Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 20NC00061 le 10 janvier 2020, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 juillet 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 3 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé et rédigé de manière stéréotypée ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et rédigé de manière stéréotypée ;
- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 16 juillet 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 13 août 2020.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 5 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., né le 10 septembre 1965, de nationalité algérienne, est entré en France le 21 janvier 2017, muni de son passeport algérien en cours de validité et d'un visa de court séjour délivré par les autorités consulaires françaises en Algérie. Le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a accordé à titre exceptionnel une autorisation provisoire de séjour non renouvelable, valable jusqu'au 28 septembre 2017. M. B... a sollicité, le 19 janvier 2018, la délivrance d'un certificat de résidence algérien, au motif de sa situation personnelle et familiale, en arguant notamment qu'il devait demeurer auprès de son père malade. Par un arrêté du 3 juillet 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé passé ce délai. M. B... fait appel du jugement du 26 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Après avoir rappelé les conditions d'entrée de M. B... sur le territoire français et précisé que l'intéressé ne saurait se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non applicables aux ressortissants algériens, le jugement attaqué cite l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, invoqué par le requérant, et précise que M. B... est arrivé en France à l'âge de 52 ans en provenance d'Algérie où il a toujours vécu jusque-là et où résident son épouse, ainsi que ses frères et soeurs. Il souligne également que, s'il est constant que le père de l'intéressé est âgé, réside en France de manière régulière et voit sa santé se dégrader, " il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence à ses côtés de manière continue de M. B... s'avère indispensable, dès lors qu'il bénéficie d'un protocole d'aide et de soins à domicile ". Il ne ressort pas de la lecture du jugement attaqué que le tribunal administratif n'aurait pas pris en considération les avis médicaux mentionnant la nécessité de la présence au quotidien de l'appelant aux côtés de son père. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé et rédigé de manière stéréotypée, et qu'il est ainsi irrégulier.
Sur la légalité de l'arrêté du 3 juillet 2018 :
3. En premier lieu, l'arrêté contesté mentionne les textes dont il fait application, notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 211-1, L. 511-1 1, L. 511-1 II, L. 511-4, L. 513-2, R. 513-3 et L. 611-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et précise que M. B... est marié et sans enfant, qu'il a vécu la majorité de sa vie hors de France, qu'il ne peut pas se prévaloir de liens personnels et familiaux stables, intenses et anciens en France, et qu'un protocole d'aide et de soins à domicile a été mis en place au bénéfice de son père malade. Il souligne également que l'intéressé n'entre pas dans l'un des cas dans lesquels l'étranger ne peut pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, et qu'il n'y a pas lieu de faire usage du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet pour ne pas assortir le refus de séjour opposé à l'intéressé d'une telle obligation. Il comporte, dès lors, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé et rédigé de manière stéréotypée doit être écarté.
4. En deuxième lieu, le requérant ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens, dont la situation est exclusivement régie par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France le 21 janvier 2017, à l'âge de 52 ans. Il ne résidait ainsi sur le territoire français que depuis moins de dix-huit mois, à la date de l'arrêté préfectoral contesté. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à son arrivée récente en France et où résident notamment son épouse, ainsi que ses frères et soeurs. S'il soutient que l'état de santé de son père, titulaire d'une carte de résident pour algérien valable dix ans et âgé aujourd'hui de 87 ans, nécessite sa présence auprès de lui pour l'assister dans toutes les taches de la vie quotidienne, il est constant que le père du requérant bénéficie d'un protocole d'aide et de soins à domicile et M. B... ne justifie pas avoir les compétences requises pour s'occuper à plein temps d'une personne atteint d'une ischémie médullaire T11-T12 avec grabatisation. Par suite, et nonobstant la circonstance que le service destiné à l'aide et aux soins à domicile ne serait présent qu'en matinée et ne prendrait que partiellement en charge les tâches matérielles quotidiennes, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 3 juillet 2018. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées, par voie de conséquence.
Sur les frais liés à l'instance :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 20NC00061