Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 mai 2017, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt sous une astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de séjour :
- le préfet du Bas-Rhin aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;
- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision l'obligeant à quitter le territoire français :
- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;
- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 24 avril 2017.
Par ordonnance du 26 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 18 janvier 2018 à 12 heures.
Un mémoire présenté par le préfet du Bas-Rhin a été enregistré le 13 mars 2018.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., ressortissant congolais (République démocratique du Congo) né le 18 septembre 1977, a déclaré être entré en France en février 2012 ; qu'il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 20 novembre 2012 et de la Cour nationale du droit d'asile du 12 juin 2013 ; que le requérant a déposé en juillet 2013 une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 4 octobre 2013, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que M. C...a introduit une requête pour obtenir l'annulation de cet arrêté qui a été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Dijon du 17 mars 2014 ; qu'il a demandé le 2 mars 2016 au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour pour raisons de santé ; que, par un arrêté du 30 septembre 2016, le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un tel titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que le requérant relève appel du jugement du 8 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que, par un avis rendu le 8 avril 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé M. C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les soins qui lui étaient dispensés devraient être poursuivis pendant une durée de douze mois ;
6. Considérant que M. C...ne donne aucune indication sur la pathologie dont il souffre ; que le préfet du Bas-Rhin a produit en première instance un courrier électronique du consul de France à Kinshasa du 23 mars 2016 qui reprend l'analyse faite par un médecin français exerçant dans la même ville, qui décrit, avec précision, les capacités du système de santé de la République démocratique du Congo et dont il ressort que la majorité des pathologies peuvent être traitées dans ce pays ; que, dans ces conditions, le préfet du Bas-Rhin doit être regardé comme apportant la preuve qu'un traitement approprié à l'état de santé de M. C...existe dans son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ne serait pas en capacité de supporter le voyage vers ce pays ; que le moyen tiré de ce que le préfet a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
8. Considérant que M. C...n'était présent en France que depuis moins de cinq ans à la date de l'arrêté contesté et il s'y maintient en dépit de l'arrêté du 4 octobre 2013 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour et du jugement du 17 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa requête dirigée contre cet arrêté ; que ses attaches familiales se trouvent en République démocratique du Congo où résident ses deux enfants, sa mère et sa soeur ; qu'ainsi, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France du requérant, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doivent être écartés ; que le préfet du Bas-Rhin n'a pas davantage commis, pour ces mêmes motifs, d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.C... ;
9. Considérant que M. C...ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'il vient d'être dit ; que le préfet du Bas-Rhin n'était dès lors pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
Sur la décision obligeant M. C...à quitter le territoire français :
10. Considérant, en premier lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 de ce code doivent être écartés pour les motifs exposés au point 6 ;
11. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. C...doivent être écartés pour les motifs exposés au point 8 ;
12. Considérant, en troisième lieu, que les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de ces stipulations : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
14. Considérant que si M. C...soutient qu'il est menacé dans son pays d'origine, le requérant, dont la demande d'asile a, au demeurant, été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, ne produit dans le cadre de la présente instance aucun document de nature à établir le bien-fondé de ses affirmations ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 17NC01195