Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2020, Mme D..., représentée par Me Yahiaoui, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2019 ;
3°) de faire injonction au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour : repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ; méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ; au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ; méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 18 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante russe, est entrée en France le 5 décembre 2011 pour y demander l'asile. Sa demande ayant été rejetée, elle a fait l'objet le 28 novembre 2013 d'une obligation de quitter le territoire à laquelle elle n'a pas déféré. Une demande de régularisation du 30 juin 2015 est demeurée sans suite, l'intéressée n'ayant pas complété son dossier. Elle a sollicité le 19 décembre 2016 un titre en qualité de parent d'un enfant malade. Une nouvelle demande présentée sur le même fondement a été rejetée le 15 mars 2018, rejet dont la légalité a été confirmée par jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 21 juin 2018. Enfin, elle a sollicité le 9 août 2019, la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 15 novembre 2019, l'autorité préfectorale de la Marne a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du 12 mars 2020 par lequel la vice-présidente du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 31311 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
3. En admettant même que Mme D... réside en France de manière continue depuis le mois de décembre 2011 avec sa fille A..., née le 5 décembre 2011, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée se maintient sur le territoire de manière irrégulière en dépit des mesures d'éloignement prononcée à son encontre et auxquelles elle n'a pas déféré. Hormis la scolarisation de son enfant et la participation à des actions de bénévolat, Mme D... n'est en mesure de faire valoir aucune intégration dans la société française dont elle ne maîtrise pas la langue ainsi qu'il ressort d'un procès-verbal d'audition devant les services de police ainsi que du certificat médical du docteur B... du 21 octobre 2019. Dans ces conditions, en dépit des problèmes de santé dont elle fait état ainsi que de ceux de sa fille, alors qu'il n'existe aucun obstacle à ce qu'elle poursuive sa vie familiale dans son pays d'origine où se trouvent ses parents ainsi que les membres de sa fratrie et à ce que sa fille y poursuive sa scolarité, la décision lui refusant un titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit à la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales, ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non plus que les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ou de ses conséquences sur sa situation.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
4. Il résulte de ce qui précède que Mme D... d'une part, n'est pas fondée à invoquer par la voie de l'exception l'illégalité de la décision lui refusant le séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, d'autre part, n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.
N°20NC02805 4