Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 août 2015 et un mémoire enregistré le 1er septembre 2016, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 février 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 1er octobre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire d'ordonner le réexamen de la demande dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, le refus de lui délivrer un certificat de résidence a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur de fait dès lors qu'il justifie résider en France depuis plus de dix ans et entre ainsi dans les prévisions de l'article 6-1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales et de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien en raison des liens familiaux qu'il entretient sur le territoire national et de son intégration en France ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée des vices d'illégalité externe entachant la décision portant refus de titre ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs invoqués à l'égard de la décision portant refus de titre de séjour ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'un défaut de motivation au regard de l'ensemble des critères posés au 7ème alinéa de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de sa situation personnelle et en raison de sa durée excessive ;
- les moyens tirés du défaut de saisine de la commission du titre de séjour et de l'erreur de fait ne sont pas nouveaux en appel.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 juillet 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens relatifs au vice de procédure dont serait entachée la décision de refus de séjour et au défaut de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sont, faute d'avoir été présentés en première instance, irrecevables en appel ;
- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boyer,
- et les observations de MeD..., substituant MeC..., représentant M. B....
1. Considérant que M. B..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 5 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et lui a interdit de revenir sur le territoire national pendant une durée de deux ans ;
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...). " ; que si M. B... soutient résider en France depuis qu'il y est entré le 26 juillet 2004 muni d'un visa court séjour de trente jours valable pour des entrées multiples dans les Etats Schengen, délivré par les autorités françaises à Alger, il ne présente au titre des années 2005 et 2006 que des documents fiscaux et médicaux dont la nature et le nombre insuffisant ne permettent pas d'établir qu'il aurait eu au cours de ces années sa résidence habituelle en France ; que, par suite, M. B... ne démontre pas qu'au jour de la décision contestée, il remplissait la condition de durée de séjour posée par les dispositions précitées de l'accord franco-algérien ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : " au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant que M. B..., né le 29 août 1949 en Algérie, déclare être entré en France en 2004, à l'âge de cinquante-cinq ans ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il est marié et père de cinq enfants majeurs ; que s'il soutient disposer d'attaches familiales en France dès lors qu'y réside son frère, il est constant que son épouse et ses enfants résident en Algérie ; que dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un certificat de résidence le préfet de l'Hérault aurait méconnu les stipulations de l'article 6-5) de l'accord franco-algérien ou celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes motifs la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) "; qu'il résulte des dispositions des articles L. 312-1 et L. 312-2 précités du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative n'est tenue de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 équivalentes aux dispositions des articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces stipulations ; que, pour les motifs précédemment exposés au point 4, M. B... n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement de stipulations de l'article 6-5) de l'accord franco-algérien équivalentes aux dispositions ci-dessus mentionnées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par suite, contrairement à ce qui est soutenu, le préfet n'avait pas à saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant, en premier lieu, que le moyen par lequel M. B... entend exciper de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour à l'appui de sa contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté compte tenu de ce qui vient d'être dit aux points 2 à 5 ;
7. Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de ce que la mesure d'éloignement attaquée méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 ;
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour :
8. Considérant que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant interdiction de retour, qui relève d'une une cause juridique nouvelle en appel au regard des moyens soulevés en première instance à l'encontre de cette même décision, ne peut par suite qu'être écarté comme irrecevable ;
9. Considérant qu'ainsi qu'il a déjà été dit, M. B... n'établit pas l'ancienneté alléguée de son séjour en France, alors qu'il dispose de fortes attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France malgré les refus de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire qui lui ont été opposés le 2 février 2005, le 10 avril 2009 et le 17 novembre 2010 ; que, dans ces conditions, et alors même que sa présence sur le territoire français ne constituerait pas une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Hérault, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de deux ans, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.
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N° 15MA03583