Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 novembre 2017, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 juin 2017 en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 janvier 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 janvier 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation ;
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'erreur de droit au regard du 7° de l'article L. 313-11 de ce code dès lors qu'elle l'exclut du champ de cette disposition en raison de l'applicabilité à son cas de la procédure de regroupement familial ;
- cette décision méconnaît l'article L. 313-1 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 août 2018 le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante marocaine née le 14 septembre 1992, est entrée sur le territoire français le 13 mars 2013 sous couvert d'un passeport muni d'un visa D. Elle s'est vue délivrer une carte de séjour temporaire mention " travailleur saisonnier " valable du 25 mars 2013 au 24 mars 2016. Elle est entrée pour la dernière fois en France le 3 octobre 2015. Le 15 novembre 2015, elle a sollicité un changement de statut en présentant une demande de carte de séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 12 avril 2016, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination. Le 2 novembre 2016 elle a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour, portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a fait l'objet d'un refus par un arrêté du 25 janvier 2017 du préfet de l'Hérault, assorti d'une mesure d'éloignement. Mme A... relève appel du jugement du 22 juin 2017 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des mentions de la décision en litige, que le préfet de l'Hérault a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de Mme A... avant de lui refuser le séjour. La circonstance qu'il a mentionné la possibilité pour son époux de demander le bénéfice du regroupement familial n'est pas de nature par elle-même à entacher la décision d'erreur de droit, les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point 3 prévoyant expressément qu'elles ne sont pas applicables aux étrangers qui peuvent solliciter ce regroupement.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Pour l'application des stipulations et des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
4. Si Mme A... est mariée depuis le 29 novembre 2014 avec un ressortissant marocain titulaire d'une carte de résident en cours de validité et que leur premier enfant est né en France le 4 mai 2016, cette union datait de moins de deux ans à la date de la décision attaquée et la requérante ne soutient ni n'établit que la relation qui l'unit à son époux serait ancienne et stable. Par ailleurs, si elle fait valoir la nécessité de sa présence auprès de son mari, reconnu travailleur handicapé, ce statut et le certificat médical daté du 17 février 2017, ne suffisent pas le démontrer. Eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de la requérante, notamment au caractère récent du mariage, et en l'absence d'impossibilité pour l'intéressée de reconstituer dans son pays d'origine sa cellule familiale dont les membres sont tous de nationalité marocaine et où vivent ses parents et ses frères et soeurs ou encore de se rendre au Maroc le temps que son époux obtienne le regroupement familial, l'arrêté en litige ne saurait être regardé comme portant au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Cette décision ne méconnaît, par suite, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni en tout état de cause les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
5. En troisième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, de tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. En revanche, le deuxième alinéa de cette stipulation, qui ne crée d'obligations qu'entre les Etats parties, ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour.
6. La décision de refus de séjour contestée n'a pas pour effet de séparer la requérante de sa fille mineure. Le moyen tiré de la violation des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit dès lors être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement.
8. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, la requérante n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'époux de la requérante, de nationalité marocaine et alors même qu'il travaille en France, serait dans l'impossibilité de retourner dans son pays d'origine, même provisoirement. Dans ces conditions, et en tout état de cause, la mesure d'éloignement contestée n'a pas pour effet de méconnaître les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter également ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 s'opposent à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée par Mme A... dès lors que l'Etat n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...épouseE..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- Mme D..., première conseillère,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 février 2019.
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N° 17MA04295
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