Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 6 février 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 13 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme C...soutient que :
- l'avis émis par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ne mentionne pas l'identité du médecin rapporteur ;
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant refus de renouvellement du titre de séjour sur sa situation personnelle et familiale ;
- l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour emporte l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision lui faisant obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle et familiale ;
- la décision fixant le pays d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2018, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 octobre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2018.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision en date du 24 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Laubriat, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante de la République démocratique du Congo, fait appel du jugement du 6 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2017 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour " étranger malade ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai.
Sur la légalité de la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". L'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 de ce même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ". Enfin, en vertu de l'article 6 de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016, le collège de médecins du service médical de l'OFII désigné afin d'émettre un avis doit préciser : " a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) ".
3. En premier lieu, d'une part, il ne résulte pas de ces dispositions ni d'aucune autre disposition législative ou règlementaire que le nom de l'auteur du rapport médical prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devrait être indiqué dans l'avis émis par le collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii). D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis émis le 1er septembre 2017 par ce collège et du courriel transmis le 20 juin 2018 au préfet du Haut-Rhin par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), que le médecin qui a établi le rapport médical sur la situation de la requérante n'a pas siégé au sein du collège de trois médecins du service médical de l'Ofii ayant émis l'avis du 1er septembre 2017. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que cet avis aurait été rendu dans des conditions irrégulières.
4. En deuxième lieu, le collège des médecins du service médical de l'Ofii a indiqué, dans son avis du 1er septembre 2017, que si l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait toutefois pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester l'avis émis par le collège des médecins de l'Ofii, Mme C... se prévaut d'un certificat établi par le 8 février 2017 par le médecin qui la suit selon lequel l'interruption des soins dont elle bénéficie risquerait d'avoir de très graves conséquences sur sa santé. Ce seul certificat ne saurait toutefois suffire pour contredire l'avis émis le 1er septembre 2017 par le collège de médecins du service médical de l'Ofii. Par ailleurs, s'il est constant que la requérante a été hospitalisée du 12 au 16 septembre 2017 pour subir une opération, il ne résulte pas du certificat établi par le praticien qui l'a opérée que cette intervention, qui a été pratiquée le 15 septembre 2017, soit postérieurement à la décision contestée, exigerait un suivi médical. Mme C...n'établissant pas que l'interruption des soins dont elle bénéfice en France pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision du préfet du Haut-Rhin lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " méconnaîtrait les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Mme C...soutient qu'elle a établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, pays dans lequel elle vit avec sa fille depuis cinq ans et où elle a noué une relation avec un ressortissant français.
7. MmeC..., née le 18 février 1982, a déclaré être entrée sur le territoire français le 25 juin 2012. A la date de la décision contestée, elle ne séjournait donc sur le territoire français que depuis un peu plus cinq ans alors qu'elle a passé trente ans de sa vie en République démocratique du Congo. S'il est constant qu'elle est colocataire depuis le 3 septembre 2015 avec un ressortissant français d'un appartement situé à Villeparisis dans le département de la Seine-et-Marne, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elle entretiendrait une relation conjugale avec son colocataire. Enfin, il ressort des propres déclarations de la requérante que sa fille ainée, âgée de neuf ans, vit toujours en République démocratique du Congo. Dans ces conditions, eu égard notamment à la durée de séjour en France de MmeC..., la décision du 13 septembre 2017 par laquelle le préfet du Haut-Rhin lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour n'a pas porté au droit de cette dernière au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision du 13 septembre 2017 méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale.
8. En quatrième lieu, Mme C...reprend en appel son moyen de première instance tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant sans apporter le moindre élément de nature à critiquer les motifs par lesquels le tribunal administratif ne l'a pas accueilli. Il y a ainsi lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, Mme C...n'établissant pas l'illégalité de la décision par laquelle le préfet du Haut-Rhin a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, le moyen tiré de ce que l'illégalité de cette décision entraîne l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne peut être accueilli.
10. En second lieu, les moyens tirés de ce que la décision du 13 septembre 2017 méconnaîtrait les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de ce que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision faisant obligation à Mme C...de quitter le territoire français sur la situation personnelle et familiale de cette dernière doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7.
Sur la décision fixant le pays d'éloignement :
11. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
12. Si Mme C...soutient qu'elle a été obligée de quitter son pays en raison du viol qu'elle a subi, elle ne fournit aucun élément de nature à étayer ses allégations. Au demeurant, sa demande d'admission au bénéfice de la qualité de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 avril 2013 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 3 décembre 2013. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en violation des dispositions et stipulations précitées doit être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
Délibéré après l'audience du 7 février 2019, à laquelle siégeaient :
M. Meslay, président de chambre,
Mme Stefanski, président,
M. Laubriat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2019.
Le rapporteur,
Signé : A. LAUBRIATLe président,
Signé : P. MESLAY
La greffière,
Signé : V. FIRMERY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. ROBINET
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N° 18NC01199