Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2014, M. A..., représenté par la SCP Dessalces, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 octobre 2014 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 1er mars 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à son épouse un titre de séjour comportant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa demande de regroupement familial dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat soit, en cas d'admission à l'aide juridictionnelle, une somme de 1 200 euros TTC à verser à la SCP Dessalces en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité d'aide juridictionnelle, soit, en l'absence d'admission à l'aide juridictionnelle, la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision préfectorale est insuffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation du montant de ses ressources ;
- en se croyant lié par l'insuffisance des ressources, le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
- une atteinte excessive a été portée à sa vie privée et familiale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen de légalité externe tiré du défaut de motivation est irrecevable ;
- les autres moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mars 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chanon, premier conseiller.
1. Considérant que, par jugement du 6 octobre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A..., de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de la décision du 1er mars 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui accorder le bénéfice du regroupement familial en faveur de son épouse et de ses trois enfants ; que M. A... relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, en premier lieu, que la décision préfectorale comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, elle est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, alors en vigueur ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales (...). Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième (...) " ; que l'article R. 411-4 du même code dispose : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : / - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; / - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... disposait au titre de ses deux pensions de retraite, sur la période de douze mois de référence, de ressources alimentant de façon stable le budget familial correspondant à une somme moyenne mensuelle de 990,38 euros ; que ne peut être prise en compte la somme de 200 euros que son fils déclare lui verser mensuellement, dont la preuve du versement n'est pas rapportée et qui ne saurait, en tout état de cause, être regardée en l'espèce, compte tenu des revenus de l'intéressé, comme une ressource stable au sens des dispositions des articles L. 411-5 et R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en va de même de la somme de 270,63 euros que M. A... perçoit au titre de l'allocation de logement, et non de l'aide personnalisée au logement comme il le soutient, qui relève des prestations familiales, et est au demeurant versée à un tiers ; que, dans ces conditions, les ressources mensuelles stables de M. A... sont substantiellement inférieures à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de la période de référence, majorée d'un dixième s'agissant d'une famille cinq personnes ; que, par suite, l'autorité administrative n'a pas entaché le refus de regroupement familial d'une erreur d'appréciation sur le montant des ressources de l'intéressé, alors même que la décision mentionne la somme mensuelle de 315 euros à la suite d'une erreur matérielle ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru lié par l'insuffisance des ressources et n'aurait pas procédé à l'examen complet et particulier de la situation personnelle de M. A... ; qu'ainsi le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;
6. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant que les circonstances que M. A... est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 14 juin 2021 et réside habituellement en France, que ses revenus sont stables et qu'il est parfaitement intégré sur le territoire français sont insuffisantes, par elles mêmes, pour estimer que le préfet a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par le refus de regroupement familial ; qu'ainsi, l'appelant ne peut se prévaloir de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la SCP Dessalces et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222 26 du code de justice administrative,
- M. Chanon, premier conseiller,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 30 juin 2016.
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N° 14MA04818
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