Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 juin et 7 septembre 2015, Mme B..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1405014 du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour provisoire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me D...d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est pas prononcé sur la possibilité pour elle de trouver de traitement dans son pays d'origine, même s'il a estimé que le défaut de prise en charge ne comporterait pas des conséquences graves ;
- c'est à tort que le préfet n'a pas demandé l'avis du directeur de l'agence régionale de santé alors que sa demande était fondée sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de la situation politique du Cabinda et des dangers auxquels sont exposés les populations civiles, ainsi que de son état de santé ;
- en se fondant sur les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile le préfet s'est placé en situation de compétence liée et n'a pas apprécié sa situation personnelle ;
- il en est de même en ce que le préfet s'est fondé sur la décision du médecin de l'agence régionale de santé sans exercer son pouvoir d'appréciation ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne son état de santé, son attachement à la France et la situation politique au Cabinda ;
- les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont méconnus par le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 août et 24 décembre 2015, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les observations de Me C...pour MmeB....
Considérant ce qui suit :
Sur le refus de titre de séjour :
1. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays ".
2. Il ressort des pièces du dossier que dans son avis du 15 mai 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Contrairement à ce que soutient la requérante, le médecin de l'agence régionale de santé, qui n'était d'ailleurs pas tenu de le faire, s'est prononcé sur l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressée.
3. En l'absence de circonstances humanitaires apparaissant dans le dossier de la requérante, le préfet n'était pas tenu de saisir le directeur général de l'agence régionale de santé sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni de l'article L. 313-14 qui, en tout état de cause, ne prévoit pas une telle formalité.
4. Il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du contenu de la décision de refus de titre de séjour litigieuse que le préfet du Haut-Rhin se serait cru en situation de compétence liée au regard de l'avis rendu le 15 mai 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé, avis dont il s'est approprié les termes. Par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur de droit.
5. Enfin, les nouveaux documents produits en appel par Mme B...qui consistent en un certificat d'un médecin généraliste du 12 mai 2015 mentionnant seulement qu'elle nécessite un suivi qui "semble" justifier son maintien sur le territoire, d'un psychiatre du 16 juillet et du 24 septembre 2014 relatant seulement ses troubles et mentionnant qu'elle nécessite un traitement, ne suffisent pas davantage que les documents produits en première instance, à remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. En outre et en tout état de cause, le préfet démontre en appel que les troubles anxio-dépressifs sont pris en charge en Angola notamment dans les hôpitaux publics. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entachée la décision contestée au regard des dispositions de l'article du 11° de L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...)".
7. Mme B...soutient qu'elle est en France depuis neuf ans, qu'elle est veuve, qu'il n'est pas certain que ses trois enfants soient encore en vie dans son pays et que s'ils le sont, il n'est pas certain que les liens familiaux sont maintenus, qu'elle a trouvé des amis en France, a appris le français et s'est investie dans des associations. Cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée, entrée irrégulièrement en France selon ses dires à l'âge de 56 ans, s'est maintenue sur le territoire la majorité du temps alors qu'elle était en situation irrégulière, qu'elle ne démontre pas être dépourvue de liens dans son pays d'origine où résident ses trois enfants, ni l'intensité des liens qu'elle aurait tissés en France, notamment par des attestations de témoins peu circonstanciées. Il ressort également des pièces du dossier que le préfet ne s'est pas cru tenu par les refus d'asile opposés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile et n'a pas apprécié correctement la situation dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Dès lors que, comme en l'espèce, le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de cette obligation, qui se confond avec celle de la décision de refus de séjour, n'implique pas, ainsi qu'il vient d'être dit, de mention spécifique ; Il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait entachée d'un défaut de motivation doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. MmeB..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée à trois reprises par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile, fait valoir qu'elle court des risques en cas de retour en Angola. Elle ne produit cependant aucun élément probant à l'appui de ses allégations. Au surplus, la décision contestée ne mentionne pas l'Angola comme pays de destination, dès lors que l'identité de l'intéressée n'était pas exactement établie et qu'il convenait qu'elle remette à l'administration un document d'identité ou de voyage. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit en tout état de cause être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être écartées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 15NC01325