Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 octobre 2018, M. B... C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2017 par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration a refusé de lui accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil ;
2°) d'annuler cette décision du 29 décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de lui accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil ou à défaut de réexaminer sa situation, et ce dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne peut lui opposer les dispositions de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a pas à justifier d'un motif légitime étant entré régulièrement en France et s'y étant maintenu régulièrement jusqu'au dépôt de sa demande d'asile ;
- la circonstance qu'il ait attendu que sa femme et ses enfants puissent résider temporairement en Ouganda est un motif légitime justifiant le délai pour déposer sa demande d'asile au regard des articles L. 744-8 et L. 732-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2018.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lambing,
- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né en 1975 de nationalité rwandaise, est entré régulièrement en France en 2015 et a bénéficié d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant du 27 août 2015 au 27 août 2016. Il a obtenu un diplôme de maîtrise à l'université de Lille à l'issue de cette année universitaire. En juillet 2016, l'intéressé est retourné au Rwanda. Il a bénéficié d'un visa " long séjour temporaire " à entrées multiples du 1er janvier au 1er septembre 2017. Il a déclaré être entré à nouveau en France le 7 février 2017. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 10 août 2017 en indiquant être à nouveau entré en France le 7 février 2017. Par décision du 29 décembre 2017, l'Office français de l'immigration et de l'intégration a refusé de lui accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. M. C... relève appel du jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 29 décembre 2017.
2. Aux termes de l'article 20 de la directive 2013/33/CE du 26 juin 2013 : " Les Etats membres peuvent aussi limiter les conditions matérielles d'accueil lorsqu'ils peuvent attester que le demandeur, sans raison valable, n'a pas introduit de demande de protection internationale dès qu'il pouvait raisonnablement le faire après son arrivée dans l'Etat membre ". Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige portant transposition de l'article 20 de la directive 2013/33/CE du 26 juin 2013 : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : (...) 3° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2. (...) ". Aux termes de cet article L. 723-2 dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) III - L'office statue également en procédure accélérée lorsque l'autorité administrative chargée de l'enregistrement de la demande d'asile constate que : (...) / 3° Sans motif légitime, le demandeur qui est entré irrégulièrement en France ou s y est maintenu irrégulièrement n'a pas présenté sa demande d'asile dans le délai de cent vingt jours à compter de son entrée en France ; ( ...) ". Aux termes de l'article D. 744-37 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le bénéfice de l'allocation pour demandeur d'asile peut être refusé par l'Office français de l'immigration et de l'intégration : (...) 2° Si le demandeur, sans motif légitime, n'a pas présenté sa demande d'asile dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2 (...) ".
3. En premier lieu, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, pour refuser le bénéfice des conditions matérielles d'accueil à M. C..., s'est fondé sur le fait qu'il n'avait pas déposé sa demande d'asile dans le délai de cent vingt jours à compter de son entrée en France au sens des dispositions du 3° de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a indiqué, dans son courrier du 18 septembre 2017 adressé à l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans le cadre de la procédure contradictoire de retrait du bénéfice des conditions matérielles, être entré en France le 7 février 2017, ce qui est confirmé par les tampons figurant dans son passeport. Il n'est pas contesté que le requérant a déposé sa demande d'asile le 10 août 2017. La circonstance que M. C... est entré régulièrement en France, sous couvert d'un visa " long séjour temporaire " à entrées multiples du 1er janvier au 1er septembre 2017, ne fait pas obstacle à ce que l'Office français de l'immigration et de l'intégration lui oppose le dépôt tardif de sa demande d'asile, dès lors que les dispositions du 3° de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent le refus du bénéfice des conditions matérielles d'accueil en cas de dépôt d'une demande d'asile au-delà d'un délai de cent vingt jours à compter de son entrée en France, sans que le séjour régulier de l'étranger ne puisse faire obstacle à un tel refus. Les dispositions de l'article 20 de la directive 2013/33/CE du 26 juin 2013 précitées, dont l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile assure la transposition, ne se réfèrent pas aux conditions d'entrée en France du demandeur d'asile mais fixent comme critère d'attribution des conditions matérielles d'accueil celui du délai raisonnable de demande de protection internationale. Il s'ensuit que le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il est entré régulièrement en France et qu'il s'y est maintenu régulièrement jusqu'au dépôt de sa demande d'asile.
4. En second lieu, M. C... soutient qu'il a dû attendre que sa famille puisse résider temporairement en Ouganda avant de déposer sa demande d'asile, ce qui constitue, selon lui, un motif légitime au regard de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le requérant se borne à produire un certificat de demandeur d'asile pour son épouse et ses enfants délivré le 2 mars 2018, postérieurement au dépôt de sa demande d'asile le 10 août 2017. Par suite, M. C... ne justifie pas de la réalité de circonstances qui l'auraient contraint à déposer tardivement sa demande d'asile en France. Le moyen doit être écarté.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
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N° 18NC02746