Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, M. E... C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000131 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 11 février 2020 ;
2°) d'annuler les arrêtés contestés ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle a été prononcée sans que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'ait été consulté ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire n'est pas motivé ;
- il est illégal du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- il est entaché d'une erreur de droit, dès lors que son comportement ne permet pas de caractériser un risque de fuite ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne mentionne pas sa durée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2020, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
1. En premier lieu, aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Selon l'article R. 511-1 du même code, alors applicable : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, même si elle n'a pas été saisie d'une demande de titre de séjour fondée sur les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, l'autorité administrative qui dispose d'éléments d'informations suffisamment précis et circonstanciés établissant qu'un étranger résidant habituellement sur le territoire français est susceptible de bénéficier des dispositions protectrices du 10° de l'article L. 511-4 du même code doit, avant de prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire, recueillir préalablement l'avis du collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a, lors de son audition du 7 janvier 2020, fait valoir son état de santé en produisant deux certificats médicaux des 8 juin 2015 et 20 décembre 2019 mentionnant qu'il souffre de troubles post-traumatiques. Toutefois, M. C... avait, à cinq reprises depuis décembre 2012, vainement sollicité son admission au séjour en faisant valoir les mêmes troubles. Sa dernière demande, présentée en mars 2017, avait donné lieu à un avis du 1er septembre 2017 par lequel le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration avait estimé que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ni le certificat médical du 8 juin 2015, déjà pris en compte à cette occasion, ni celui du 20 décembre 2019, qui ne mentionne aucune aggravation de l'état de santé de l'intéressé depuis 2017 et ne se prononce pas sur les conséquences d'un défaut de prise en charge médicale, ne remettent en cause cette appréciation, dont le bien-fondé a, au demeurant, déjà été confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy par un arrêt du 14 mai 2019. Dans ces conditions, ces éléments ne sont pas de nature à établir que le requérant serait susceptible de bénéficier des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité. Par suite, le préfet a pu régulièrement s'abstenir de recueillir, préalablement à sa décision, l'avis du collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
3. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. C..., à supposer même que ce dernier ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Angola, soit de nature à faire obstacle à son éloignement au sens des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, ni qu'il lui permettrait de prétendre de plein droit à la délivrance de la carte de séjour temporaire mentionnée au 11° de l'article L. 313-11 du même code.
4. En troisième lieu, en se bornant, sans plus de précisions, à faire valoir la durée de sa présence en France, les agressions qu'il allègue avoir subies dans son pays d'origine et la gravité de son état de santé, M. C... ne démontre pas que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Sur la décision relative au délai de départ volontaire :
5. En premier lieu, aux termes du troisième alinéa du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".
6. L'arrêté contesté, qui vise ces dispositions et indique que M. C... a fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement auxquelles il ne s'est jamais soumis, comporte ainsi un énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
8. En troisième lieu, il est constant que M. C... n'a déféré à aucune des mesures d'éloignement dont il a fait l'objet les 11 juillet 2013, 6 octobre 2015, 9 mai 2016 et 16 octobre 2017. L'intéressé ne faisant valoir aucune circonstance particulière pour justifier ce comportement, le préfet a pu légalement estimer qu'il risquait de se soustraire à la mesure d'éloignement contestée.
9. En quatrième lieu, en se bornant, sans plus de précisions, à faire valoir la durée de sa présence en France et la gravité de son état de santé, M. C... ne démontre pas que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
11. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru lié par les décisions des autorités chargées de l'asile, qui ont rejeté les demandes d'asile de M. C.... D'autre part, ce dernier n'apporte aucun élément, ni même aucune précision sur les menaces auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays, l'Angola, et pour les raisons indiquées au point 2, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il pourrait y subir une dégradation de son état de santé telle qu'elle pourrait être regardée comme un traitement contraire aux stipulations et dispositions précitées.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
13. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
14. S'il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France en décembre 2011, soit plus de huit ans avant la décision contestée, il ne se prévaut d'aucune attache personnelle ou familiale qu'il aurait développée sur le territoire national et il s'y est maintenu irrégulièrement en dépit de plusieurs mesures d'éloignement auxquelles il s'est soustrait. Par ailleurs, ainsi qu'il a déjà été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé présente un degré de gravité exceptionnelle et les menaces alléguées dans son pays d'origine ne sont pas établies. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans.
Sur l'assignation à résidence :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
16. En second lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté contesté indique à son article 5 que la durée de la mesure d'assignation à résidence est fixée à 45 jours, renouvelable une fois. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
17. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de M. C..., ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1 : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour M. D... C... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
N° 20NC02176 2