Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 février 2018, MmeA..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;
3°) d'enjoindre à l'administration de de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me D...d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard du respect de sa vie privée et familiale ; en effet, sa présence est indispensable aux côtés de son mari compte tenu de son état de santé, l'obligation faite à son mari de quitter le territoire français ayant été annulée par jugement du tribunal administratif de Besançon du 12 janvier 2018 ; malgré son arrivée récente sur le territoire national, elle est intégrée à la société française et ses enfants sont scolarisés en France ;
- l'arrêté préfectoral contesté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2018, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Stefanski, président, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., de nationalité albanaise, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 16 juillet 2016 accompagnée de son époux et de ses deux enfants mineurs. Sa demande d'asile du 27 juillet 2016 a été rejetée par une décision du 17 mars 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 septembre suivant. Mme A...forme appel du jugement du 12 janvier 2018 par lequel le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigé contre l'arrêté du 14 novembre 2017 par lequel le préfet du Doubs lui a fait obligation de quitter le territoire français.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête :
2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le 8 septembre 2017, alors que sa demande d'asile était en cours d'examen, M. A...avait demandé au préfet du Doubs un titre de séjour en raison de son état de santé. Le 19 octobre suivant, le préfet lui avait indiqué qu'il ne se prononcerait pas sur cette demande au motif qu'il convenait d'attendre la décision des autorités chargées de sa demande d'asile et le 14 novembre 2017, soit à la même date que la décision concernant son épouse, le préfet a prononcé une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M.A....
4. Par jugement du 12 janvier 2018, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'obligation de quitter le territoire français opposé à M. A...au motif que le préfet avait commis une erreur de droit en se fondant sur le seul refus de la qualité de réfugié, alors que M. A...avait demandé un titre de séjour sur lequel le préfet était tenu de statuer. Par jugement du 29 mars 2018, le tribunal administratif a également annulé la décision du 19 octobre 2017 pour le même motif.
5. Par suite, à la date du 14 novembre 2017 à laquelle le préfet du Doubs a pris l'obligation de quitter le territoire français contestée à l'encontre de MmeA..., il était tenu d'examiner la demande de titre de séjour pour raison de santé de M.A.... Ainsi, l'exécution de cette obligation de quitter le territoire français aurait pour conséquence de séparer les enfants du couple de leur mère pour le cas où ces enfants resteraient en France aux côtés de leur père au moins pendant la durée de l'examen de sa demande soit de la présence de leur père dans le cas où ils accompagneraient leur mère dans le pays de renvoi alors que ces enfants sont entrés en France avec leurs parents et vivent avec eux. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que l'arrêté contesté, dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction, a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'injonction demandée par MmeA....
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Mme A...a obtenu le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me D...de la somme de 1 500 euros.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 12 janvier 2018 et l'arrêté contesté du préfet du Doubs du 14 novembre 2017 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Me D...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que MeD... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...née B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
2
N° 18NC00534