Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 17 juillet 2014 et 17 décembre 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement susmentionné du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2014 pris par le préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande sous la même astreinte, dans le délai d'un mois, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, lequel renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le requérant soutient que :
- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé ;
- il viole l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 dès lors qu'il démontre vivre en France depuis plus de cinq ans ;
- il est inséré professionnellement, travaille comme échafaudeur et peut se prévaloir de la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'atteinte portée à sa vie privée et familiale.
Par ordonnance du 14 décembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 janvier 2016 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin, président-assesseur ,
- et les observations de Me A...représentant M.B....
1. Considérant que, par arrêté en date du 27 janvier 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., ressortissant tunisien né en 1983, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 27 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant que l'arrêté contesté, qui fait référence aux articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte les considérations de droit qui constituent le fondement de la décision refusant l'admission au séjour ; qu'il mentionne également les circonstances de fait sur lesquelles repose cette décision, notamment que le requérant, né en France en 1983, est entré régulièrement sur le territoire français en 2002 mais n'établit pas s'y être maintenu continuellement depuis lors, et qu'il ne justifie pas de son insertion socio-économique, non plus que de l'ancienneté et de la stabilité de liens personnels et familiaux ; qu'ainsi, l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 27 janvier 2014, en tant qu'il porte refus de séjour, répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; qu'en application de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu de donner à la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien susvisé : " Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : - les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans ; (...) " ; que si M. B...invoque une méconnaissance des stipulations précitées, la citation qu'il en fait, selon laquelle un titre de séjour serait accordé au tunisien résidant en France depuis cinq ans à la date d'entrée en vigueur de l'accord-cadre signé à Tunis le 28 avril 2008, laquelle est intervenue le 1er juillet 2009, est erronée ; qu'en tout état de cause, dès lors qu'il déclare être entré en France en 2002, M. B...ne justifie pas y avoir résidé depuis plus de dix ans au 1er juillet 2009 ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. B...a épousé en 2006 une ressortissante française et a bénéficié, à ce titre, d'un titre de séjour valable jusqu'au 30 octobre 2007, une requête en divorce est intervenue le 26 novembre 2013, sur le fondement de l'article 230 du code civil par consentement mutuel des époux, soit avant le dépôt par le requérant de sa demande de titre de séjour en date du 3 décembre 2013 ; que le couple n'a pas eu d'enfant ; que, par ailleurs, le caractère habituel du séjour en France de M. B... après l'expiration de son titre de séjour valable jusqu'au 30 octobre 2007 ne peut être regardé comme établi en ce qui concerne les années 2008 et 2009, pour lesquelles le requérant ne produit que quelques documents épars, dépourvus à eux seuls de valeur probante ; que si M. B...fait valoir que ses parents, son frère jumeau et ses deux soeurs résident légalement en France, qu'il possède une connaissance suffisante du français et qu'il dispose d'un logement à son nom depuis le 1er mars 2010, il reconnaît lui-même avoir un frère en Tunisie et ne démontre pas une intégration particulière en France, dès lors que la réalité de l'activité professionnelle dont il se prévaut dans le secteur du bâtiment et des travaux publics n'est pas établie, l'intéressé indiquant lui-même ne pouvoir fournir les bulletins de salaire pour le travail qu'il effectuerait pour une société de montage d'échafaudages ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances susmentionnées, l'arrêté en cause n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de l'arrêté critiqué sur la situation personnelle de l'intéressé ;
6. Considérant que M. B...ne peut utilement se prévaloir des orientations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le ministre de l'intérieur a adressée aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
7. Considérant que si le requérant soutient que la décision le renvoyant en Tunisie porterait atteinte à son droit à une vie privée et familiale normale, il y a lieu d'écarter ce moyen par les motifs exposés au point 5 ;
8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que les conclusions présentées à cette fin par le requérant doivent donc être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande le requérant au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- M. Martin, président-assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 février 2016.
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N° 14MA03120
nc