Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 février 2018, l'association de football multiculturelle de Romilly, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1701246 du 19 décembre 2017 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler les décisions du maire de la commune de Romilly-sur-Seine des 19 mai et 16 juin 2017 ;
3°) de condamner la commune de Romilly-sur-Seine à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'association de football multiculturelle de Romilly soutient que :
- la décision du 19 mai 2017 est entachée d'incompétence, le maire pouvant seulement, en matière d'occupation du domaine public, exécuter la délibération du conseil municipal et non prendre lui-même une décision ;
- les décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elles sont disproportionnées par rapport aux faits qui lui sont reprochés et compte tenu de leurs conséquences pour elle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2018, la commune de Romilly-sur-Seine, représentée par la SCP Colomes-Mathieu-Sanchi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'association de football multiculturelle de Romilly au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Romilly-sur-Seine soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors qu'elle est insuffisamment motivée ;
- aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'association de football multiculturelle de Romilly a sollicité l'autorisation de la commune afin d'occuper et d'utiliser, au titre de la saison 2017-2018, ses installations publiques sportives, notamment le stade " Bardin-Goussery " et le stade " des droits de l'enfant ". Par une décision du 19 mai 2017, confirmée sur recours gracieux le 16 juin 2017, le maire de la commune de Romilly-sur-Seine a rejeté cette demande.
2. L'association de football multiculturelle de Romilly relève appel du jugement du 19 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la recevabilité de l'appel :
3. Contrairement à ce que fait valoir la commune de Romilly-sur-Seine, la requête de l'association de football multiculturelle de Romilly contient un énoncé des conclusions soumises à la cour, ainsi qu'un exposé des faits et moyens suffisamment précis, pour satisfaire à l'obligation de motivation prévue par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par la commune doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : / 1° De conserver et d'administrer les propriétés de la commune et de faire, en conséquence, tous actes conservatoires de ses droits (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que, s'il appartient au conseil municipal de délibérer sur les conditions générales d'administration et de gestion du domaine public communal, le maire est seul compétent pour délivrer ou refuser de délivrer les autorisations d'occupation du domaine public. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le maire n'était pas compétent pour se prononcer sur sa demande.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales : " Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations ou partis politiques qui en font la demande. / Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que les décisions attaquées sont notamment fondées sur les nécessités du maintien de l'ordre public, au regard des agressions verbales et physiques perpétrées par le président de l'association requérante et son directeur technique, le 30 octobre 2016, sur le concierge d'un des stades faisant l'objet de la demande d'autorisation, et le 25 janvier 2017 sur l'agent responsable du complexe sportif évolutif couvert. La commune précise, sans être contredite, que ces agents étaient les interlocuteurs habituels des dirigeants de l'association requérante et qu'à la suite de ces incidents, ils ont sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle.
8. En se bornant à soutenir que le premier incident a fait l'objet d'un classement sans suite par le procureur de la République et que le second ne s'inscrit pas dans l'exercice de ses activités sportives, sans contester pour autant la réalité des faits, la requérante ne remet pas en cause le bien-fondé du motif tiré des nécessités du maintien de l'ordre public. Eu égard à leur gravité, à la qualité de leurs auteurs et à leur lien avec l'utilisation des équipements communaux par l'association, ces faits étaient de nature à justifier légalement le refus d'autorisation contesté. Par ailleurs, les allégations sommaires de la requérante quant aux conséquences préjudiciables de ce refus ne saurait suffire à en établir la réalité et en tout état de cause, ces conséquences ne peuvent être utilement invoquées pour remettre en cause la décision contestée justifiée par les nécessités du maintien de l'ordre public.
9. Il résulte de tout ce qui précède que l'association de football multiculturelle de Romilly n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Romilly-sur-Seine qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'association de football multiculturelle de Romilly demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'association de football multiculturelle de Romilly une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Romilly-sur-Seine au titre de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association de football multiculturelle de Romilly est rejetée.
Article 2 : L'association de football multiculturelle de Romilly versera à la commune de Romilly-sur-Seine une somme de 2 000 (deux mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de football multiculturelle de Romilly et à la commune de Romilly-sur-Seine.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
Délibéré après l'audience du 7 février 2019, à laquelle siégeaient :
M. Meslay, président de chambre,
Mme Stefanski, président,
M. Rees, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2019.
Le rapporteur,
Signé : P. REES Le président,
Signé : P. MESLAY
La greffière,
Signé : V. FIRMERY
La République mande et ordonne au préfet de l'Aube en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. ROBINET
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N° 18NC00393