Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2014, Mme C..., représentée par Me Sabatier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 septembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 janvier 2014 refusant son admission au séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me Sabatier en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- ni la qualité, ni la compétence du médecin, qui a émis un avis sur son état de santé, ne sont établies ;
- le refus de titre de séjour a été pris au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine préalable de la commission du titre de séjour ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour sur laquelle elle se fonde, méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale compte tenu de l'illégalité de la décision portant refus de séjour sur laquelle elle se fonde.
Par ordonnance du 31 juillet 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2015.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 décembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme B....
1. Considérant que Mme C..., ressortissante malgache, relève régulièrement appel du jugement du 18 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête d'appel :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; que l'arrêté susvisé du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin de l'agence régionale de santé d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale dont le défaut peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si celui-ci peut ou non bénéficier d'un traitement médical approprié dans son pays et, dans ce dernier cas, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si son état de santé lui permet de voyager sans risque ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 et de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le médecin compétent pour émettre un avis sur une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de ce 11° est un médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'étranger, désigné par le directeur général de cette agence ; que la régularité de cette procédure implique, pour respecter les prescriptions du code précité que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par le médecin de l'agence régionale de santé compétent ;
4. Considérant que Mme C... soutient, pour la première fois en appel, que l'avis médical en date du 19 septembre 2013, au vu duquel a été pris l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2014 en litige, a été émis par une autorité incompétente au motif qu'il est signé par un médecin, en l'occurrence le docteur Giunta, qui n'a pas été régulièrement désigné ;
5. Considérant, d'une part, qu'alors que le préfet des Bouches du Rhône a réceptionné le 28 octobre 2014 la requête d'appel de Mme C... enregistrée le 2 octobre précédent et le 31 juillet 2015 l'ordonnance du même jour fixant la clôture de l'instruction au 30 septembre 2015, celui-ci n'a présenté aucun mémoire en réponse, ni observations à ladite requête d'appel régulièrement notifiée ; que le préfet des Bouches du Rhône n'a, en outre, fait valoir aucun élément de nature à l'empêcher de produire dans le délai qui lui a été imparti ; que, d'autre part, il ne ressort d'aucun élément du dossier que le docteur Giunta, médecin de l'agence régionale de santé, était, à la date de la décision critiquée, désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé de la région Provence Alpes Côte d'Azur en application des dispositions précitées des articles L. 313-11 et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, Mme C... est fondée à soutenir pour la première fois devant la Cour que l'avis médical du 19 septembre 2013 a été rendu par un agent qui n'avait pas compétence à cet effet et que, pour cette raison, l'arrêté du 30 janvier 2014 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
7. Considérant qu'eu égard au motif du présent arrêt, cette annulation implique seulement qu'il soit ordonné au préfet des Bouches-du-Rhône de statuer à nouveau dans le délai de deux mois sur la demande de titre de séjour présentée par Mme C...; qu'il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
8. Considérant que Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Sabatier, avocat de Mme C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Sabatier, de la somme de 1 200 euros ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1403560 du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 30 janvier 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de statuer à nouveau sur la demande de titre de séjour de Mme C... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à Me Sabatier, avocat de Mme C..., la somme de 1 200 euros (mille deux cents euros) en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Sabatier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., au préfet des Bouches-du-Rhône, au ministre de l'intérieur et à Me Sabatier.
Copie en sera adressée au procureur près du tribunal de grande instance de Marseille.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président de chambre,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme B..., première conseillère,
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
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N° 14MA04150