Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 juillet 2015, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 décembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 24 juillet 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans les six mois de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur de droit en prenant une décision de refus de séjour incompatible avec l'interdiction qui lui était faite par jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 29 mai 2013 de quitter le territoire français durant la période de mise à l'épreuve ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors que la décision de refus de séjour, dont elle n'est pas dissociable, est entachée d'illégalité ;
- en prononçant une obligation de quitter le territoire français, alors qu'il remplissait les conditions de délivrance d'un titre de séjour posées par l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur de droit ;
- cette mesure d'éloignement est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et fait obstacle à l'exécution du jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 29 mai 2013 ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boyer a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 24 juillet 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. C..., ressortissant comorien né le 31 décembre 1962, en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. C... relève appel du jugement du 4 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant que M. C... déclare être entré en France pour la première fois en 1984 sans toutefois en justifier ; que les documents qu'il produit au soutien de l'allégation selon laquelle il résiderait sur le territoire français de manière continue depuis cette même année sont établis au nom de M. C... A..., identité qu'il a usurpée ainsi qu'il ressort du jugement du tribunal correctionnel de Marseille en date du 29 mai 2013 par lequel il a été condamné à une peine d'emprisonnement de six mois assortie du sursis avec mise à l'épreuve ; que si, aux termes de ce même jugement, il a commis des infractions sur le territoire français au cours de la période du 10 juillet 2010 au 31 décembre 2012, le 20 novembre 2011 et le 4 février 2013, et s'il ressort des avis d'imposition et des bulletins de paie qu'il a versés aux débats que, sous une fausse identité, il a occupé un emploi de plongeur dans la société Gelot Rosso en 2006, qu'il a exercé cette même activité en juillet 2010 pour l'Eurl Camalice et qu'il a disposé de revenus en France au titre des années 1991 à 1994, 1996 à 1998, 2000 à 2002, 2006 à 2011, ces éléments sont insuffisants pour démontrer la présence habituelle de M. C... sur le territoire français depuis 1984, notamment en ce qui concerne les années 1995, 1999, 2003, 2004 et 2005 ; que l'intéressé, âgé de cinquante-deux ans à la date de la décision attaquée, est célibataire sans charge de famille ; qu'ainsi, eu égard aux conditions dans lesquelles il a séjourné en France, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône, en prenant la décision contestée, aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant que, eu égard aux effets attachés à la décision portant refus de titre de séjour, M. C... ne peut utilement soutenir que cette décision contreviendrait au jugement correctionnel ci-dessus mentionné du 29 mai 2013, devenu définitif, en ce qu'il fixe un délai de mise à l'épreuve de deux ans comportant notamment l'interdiction de quitter le territoire sans l'autorisation du juge d'application des peines ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
5. Considérant que la décision de refus de séjour n'étant pas, ainsi qu'il est dit aux points 2 à 4, entachée des illégalités invoquées, le requérant n'est pas fondé à soulever, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
6. Considérant qu'il suit de ce qui a été dit au point 3 que M. C... ne peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le requérant ne saurait soutenir que, du fait qu'il entrerait dans le champ d'application de ces dispositions, le préfet ne pouvait sans commettre d'erreur de droit prononcer à son encontre une mesure d'éloignement ;
7. Considérant que si M. C... fait valoir que, par son jugement du 29 mai 2013, le tribunal correctionnel de Marseille l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement et a prononcé un sursis à l'exécution de cette peine avec une mise à l'épreuve de deux ans lui interdisant notamment tout déplacement à l'étranger sans autorisation du juge d'application des peines, et qu'il était ainsi tenu de respecter les mesures de contrôle prévues par ce jugement à la date à laquelle a été prise la mesure d'éloignement en litige, cette circonstance, qui fait seulement obstacle à ce que l'obligation de quitter le territoire français soit mise à exécution jusqu'à la levée, par le juge judiciaire, des mesures de surveillance, demeure sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, le moyen tiré de ce que la décision d'éloignement prise à l'encontre de M. C... méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Me B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2016.
2
N° 15MA02743
mtr