de l'intéressé vers l'Italie doit avoir lieu dans les six mois suivant l'accord des autorités italiennes, et que ce délai peut être prolongé à douze mois en cas d'emprisonnement et à dix-huit mois en cas de fuite en application de l'article 29 du règlement n° 604/2013 ; que le moyen tiré de ce que la décision en litige ne préciserait pas le délai d'exécution de la mesure de transfert doit dès lors être écarté comme manquant en fait ;
12. Considérant, en quatrième lieu, que la décision de transfert du 1er juin 2016, qui doit être motivée en application des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle rappelle que M. A...B...est entré sur le territoire français régulièrement et a demandé l'asile le 7 décembre 2016 et que le relevé d'empreintes palmaires a révélé qu'il avait présenté une demande d'asile en Italie, conduisant le préfet à saisir les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge en application de l'article 18 paragraphe 1 b) du règlement n° 604/2013, qui a été acceptée implicitement par ces dernières le 9 février 2017 ; que le préfet y analyse également la situation de M. A...B...au regard des dérogations prévues par l'article 17 du même règlement, ainsi que du droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des risques pouvant constituer une atteinte au droit d'asile ; qu'ainsi, le requérant était en mesure de connaître les motifs de droit et de fait retenus par le préfet des Hautes-Alpes pour décider sa remise aux autorités italiennes ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait insuffisamment motivé doit être écarté ; qu'une telle motivation ne révèle aucun défaut d'examen particulier de la situation de M. A...B...;
13. Considérant, en cinquième lieu, qu'en vertu de l'annexe II au règlement (UE)
n° 118/2014 du 30 janvier 2014 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n° 604/2013, constitue une preuve pour la détermination de l'État membre responsable de l'examen de la demande d'asile, le résultat positif fourni par Eurodac à la suite de la comparaison des empreintes du demandeur avec les empreintes collectées au titre de l'article 9 du règlement " Eurodac " ; qu'il résulte en outre des dispositions de l'article 11 du règlement n° 603/2013 recensant les données enregistrées dans le système Eurodac qu'une personne y est identifiée non pas par son identité mais par le numéro de référence attribué par l'État membre où ses empreintes ont été prises à l'origine ; que l'article 24 de ce règlement précise que, dans ce numéro de référence, le chiffre suivant la ou les lettres d'identification désignant l'État membre indique la catégorie de personne ou de demande ; qu'il résulte de l'application combinée de cet article et des articles 9 et 14 du même règlement que le chiffre
" 1 " désigne les demandeurs de protection internationale et le chiffre " 2 " désigne les personnes interpellées lors du franchissement irrégulier d'une frontière en provenance d'un pays tiers ;
14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les recherches effectuées sur le fichier européen EURODAC à partir du relevé décadactylaire de M. A...B...du
7 décembre 2016 ont permis de constater que les empreintes de ce dernier sont identiques à celles relevées lors de sa demande d'asile présentée en Italie le 2 août 2016 et enregistrées sous les numéros IT 2 SS00LU8 et IT 2 SS00LUB ; qu'il suit de là que l'intéressé, qui n'établit en tout état de cause pas que ses empreintes auraient été relevées contre son gré, n'est pas fondé à soutenir que l'Italie n'est pas l'État responsable de l'examen de sa demande d'asile ni qu'il ne pourrait pas faire l'objet d'une mesure de reprise en charge par ce pays ;
15. Considérant, en sixième lieu, qu'eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, les craintes dont un demandeur d'asile peut faire état quant au défaut de protection, dans l'un de ces Etats doivent en principe être présumées non fondées sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire ; qu'en se bornant à des considérations d'ordre général sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie, Etat membre de l'Union européenne, M. A...B...ne peut être regardé comme établissant que sa demande d'asile ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et que sa réadmission dans ce pays serait donc, par elle-même, illégale car constitutive d'une atteinte grave au droit d'asile ; qu'il n'établit pas non plus qu'il ne pourrait pas bénéficier en Italie des soins que requiert son état de santé ; que, par suite, le préfet des Hautes-Alpes n'a méconnu ni les dispositions du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en décidant la remise de M. A... B...aux autorités italiennes ;
16. Considérant, en septième lieu, que l'arrêté contesté ayant pour objet sa réadmission en Italie, pays responsable de sa demande d'asile, M. A...B...ne peut pas utilement se prévaloir des risques qu'il encourt en cas de retour au Soudan ;
17. Considérant, en huitième lieu, qu'aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit " ;
18. Considérant que la faculté laissée à chaque Etat membre, par ces dispositions, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant d'un pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans ce règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile ; que M. A...B...n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet des Hautes-Alpes aurait méconnu l'étendue de ses compétences en ne faisant pas application de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions rappelées de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; qu'en tout état de cause, ainsi qu'indiqué au point 12, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet a examiné la situation du requérant au regard des possibilités de dérogation offertes par ces dispositions ;
19. Considérant, en dernier lieu, que M. A... B...ne peut utilement se prévaloir des instructions adressées aux préfets par le ministre de l'intérieur sur les demandeurs d'asile hébergés en centre d'accueil et d'orientation dès lors que les critères de régularisation y figurant ne présentent pas le caractère de lignes directrices susceptibles d'être invoquées mais constituent de simples orientations pour l'exercice, par le préfet, de son pouvoir de régularisation ; que le moyen tiré de ce que le préfet des Hautes-Alpes en aurait méconnu les dispositions, ne peut qu'être écarté ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Hautes-Alpes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 1er juin 2017 portant remise de M. A...B...aux autorités italiennes ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
21. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. A...B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte par M. A...B...ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les frais liés au litige :
22. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à M. A...B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 3 juillet 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...B...devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...B..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Alpes.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2018 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 avril 2018.
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N° 17MA03093