Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2020, ainsi qu'un mémoire enregistré le 18 août 2021, Mme C..., représentée par Me Boukara, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2019 ;
3°) de faire injonction au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour, dans les quinze jours de l'arrêt et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté pris dans son ensemble : a été signé par une autorité incompétente ; est insuffisamment motivé ;
- le refus de titre de séjour : repose sur une erreur de fait en ce que l'autorité a considéré que sa présence en France depuis 2014 ne serait pas établie alors que toutes les pièces qu'elle produit démontrent sa présence continue en France avec son concubin depuis cette date ; estime à tort qu'elle ne justifie d'aucune insertion alors qu'elle est associée à parts égales de la société créée avec son concubin et à laquelle elle apporte son concours ; viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjours des étrangers et du droit d'asile ; méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ;
- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 juin 2021, l'autorité préfectorale du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 14 mai 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante turque née le 2 janvier 1984, est entrée en France selon ses dires en mars 2014. Le 10 mai 2019, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code. Par arrêté du 9 juillet 2019, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sans l'arrêté pris dans son ensemble :
2. Mme C... reprend en appel les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté et du défaut de motivation des décisions qu'il contient. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges.
Sur le refus de séjour :
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7°A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
4. A l'appui de sa demande de titre de séjour Mme C... a fait valoir sa présence en France depuis l'année 2014 au côté de M. B..., ressortissant turc établi régulièrement en France. Il ressort des multiples pièces produites que la requérante réside depuis l'année 2014 et de manière continue au 27 rue du Gaz à Mulhouse dans un appartement situé au rez-de-chaussée. Il est également établi par ces mêmes pièces que M. B... réside également dans cet appartement du rez-de-chaussée avec son fils mineur issu d'une précédente union. La requérante justifie également avoir créé avec M. B... une société ayant pour objet tous travaux du bâtiment et dont ils sont les associés fondateurs à parts égales. Mme C... justifie ainsi de la durée de son séjour en France ainsi que de l'ancienneté et de la stabilité de de sa relation de concubinage avec M. B... et elle est fondée à soutenir que c'est au prix d'une erreur de fait que l'autorité préfectorale a estimé le contraire.
5. Mais, il ressort de l'arrêté attaqué que l'autorité préfectorale s'est également fondée, d'une part, sur l'absence d'insertion de l'intéressée dans la société française, celle-ci ne maîtrisant pas du tout le français et ne justifiant d'aucune démarche en vue d'une insertion professionnelle, d'autre part, sur l'existence de fortes attaches familiales en Turquie où se trouvent ses parents, ses frères et sœurs ainsi que son fils âgé de quinze ans. Il ressort des pièces du dossier que l'administration aurait pris la même décision en se fondant sur ces seuls motifs qui sont de nature à établir que Mme C... ne remplissait pas les conditions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En se fondant sur de tels motifs, en dépit de la situation de concubinage de l'intéressée en France et de la durée de sa présence en France, compte tenu de ses conditions de séjour et des effets de la décision attaquée, l'autorité préfectorale n'a pas porté au droit à la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à invoquer par la voie de l'exception l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire et n'est pas fondée à soutenir que cette décision viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par suite sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
N° 20NC01984 4