Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 octobre 2020, M. A..., représenté par Me Chaib, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est irrégulièrement que le jugement a estimé, au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales, qu'il ne justifiait pas de la durée de sa présence en France alors qu'à tout le moins les précédentes mesures d'éloignement attestaient d'une durée d'au moins sept années de présence ; la mesure d'éloignement porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et la seule notion d'ordre public ne saurait, sans erreur de droit, faire échec à la protection découlant de ces stipulations ;
- le préfet ne s'étant pas fondé sur le 7° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais sur le 1°, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur le risque à l'ordre public afin d'écarter le moyen tiré de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 septembre 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 8 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant congolais né le 17 mars 1962, a été incarcéré le 3 avril 2019 et condamné à une peine de deux ans d'emprisonnement par jugement du tribunal correctionnel de Nancy du 6 mai 2019 pour des faits d'escroquerie réalisée en bande organisée, récidive et usage de chèque contrefait ou falsifié et usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation et recel de bien provenant d'un vol, récidive et escroquerie réalisée en bande organisée, tentative, récidive et usage de faux en écriture. Par un arrêté du 11 juin 2020, notifié le 12 juin suivant, le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé sans délai à quitter le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de trente-six mois. M. A... relève appel du jugement du 17 juin 2020 par le lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si M. A... soutient que le premier juge a inexactement apprécié sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales, la notion d'atteinte à l'ordre public et la motivation de l'interdiction de retour sur le territoire, de tels moyens tenant au bien-fondé du jugement, qu'il appartient à la cour d'examiner dans le cadre de l'effet dévolutif, sont sans influence sur sa régularité.
Sur la légalité de l'arrêté du 11 juin 2020 :
3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : "I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants :/1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ".
4. M. A... n'est en mesure de justifier ni d'une entrée régulière sur le territoire, ni d'un titre de séjour en cours de validité. Par suite, il se trouvait dans le cas dans lequel l'autorité préfectorale peut prendre à l'encontre d'un étranger une mesure d'obligation de quitter le territoire sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites. Contrairement à ce que soutient le requérant à cet égard, l'autorité préfectorale ne s'est pas fondé sur le 7° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen invoqué par le requérant, tirés de ce que sa présence en France ne comporterait pas de risques pour l'ordre public est inopérant.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Si M. A..., célibataire et sans enfant, séjourne de manière irrégulière en France depuis de nombreuses années, il ressort des pièces du dossier qu'il s'est soustrait à de précédentes mesures d'éloignement, n'est en mesure de faire valoir aucune vie familiale, personnelle ou professionnelle, en dépit des attestations de membres de sa famille résidant en France, et a fait l'objet de la condamnation délictuelle rappelée au point 1 ci-dessus ayant donné lieu à son incarcération. Compte tenu des conditions de son séjour et en dépit de sa durée, en prononçant à l'encontre de l'intéressé les décisions attaquées, l'autorité préfectorale n'a porté aucune atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale de M. A... en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.
7. Le requérant reprend en appel sans précision nouvelle les moyens soulevés devant le premier juge à l'encontre de la décision prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire. Il y a lieu pour la cour d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par le jugement attaqué.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
N°20NC03023 4